La dette française sous la loupe : Inquiétudes accrues avant la révision des agences de notation    Tunisie – Saïed s'entretient au téléphone avec Emmanuel Macron    Tunisie – Saïed appelle à mieux contrôler les financements étrangers illégaux des partis    Audition de Khouloud Mabrouk : les précisions du parquet    Tunisie – La situation épidémiologique de la rage est effrayante et le ministère de la santé préconise l'intensification de l'abattage des chiens errants    Tunisie – Démarrage de l'exploitation du nouveau service des archives du ministère de l'intérieur    Tunisie – Le bureau de l'ARP adopte le budget de l'assemblée pour 2025    Société El Fouledh : Mise en garde à vue de 23 personnes    Le Croissant Rouge met en garde contre la propagation de maladies infectieuses à G-a-z-a    Les ministères de l'éducation et des technologies unis dans la lutte contre la fraude aux examens nationaux    Hamma Hammami : Kaïs Saïed opère de la même façon que Zine El Abidine Ben Ali    Changement climatique: Ces régions seront inhabitables, d'ici 2050, selon la NASA    Allergies aux pollens : Que faire pour s'en protéger ?    Près de 6 000 mères ont été tuées à G-a-z-a, laissant 19 000 enfants orphelins    Mohamed Trabelsi, nouvel ambassadeur de Tunisie en Indonésie    En 2023, le coût par élève est passé à 2014,7 dinars    Volée il y a 30 ans, une statue de Ramsès II récupérée par l'Egypte    Kenizé Mourad au Palais Nejma Ezzahra à Sidi Bou Said : «Le Parfum de notre Terre» ou le roman boycotté    Centre de promotion des Exportations : Une mission d'affaires à Saint-Pétersbourg    Tunisair : Modification des vols en provenance et à destination de la France pour aujourd'hui 25 avril 2024    Pourquoi | De la pluie au bon moment...    Accidents de travail : Sur les chantiers de tous les dangers    Vandalisme à l'ambassade de France à Moscou : une fresque controversée soulève des tensions    Echos de la Filt | Au pavillon de l'Italie, invitée d'honneur : Giuseppe Conte, un parcours marqué par de multiples formes expressives et une poésie romanesque    Safi Said poursuivi suite à son projet pour Djerba    BH Assurance: Distribution d'un dividende de 1,500 dinar par action à partir du 02 mai    L'Espérance de Tunis vs Al Ahly d'Egypte en demi-finale de la Coupe d'Afrique des clubs Oran 2024    WTA 1000 Madrid : Ons Jabeur défie Slovaque Schmiedlová    Artes : chiffre d'affaires en hausse de près de 22%    OneTech : clôture de la cession de son activité d'emballage pharmaceutique Helioflex au profit du groupe Aluflexpack AG    Volley | La Mouloudia de Bousalem vice-champion d'Afrique : Un cas édifiant !    Le ST reçoit l'USM samedi : Un virage majeur    Météo : Temps passagèrement nuageux et températures entre 18 et 26 degrés    Mahdia : recherches en cours de pêcheurs disparus en mer    Ligue des champions – Demi-finale retour – Mamelodi Sundowns-EST (demain à 19h00) : Pleine mobilisation…    CONDOLEANCES : Feu Abdelhamid MAHJOUB    Mabrouk Korchid : aucune interview que je donne n'est un crime !    La Tunisie invitée d'honneur au Festival international du film de femmes d'Assouan 2024 : En l'honneur du cinéma féminin    Aujourd'hui, ouverture de la 9e édition du Festival International de Poésie de Sidi Bou Saïd : Un tour d'horizon de la poésie d'ici et d'ailleurs    L'EST demande une augmentation des billets pour ses supporters    Nominations au ministère de l'Industrie, des Mines et de l'Energie    Le Chef de la diplomatie reçoit l'écrivain et professeur italo-Tunisien "Alfonso CAMPISI"    Géologie de la Séparation : un film tuniso-italien captivant et poétique à voir au CinéMadart    Hospitalisation du roi d'Arabie saoudite    L'homme qui aimait la guerre    Foire internationale du livre de Tunis : vers la prolongation de la FILT 2024 ?    Soutien à Gaza - Le ministère des Affaires religieuse change le nom de 24 mosquées    Un pôle d'équilibre nécessaire    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Les dessous d'une diplomatie hyperactive
Turquie — Le retour de l'empire...
Publié dans La Presse de Tunisie le 09 - 01 - 2018


Par Raouf SEDDIK
On assiste ces derniers temps à une multiplication des rencontres au sommet entre les responsables turcs et leurs homologues de différents pays : que se mijote-t-il en ce moment précis de l'histoire où l'islamisme jihadiste agonise et où la paix au Moyen-Orient refait surface d'une manière tout à fait inédite et inhabituelle ?
