Il est le premier sourire du matin. Celui que l'on rencontre à l'heure du café avec un plaisir toujours renouvelé, et la même question en points de suspension : où donc Lotfi Ben Sassi trouve-t-il tout cela ? Les Bokboks de Lotfi Ben Sassi éclairent notre quotidien souvent morose, la lecture de nouvelles quelquefois tristounettes, et l'annonce de crises parfois graves. Avec insolence, impertinence, et justesse, il interroge l'actualité, la commente à sa manière, met le doigt là où cela fait mal et n'hésite pas à appuyer. Et l'on ne parvient même pas à lui en vouloir, fût-on victime de ses pointes, tant cela est drôle, juste, et incisif. Quand on connaît le personnage, éternel jeune homme à la mèche en bataille, les yeux limpides et le sourire complice, on se repose la question : «Où donc trouve-t-il tout cela ?». Ce «tout» que nous avions vu et vécu en même temps que lui, dans le même monde, mais sans ce regard décapant et féroce, cet humour ravageur, et dont, finalement, nous n'avions rien vu. Les Bokboks sont, aujourd'hui, une institution. Ils ont déjà fait l'objet de plusieurs albums. Le prochain est sous presse, et paraîtra dans les jours à venir. A Tunis d'abord, où il sera présenté, avant de faire l'objet d'une co-édition en France avec les éditions Orient que dirige Isabelle Baudis. L'opus s'appelle, et l'on reconnaît là le caractère provocateur de notre Lotfi Ben Sassi national : «Je suis arabe, mais je me soigne». Et il annonce en page de garde : «C'est incurable». Le ton est donné. Tout au rythme des dessins, on rit, jaune quelque- fois, avec tristesse souvent, tant ce qu'il décrit est terriblement vrai, mais on rit et là est l'essentiel. A consommer sans modération.