Plusieurs sections inédites enrichiront le programme de la 26e édition des JCC, qui se tiendra du 21 au 28 novembre. Il s'agit, du côté de la compétition, du «Prix Tahar Cheriaâ de la Première œuvre» et de «Carthage Ciné-Fondation». Brahim Letaïef, directeur des JCC, a pour maîtres mots «Dialoguer, rêver, avancer » afin de résumer la philosophie de cette édition. «Les premières sessions des JCC, qui ont été fondées, en 1966 par Tahar Cheriaâ, pour promouvoir la production cinématographique en Afrique et dans le monde arabe, qui était encore à ses premiers pas, étaient composées exclusivement de premières œuvres de cinéastes qui sont devenus par la suite, et pour la plupart, des figures emblématiques du cinéma africain et arabe», explique Brahim Letaïef directeur des JCC 2015, mieux, poursuit-il, « les JCC ont été souvent le témoin de l'éclosion de nouvelles expériences et de nouveaux parcours cinématographiques, une tradition qui nous a poussé à ne plus nous limiter uniquement au prix de la première œuvre mais de consacrer toute une section dédiée aux premières œuvres.» Ainsi, des longs métrages de fiction et de documentaire, de sensibilités différentes et appartenant à divers univers cinématographiques, concourront pour le prix Tahar Cheriaâ de la première œuvre. Compétition de fiction : la section phare «Carthage Ciné-Fondation» est également une nouvelle section officielle des JCC, elle a été créée cette année, toujours selon le directeur des JCC, «pour témoigner de la diversité et du dynamisme de la création cinématographique à l'échelle internationale. Elle a pour objectif la découverte et la valorisation de jeunes talents à travers la programmation, pour chaque session, de courts métrages réalisés par les étudiants des écoles de cinéma du monde entier». La compétition est ouverte uniquement aux films de fiction et d'animation. Le jury international de «Carthage Ciné-Fondation» décerne un prix pour le meilleur film, lors de la cérémonie officielle de clôture des JCC. Pour le reste, la sélection officielle se ventile entre la compétition officielle des longs métrages et des courts métrages de fiction et de documentaires. «La compétition des films de fiction demeure la section phare du festival tant elle attire, en premier lieu, le regard des cinéphiles et bénéficie, en second lieu, de la plus grande couverture médiatique», note Brahim Letaeif qui précise : «Les films qui seront sélectionnés s'inscriront dans les fondamentaux du festival, à savoir son enracinement dans son identité africaine et arabe tout en s'ouvrant sur les nouveaux cinémas et les nouvelles expressions artistiques ». Quant à la section compétition documentaire elle sera ouverte seulement aux documentaires supérieurs à 40 minutes, soit les longs métrages. De l'inédit dans les sections parallèles Quatre sections parallèles seront totalement inédites cette année : «Les Etalons de Yennenga», où il s'agit de programmer les 24 films primés au Fespaco (Festival panafricain du cinéma de Ouagadougou) ayant reçu la récompense suprême, soit «Les Etalons d'Or». Tous les réalisateurs, encore en vie, de ces films, dont le fabuleux «Finyé» du Malien Souleymane Cissé, «Tilaï» du Burkinabé Idrissa Ouedraogo, «Teza» de l'Ethiopien Haïlé Guérima, seront parmi nous. Une salle de cinéma personnalisée sera complétement consacrée à cette édition. «Nouveaux Territoires» est une section qui se veut une fenêtre sur les productions, entre courts et longs métrages, les plus récentes caractérisées par un souffle novateur et subversif, loin du formatage commercial. Au menu, il y aura, entre autres, des films de l'Algérien Tariq Teguia et du Portugais Miguel Gomez, auteur de la trilogie «Mille et une nuits» programmée à Cannes 2015. Autres sections nouvelles : «Les JCC à l'Université», où un programme de deux films par jour est prévu notamment à l'université de La Manouba, et «Mille et un films» où le réalisateur Moncef Dhouib animera un ou plusieurs ateliers d'initiation et de formation rapide de jeunes amateurs de l'image filmique