Le projet d'aménagement d'une unité de greffe stérile au sein de l'hôpital d'enfants de Bab Saâdoun permettrait d'éviter des transferts très coûteux à l'étranger Chaque année, de jeunes cancéreux attendent d'être transférés en France pour suivre une chimiothérapie intensive et subir une autogreffe de cellules souches épinères, car les seuls hôpitaux dotés de services d'oncologie pédiatrique en Tunisie ne disposent pas de cabine stérile. Des enfants atteints de neuroblastome métastatique, maladie qui se développe à partir de la chaîne sympathique ganglionnaire et qui métastase au niveau de la moelle osseuse dans 2/3 des cas, doivent suivre des séances de chimiothérapie intensive et subir ensuite une autogreffe de cellules souches hématopoïétiques afin de permettre la régénération de la moelle. Or, pendant toute la période où ils suivent cette chimiothérapie intensive, les jeunes malades doivent être placés dans une chambre stérile car ils souffrent d'un déficit immunitaire considérable causé par ce traitement lourd et très agressif qui détruit l'ensemble des cellules hématopoïétiques. Dans les unités d'oncologie pédiatrique françaises, à titre d'exemple, les consignes sont très claires et de nombreuses précautions sont prises pour protéger les malades. Tout au long du traitement par chimio, qui peut durer plusieurs mois, l'enfant privé de défense immunitaire doit être placé dans une chambre stérile qui le protège de tout agent pathogène. Les personnes qui entrent dans la chambre doivent au préalable se doucher avant d'enfiler une combinaison stérile. «Nous n'avons pas encore de chambre stérile pour les enfants atteints de cancers graves et qui suivent un traitement très lourd, observe Fatma Khedira Chok, présidente d'une association qui aide et accompagne les enfants atteints de cancer. Les chambres des unités d'oncologie pédiatrique sont d'une propreté irréprochable. Mais cela ne suffit pas. Les enfants dont le système immunitaire est très affaibli doivent être soignés dans un environnement stérile». Les conditions de stérilité ne constituent pas le seul problème. L'autogreffe et l'allogreffe, deux opérations délicates pratiquées chez les enfants atteints de leucémie, de neuroblastome métastatique, ne sont toujours pas réalisées dans les unités d'oncologie pédiatrique, faute de plateau technique et de banque de donneurs. Les enfants âgés de plus de deux ans et atteints de leucémie sont traités dans le service d'hématologie adulte de l'hôpital Aziza-Othmana, faute de structure spécialisée en hématologie pédiatrique. Plusieurs enfants, à l'instar de Maram, une petite fille âgée de deux ans et demi et atteinte d'un neuroblastome métastatique, ont dû être transférés à l'étranger pour pouvoir suivre une chimiothérapie intensive et faire une autogreffe. A cause du coût trop élevé de la prise en charge, d'autres enfants attendent que leur transfert soit pris en charge soit par la Cnam, soit par des donateurs généreux. Tayma, une autre enfant atteinte d'un neuroblastome métastatique, est venue, cette année, allonger une liste déjà trop longue d'enfants qui doivent suivre un traitement dont le coût avoisine les 400.000 euros. Jeune architecte dont la nièce est morte d'un cancer en bas âge, Fatma Khedira Chok se bat pour permettre à des enfants atteints de cancer de s'en sortir sans avoir besoin d'être transférés à l'étranger. La jeune femme en liaison avec le chef de service d'oncologie pédiatrique et le directeur de l'hôpital, vient de mettre la touche finale à un rapport. Celui-ci expose les principales composantes d'un projet de création d'une unité de greffe stérile au sein de l'hôpital d'enfants de Bab Saâdoun. D'après cette brillante architecte, il serait possible d'aménager une unité, comportant quatre cabines stériles et équipées de pression positive, dans laquelle les enfants peuvent suivre une chimiothérapie intensive et faire éventuellement une autogreffe de cellules souches hématopoïétiques. «Il s'agit d'une unité dont les chambres sont maintenues stériles grâce à la diffusion d'un flux laminaire. Les conditions d'accès sont très strictes. Toute personne qui entre dans cette unité doit obligatoirement se doucher et porter une combinaison stérile. Les repas et les vêtements sont livrés à travers une fenêtre guillotine sans entrer en contact avec le malade afin de le protéger», explique l'architecte et présidente de l'association d'aide aux enfants cancéreux. La réalisation de cette unité dont le coût est estimé à sept cent mille dinars, soit l'équivalent de la prise en charge d'un enfant cancéreux à l'étranger, permettra d'éviter des transferts trop coûteux pour les parents et pour l'Etat.