Par Raouf SEDDIK En appelant hier le président palestinien, puis le roi de Jordanie, Donald Trump n'a reculé face à la mobilisation internationale contre son projet de déménagement de l'ambassade américaine que pour mieux avancer plus tard... La Jordanie exige une réunion d'urgence de la Ligue arabe ! Le président américain a entretenu le suspense tous ces derniers jours autour de sa décision de transférer l'ambassade américaine en Israël de Tel-Aviv à Jérusalem (Al-Qods) : ce qui valait implicitement reconnaissance que la ville sainte devenait la capitale de ce pays et, par conséquent, que les Palestiniens pouvaient sans doute dire adieu à leur rêve de retourner un jour à Al-Qods pour en faire la capitale de la Palestine libérée... En fait, cette décision américaine revient sur la table du locataire de la Maison-Blanche tous les six mois et, depuis de longues années, il y a une sorte de report automatique du transfert. Mais, Donald Trump, lui, en a fait une promesse de campagne et il a bien fait comprendre que la loi du report automatique n'était désormais plus d'actualité... C'est la raison pour laquelle on a assisté dans le monde à une vaste mobilisation afin de mettre en garde le président américain contre toute décision qui serait de nature à rendre impossible le retour à la table de négociation entre les protagonistes du processus de paix au Moyen-Orient. En phase avec la position palestinienne, l'Organisation de la coopération islamique a averti qu'en cas de décision de transfert, un sommet des pays membres serait convoqué dans les jours qui suivent pour arrêter une position commune. Cette disposition a fait l'objet d'un vote à l'unanimité lors d'une réunion au siège de l'OCI à Jeddah. La Ligue arabe est également sur le qui-vive. Son secrétaire général, Ahmed Abul Gheit, a indiqué de son côté qu'il était en contact aussi bien avec les autorités palestiniennes qu'avec les différents gouvernements arabes pour «coordonner la réaction». La Jordanie, qui assure la gestion des lieux saints musulmans à Jérusalem, a lancé un appel pour une réunion d'urgence de la Ligue arabe. C'est dans ce cadre qu'un entretien téléphonique a eu lieu hier entre le ministre des Affaires étrangères, Khemaies Jhinaoui, et son homologue jordanien, Aymen Safadi. Le communiqué du ministère rappelle la position tunisienne sur cette question : préservation du statut historique et juridique de la ville et respect des résolutions internationales en vertu desquelles la définition de son statut doit impérativement passer par la négociation. C'est ce même point — l'obligation d'une négociation avant toute modification de statut — qui a caracétrisé la position de l'Union européenne, par la voix de sa diplomate en chef, Federica Mogherini, à l'occasion de l'entretien qu'elle a eu à Bruxelles, avant-hier, avec le chef de la diplomatie américaine, Rex Tillerson. La journée d'hier était, en quelque sorte, la date butoir pour Donald Trump. Or il a choisi de ne pas trancher, tout en réaffirmant qu'il y aurait déménagement de l'ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem. C'est ce qu'il a fait comprendre coup sur coup en appelant au téléphone, d'abord Mahmoud Abbas, le président palestinien, puis le roi de Jordanie, Abdallah II. On aura compris que la mobilisation internationale, si elle a poussé Trump à reculer sur l'option d'un déménagement dans l'immédiat, ne l'a pas du tout fait reculer sur l'option d'un déménagement qui pourrait intervenir plus tard, voire dans quelques jours. D'où la nécessité de maintenir un haut niveau de mobilisation...