Rendez-vous trop longs, pénurie de médicaments, etc. Le calvaire des patients à l'hôpital Aziza-Othmana continue. Reportage 9h00. Hôpital d'Aziza-Othmana : la salle d'attente est archicomble. Il s'agit de celle du service d'hématologie (maladies du sang). Les uns sont là depuis 5h00, les autres sont arrivés à 6h00. Pratiquement tous viennent de loin ; du Kef, de Jendouba, de Tataouine, de Gafsa, de Bizerte. Certains consultent pour une leucémie, d'autres pour une carence en potassium. La fatigue se fait sentir chez ces patients, dont la pathologie est lourde et la prise en charge coûteuse. A première vue, ce service donne l'illusion d'être dans un établissement ultra moderne, «alors que la qualité des soins reste médiocre» selon certains patients et «se cantonne au curatif». Certes, les hôpitaux sont dotés d'un matériel lourd relativement sophistiqué mais qui se dégrade rapidement du fait de mauvaises conditions de maintenance. Le cancer revient comme un leitmotiv sur les lèvres des patients interrogés sur leurs maux. Visage fin, yeux clairs et malicieux, M. Ali Hatiyesh, 67 ans, est retraité de l'Onas. Originaire de Gabès, cet ingénieur révèle qu'il souffre de la maladie de Hodgkin: «C'est une maladie lourde qui nécessite beaucoup d'argent. J'ai toujours été prévoyant dans ma vie. J'ai laissé de l'argent en banque mais malgré la prise en charge qui est partielle, j'ai dû dépenser beaucoup d'argent. La maladie est un malheur qui arrive à n'importe quel âge. Personne n'est à l'abri ». Notre homme a pointé de bon matin, à 5h. «Le médecin commence ses consultations à 11h00. J'espère être parmi les premiers. Les rendez-vous sont généralement lents et espacés et l'attente est insupportable, notamment lorsqu'on est atteint d'une maladie «presque incurable». C'est une maladie silencieuse. Au début, il n'y avait rien d'apparent, ensuite des ganglions sont apparus au scanner», souligne le patient, et de poursuivre : «Et même en étant affilié à la Cnam, on ne peut pas faire face au coût élevé de la pathologie», ajoute notre interlocuteur sur un ton chargé d'émotion et de colère tout en mettant l'accent sur la froideur de certains médecins pour qui les patients sont de simples numéros de dossier. Certains sont même avares d'un sourire alors qu'il est parfois meilleur qu'un remède. La dimension psychologique est très importante dans la prise en charge d'un patient. Or le médecin est parfois insensible à la douleur de ses patients, surtout lorsqu'il s'agit de malades atteints de cancer. Leïla est une autre jeune fille leucémique. Elle indique avoir subi des séances de chimiothérapie(ABVD), «je suis arrivée à 5h00. J'attends toujours mon tour». Dans ce service réservé à l'hématologie, la liste d'attente est longue et la salle n'a pas désempli jusqu'à 15h00. Diplômée de chimie industrielle, la jeune fille, qui souffre d'une tumeur bénigne, est à la fleur de l'âge. Consciente de sa maladie, elle précise qu'elle est affiliée à la Cnam régime de soin public. Pour ses cures de chimiothérapie, elle s'approvisionne en sérum auprès de la policlinique Cnss El Omrane. «Je bénéficie de l'Apci). J'effectue mes analyses au laboratoire de l'hôpital. Ailleurs, elles sont très coûteuses. Le scanner n'est pas non plus payant, dit-elle sur un ton plein d'assurance. Leïla est optimiste quant à son état de santé : «C'est mon dernier contrôle après le scanner et les séances de chimio. Dieu merci, c'est un cancer bénin, j'espère qu'il sera sans suite», conclut-elle.