«Blue maqams» en première mondiale, la clôture qu'il fallait pour une édition exceptionnelle. Un spectacle très attendu par le public de Hammamet. Les gradins du théâtre étaient noirs de foule. Une foule venue redécouvrir un artiste qui a sorti l'instrument du oud de ses gonds classiques pour le confronter à tous les instruments du monde. Avec une vingtaine de minutes de retard, Anouar Brahem entre sur scène sous les applaudissements du public, accompagné par trois grands noms du jazz mondial: Django Bâtes au piano, Dave Holland à la contrebasse et Nasheet Waits à la batterie. Premières notes du premier morceau, le oud de Anouar Brahem entame un Taqsim en solo avant d'être rejoint par le piano et par la contrebasse. Une fusion de ces trois instruments d'un subtil dosage qui marquera tout le spectacle avec une introduction de l'élément «batterie» à des endroits précis où on ne fait appel à la percussion que pour donner des «rondeurs» surprenantes à cette musique. «Blue maqams» annonce déjà ses couleurs : jazzy certes, mais aussi fluide et feutré. Une écriture musicale très raffinée et distillée à travers des instruments qui entrent dans cette écriture avec beaucoup de discrétion sans trop la monopoliser. Mais le luthiste tunisien les dépasse quelquefois dans des improvisations savantes et qui permettent au public de retrouver le Anouar Brahem qu'ils ont toujours connu. Un album qu'on qualifiera de plus «universel» que les précédents tant la musique joue sur des univers d'une immense profondeur humaine. Le public qui se souvient encore du dernier passage de l'artiste en 2010 à Hammamet ne décrochera pas une seconde de ce voyage musical d'une remarquable élégance. Un public plongé dans une écoute presque religieuse de cette musique qui nous prend tout d'abord par un aspect presque ludique mais qui, au fur et à mesure que le piano, la contrebasse et la batterie «s'enroulent» autour du oud, nous transporte. Pour Anouar Brahem, la confrontation avec le public tunisien a toujours été très importante. Cette clôture du festival de Hammamet a permis à cet artiste de vivre justement ce moment très important où il présente pour la première fois son nouvel album fraîchement enregistré à New York. Un album écrit avec une remarquable justesse et avec lequel l'artiste confirme de nouveau qu'aucune frontière ni origine ne résiste à la musique. Un voyage exceptionnel à l'écriture très recherchée qui clôt le festival international de Hammamet en beauté.