avec la participation d'acteurs tunisiens bénévoles. Il faut dire que «l'image s'est démocratisée grâce au numérique; par conséquent, enfants et jeunes sont amenés à apprendre à filmer dès leurs plus jeune âge, l'idée est de permettre aux participants aux ateliers, pendant la période des Jcc, de réaliser leur propre petit film avec le matériel dont ils disposent». Autres sections parallèles : «Le panorama du cinéma tunisien» qui propose aux cinéphiles et au public de Carthage les courts et les longs métrages tunisiens récemment réalisés et non sélectionnés dans la compétition officielle. La section «Cinéma du Monde» accueillera plusieurs films phare du cinéma mondial tels «Mia Madre» de Nanni Moretti, «Youth» de Paolo Sorrentino, «Son of Saul» de Làszlo Nemes, ces films récents ont été sélectionnés à la compétition officielle de Cannes 2015, le film de Nemes ayant raflé le Grand prix. Le dernier petit chef-d'œuvre de Woody Allen, «l'Homme irrationnel» sera également de la partie. «De Berlin à Carthage» proposera 3 programmes de courts métrages et 5 longs métrages ayant déjà participé au festival international de Berlin dont «Victoria» de Sebastien Shipper, «Pina» de Wim Wenders, «Baal» de Volker Schlöndorff. «Il s'agit de films très particuliers pour leur importance historique et artistique et pour la capacité innovatrice de différentes générations de cinéastes» Plein d'hommages La 26e édition des JCC proposera plein d'hommages à des personnalités du cinéma mondial, africain et arabe : l'anti-hollywoodien Manoël de Oliveira, premier réalisateur centenaire en activité de toute l'histoire du cinéma. Ce cinéaste portugais, l'un des plus grands artistes du siècle dernier est mort le 2 avril 2015, à l'âge de 106 ans. Il a tourné jusqu'à la fin de sa vie, une cinquantaine de films dont plus de 30 longs métrages entre 1931 et 2014. Parmi ses meilleurs films, seront programmés : «Non ou la vaine gloire de commander», «L'étrange affaire Angelica», «La lettre». Assia Djebar, écrivaine et professeur de lettres et cinéaste, disparue en janvier 2015 sera également honorée. Elle était «une grande voix de la littérature maghrébine de langue française» recevant plusieurs prix internationaux pour ses œuvres littéraires et a été citée pour le prix Nobel. Membre de l'Académie française, elle signa plusieurs livres dont «Le Banc de l'Algérie», «Vaste est la prison», «Loin de Médine», «Femmes d'Alger dans leur appartement» et autres. En tant que cinéaste, elle réalisa «La Nouba des femmes du Mont Chenoua» en 1978 et «La zerda ou les chants de l'oubli » en 1982 qui seront tous deux projetés. Autre personnalité figurant dans cette section «Hommages» Habib Masrouki, disparu en 1980. Cinéaste et auteur dramatique, il coréalisa au sein du Nouveau Théâtre, «La Noce» dont il assura les lumières ainsi que plusieurs courts métrages dont «Notre monde », premier film de dessins animés tunisien en couleur réalisé en 1967. Il est le fondateur du club de cinéma amateur de Kairouan où il donna bénévolement des séances de formation. Il a cofondé le Nouveau théâtre et coécrit «Ghasselet Ennouader». Il a été chef opérateur, entre autres, de « Seuils interdits » réalisé par Ridha Béhi. « La Noce » et «Seuils interdits» seront, ainsi, proposés au public. Hommage sera également rendu à Nouri Bouzid dont l'ensemble des films sera projeté entre autres, «L'Homme de cendres» et «Sabots en or», tous deux sélectionnés au festival de Cannes. Habitué des JCC, le cinéaste tunisien remporta deux fois le Tanit d'or en 1986 pour «L'Homme de cendres» et «Making off» en 2006. Enfin, honneur sera rendu aux femmes du cinéma égyptien qui nous ont quittées cette année, en l'occurrence, les actrices Faten Hamama, Mariam Fakhreddine et Maâli Zayed. Icône du cinéma arabe en général et égyptien en particulier, surnommée «La dame du grand écran arabe». Avec Omar Sharif, également disparu cette année, ils formaient le couple mythique du cinéma égyptien. Mariam Fakhreddine surnommée «L'ange de l'écran» est venue au cinéma, en 1951, grâce à