Dans cet entretien, Néjib Ayed, directeur général des JCC, parle de sa vision du festival et de la nouvelle rétribution des Tanit et du prix Tahar-Cheriaâ ainsi que du nombre revu à la baisse des films qui passeront cette année sur nos écrans. Qu'est-ce que vous nous annoncez d'ores et déjà pour cette session ? J'ai été nommé relativement tard pour pouvoir réaliser la session dont je rêve en 2017 ; c'est pour cela que j'ai décidé de travailler sur deux sessions 2017 et 2018. Mon objectif est de faire une refondation des JCC et de revenir aux fondamentaux. Vous n'êtes pas le seul à l'avoir dit... Effectivement, mais je pense que je vais commencer à travailler sur cet objectif en 2017 pour le réaliser en 2018. Que représentent pour vous «les fondamentaux»? J'ai suivi les JCC depuis 1970 en m'imprégnant de leur esprit et j‘ai collaboré pendant 12 ans avec le festival. Pour moi revenir aux fondamentaux veut dire qu'il faut revenir à cette logique militante des JCC. C'est un festival qui n'a jamais été un festival de paillettes. Son objectif est de promouvoir les cinématographies arabes et africaines et de mettre en valeur les réalisateurs des films. Les véritables vedettes des JCC sont les auteurs, ce ne sont pas les starlettes ou les stars... Sur un autre plan, il y a eu une cassure entre les africains et les Arabes pendant ce festival, on va travailler à rétablir ce pont de nouveau. Les JCC étaient aussi un festival tri-continental qui faisait la part belle aux cinématographies asiatiques et d'Amérique Latine. Cette année, on va revenir sur cet aspect pas sous forme d'un hommage ou de «cinéma du monde» mais sous forme de section «Amérique Latine» et «Asie». Dans ces sections, il y aura des focus sur un pays. Cette année, par exemple,il y aura un focus sur l'Argentine et sur la Corée du Sud et ça sera avec un esprit festif c'est-à-dire on aura en même temps les films et les réalisateurs qui les accompagnent mais aussi les musiques, les danses et l'art culinaire de ces pays en question pendant une soirée spéciale. Côté monde arabe et Afrique, il y aura un focus sur l'Algérie et sur l'Afrique du Sud dans le même esprit. Nous allons également concentrer les films. Le nombre de films a tellement augmenté ces dernières années que c'est devenu ingérable.Passer quelque 450 films en une semaine est vraiment exagéré à mon sens. On va montrer entre 120 et 150 films au maximum. Côté Tanit et compétitions ? Cette année, on va rétablir la compétition pour les films documentaires qui a été éliminée. Ce n'était pas une décision très sage vu qu'une bonne partie de nos cinéastes africains et arabes sont très intéressés par ce genre pour des raisons aussi bien artistiques que de production. Nous avons éliminé la section première œuvre parce qu'elle est en compétition directe avec la compétition officielle. Les films les plus intéressants dans le monde arabe et africain ce sont souvent des premières œuvres. Si on fait de la concurrence à l'intérieur de cette programmation ce n'est pas, à mon avis, très intelligent. Cela dit, nous gardons le prix Tahar Cheriaâ pour la première œuvre d'une manière transversale. Le prix sera décerné par un jury spécial. Ce jury aura à voir les films en compétition de long métrage aussi bien de fiction que de documentaire et décernera le prix de la première œuvre au meilleur film. Un film peut avoir donc un Tanit d'or ou d'argent et avoir en même temps le prix Tahar Cheriaâ. Il y aura donc la compétition officielle de fiction long et court métrage, la compétition officielle documentaire de court et long métrage et le prix Tahar Cheriaâ pour la première œuvre, décerné par un jury spécial. Nous avons également doublé le montant de tous les Tanit. Doubler le montant des prix pour mieux faire face à la concurrence? Nous ne fonctionnons pas selon la logique de la concurrence parce qu'il n'y a pas de vraie concurrence. Nous ne sommes pas concurrents de Marrakech, nous ne sommes pas réellement en compétition avec Dubaï. Il y a une section sur laquelle nous sommes en compétition, à savoir les films arabes soutenus, soit par les JCC, soit par Dubaï. Mais il n'y a pas de concurrence directe avec ce festival. Le Caire est un festival international qui a une petite section qui s'appelle le film arabe qui ne nous met pas en concurrence non plus. Ce qu'il y a c'est qu'il faut donner plus d'importance à nos prix tout simplement. On aimerait bien que nos prix soient non seulement symboliques mais aussi intéressants pour les producteurs et les réalisateurs. Financièrement parlant, avez-vous les moyens de le faire ? Bien entendu sinon on ne l'aura pas annoncé. Pour nous, c'est une question de gestion et pas une question de moyens. Mis à part le financement du ministère des Affaires culturelles, il y aura aussi un certain nombre de partenaires qui vont soutenir le festival pour gagner en visibilité. Je parle d'un partenariat qui soit à la hauteur de l'image de ce festival.