Abdou Nassr qui lui donna un rôle dans son long métrage «Une nuit d'amour», suivirent plus de 200 films dont «Les pauvres», «La bonne terre», «Plus fort que la vie », «L'ange et le diable». Maâli Zayed décédée en 2014 à l'âge de 61 ans, des suites d'une longue maladie, joua dans 80 films et 60 feuilletons, elle écopa même de peines de prison pour certains de ses rôles. Cette édition consacrera, également, un hommage aux deux réalisatrices disparues, Asma El Bakri et Nabiha Lotfi. La première, qui était l'assistante de Youssef Chahine, signa une adaptation de «Mendiants et orgueilleux» d'Albert Cossery et réalisa également des courts métrages dont l'un retrace les origines tunisiennes des bâtisseurs du Caire. La deuxième est l'une des figures importantes de la Nouvelle Vague du cinéma égyptien. Elle réalisa une dizaine de documentaires dont «Les Mille ans du Caire », «Prière dans le vieux Caire», «Tell Ezaâter», « Le Monastère Sainte-Catherine», «Ma poupée», «Rue Mohamed Ali», etc. Les JCC braqueront , cette année, les projecteurs sur une cinématographie en particulier, le cinéma argentin, l'un des plus dynamiques et prolifiques du cinéma de l'Amérique du Sud. Colloque et quasi-retour du marché du film Le colloque aura pour thème «l'icône et la lettre, littérature et cinéma» et sera dédié à Abdelwaheb Meddeb, décédé en 2014. Ce colloque se basera sur le texte de cet essayiste et romancier franco-tunisien «L'icône et la lettre», évoquant le rapport entre l'image et le texte, la narration romanesque et la narration filmique paru dans «Les Cahiers du Cinéma» en juillet et août 1977, pour débattre de l'influence du cinéma sur le roman, le cinéma sujet de roman, romancier et cinéaste, etc. Des communications de spécialistes et de contradicteurs sont au programme. Comme pour les éditions précédentes « La leçon de cinéma» ou «Master Class» sera maintenue, elle sera assurée lors de cette session par le cinéaste et producteur mauritanien Abderrahmane Sissako. Le marché du film est quasiment de retour puisqu'une salle de cinéma sera entièrement consacrée au syndicat des producteurs de films de longs métrages afin de présenter les films arabes et africains aux distributeurs d'ici et d'ailleurs. Ce qui amorcera la mise en place d'un marché du film en bonne et due forme. Dans la section «Takmil», les JCC apporteront comme d'habitude une aide matérielle et financière à la finition de films africains et arabes en offrant des bourses d'aide en numéraires ou en travaux de post-production proposés par les partenaires du festival, tandis que la section «Producer's network» soutient et accompagne les professionnels africains, entre réalisateurs et producteurs, porteurs d'un projet de long métrage fiction ou documentaire en cours de développement.. Décentralisation et petits déjeuners de la presse Cette année, les JCC iront dans les régions et seront, ainsi, fidèles à l'initiative de décentralisation réalisée en 2014, renouant, en fait, avec une ancienne action qui a, hélas, périclité. Bref, 9 villes, Jendouba, Kasserine, Sfax, Monastir, Gafsa, Nefta et autres bénéficieront d'une programmation de films. Côté public, les cinéphiles seront gâtés puisque les débats avec les réalisateurs des films de la compétition se dérouleront, comme de tradition, le lendemain à la maison de la Culture Ibn Khaldoun et seront animés par la FTCC, mais aussi dans les salles après les projections. Le prix du public, lui, sera maintenu. Pour une meilleure communication et pour répondre aux besoins des jeunes et moins jeunes, une application téléphonique JCC sera proposée, les intéressés trouveront tout sur leur Smartphone, le programme, les salles, le vote du public. Enfin, une nouveauté côté relation JCC-médias : « Les petits déjeuners de la presse» où, à chaque fois, des journalistes de la presse écrite et audiovisuelle seront invités à exposer, développer un thème et à en débattre avec des invités du festival, cela autour d'un petit déjeuner, les rencontres seront filmées et couvertes par les médias. A suivre donc...