La diplomatie turque est incontestablement dans une phase active actuellement. Les 26 et 27 décembre dernier, le président Erdogan était à Tunis et il a fait des déclarations qui ne sont pas passées inaperçues. Lors d'une conférence de presse conjointe avec le président Caïd Essebsi, il a affirmé que la mobilisation autour du statut de la Ville sainte n'était que le premier pas d'une démarche qui, à terme, vise à revoir l'organisation du Conseil de sécurité et le principe du droit de veto accordé à ses membres permanents... On se souvient que c'est sous sa présidence que s'est réuni en urgence, le 13 décembre dernier à Istanbul, un sommet de l'Organisation de la conférence islamique suite aux déclarations du président américain au sujet du statut d'Al-Qods. Faut-il comprendre que le président turc entend prendre la tête du groupe des pays musulmans pour réclamer en leur nom un statut amélioré au Conseil de sécurité de l'ONU ? Il serait temps d'ailleurs que l'ancien ordre issu de la fin de la Seconde Guerre mondiale soit revu et que le privilège des pays vainqueurs à disposer d'un droit de veto au détriment des autres soit revu. Mais pour quel ordre nouveau ? C'est la question !
Vendredi dernier 5 décembre, il était à Paris, où il s'est vu signifier par Emmanuel Macron que l'adhésion à l'Union européenne n'était pas à l'ordre du jour. Qu'elle l'était même d'autant moins que les récentes évolutions de la politique intérieure en Turquie rendaient la candidature de ce pays encore plus problématique que dans le passé. Parlant devant les journalistes, le président français faisait référence à la vague de purges qui, au nom de la lutte contre le terrorisme, a touché de façon très large des professions comme celle des journalistes, des magistrats ou des professeurs universitaires. Mais, plus encore, en réalité, c'est à la réforme constitutionnelle engagée par Ankara et conférant au président des pouvoirs très étendus que pensait Macron. Notons qu'en soulignant ce problème, sans acrimonie, il se contentait de rappeler les «critères de Bruxelles»...
Défense de la cause de l'islam et jeu de la diplomatie
Mais Erdogan n'ignore pas ces critères et n'ignore pas non plus que la politique menée par lui depuis plusieurs mois l'éloigne d'une adhésion à l'Union européenne. En vérité, il est probable que sa visite à Paris n'ait eu absolument rien à voir avec cette question de l'adhésion. En revanche, on ferait bien de prêter attention à un propos qu'il a glissé de façon incidente lors de la conférence de presse, elle aussi conjointe, lorsqu'il a salué les «cinq siècles» de relations diplomatiques entre la France et la Turquie. Remonter aussi loin dans le passé, en effet, c'est faire revivre l'empire ottoman et inscrire son action politique dans le prolongement de cet empire.
La revendication de l'héritage ottoman est quelque chose qui est de plus en plus remarqué par les observateurs de la scène politique turque. Certains ont pu croire qu'elle relevait de leur part du discours polémique, destiné à dénoncer la «dérive islamo-autoritaire» du nouveau «sultan». Ce n'est pas le cas. Il s'agit bien pour l'actuel régime d'apporter une sorte de correction au nationalisme issu de Kamel Atatürk, en rompant avec la logique de rejet du passé ottoman.
L'islamisme de l'AKP n'est pas révolutionnaire comme celui des Frères musulmans : il se veut au service d'une tradition qui est à réhabiliter. D'où sa compatibilité de plus en plus affichée avec un certain nationalisme. Et ce retour voulu à l'ère ottomane obéit à un timing qui n'est pas le fait du hasard. Il intervient au moment où la version jihadiste et brutale du «califat islamique» est en train de produire au monde le spectacle de sa déconfiture et de son échec. Le vide laissé par ce dernier est à combler par autre chose !
La Turquie pense être la puissance susceptible de représenter pour l'avenir les aspirations politiques des populations sunnites dans le monde. D'où ce mixte de sa diplomatie où l'on trouve une affirmation sans concessions des valeurs de l'islam et un engagement franc sur la scène du jeu diplomatique... Bref, ce pays veut offrir, en particulier aux jeunes générations de musulmans, l'exemple d'un pays qui défend crânement le droit de la «communauté des croyants», mais qui le fait selon les exigences des règles de la diplomatie et selon celles de la civilisation. Ce qui correspond assurément à un besoin, même si un certain radicalisme moderniste n'est pas toujours disposé à le reconnaître.
Volonté de civilisation et... brutalité des mesures
Toute la question est de savoir si le passé ottoman suffit pour lui conférer la légitimité d'un tel rôle. Il est certain que si la situation des Palestiniens devait connaître une évolution favorable dans la période à venir et que le président Erdogan y avait joué un rôle remarqué, cela lui conférerait un supplément précieux de légitimité. La même remarque, bien entendu, est valable pour le cas où, par exemple, le groupe des pays musulmans obtiendrait au Conseil de sécurité un pouvoir à la hauteur de son importance véritable grâce aux menées de la Turquie.
Mais il reste que la dérive liberticide que connaît actuellement ce pays, aussi bien à l'égard de certaines franges de l'échiquier politique, des Kurdes qui sont sous pression, de certaines professions sur lesquelles on fait peser le soupçon d'avoir trempé dans le putsch manqué de juillet 2016, etc., tout cela est de nature à susciter une défiance qui, au-delà du gouvernement turc, touchera le modèle qu'il veut présenter au monde au nom du passé ottoman...
Dimanche dernier, Erdogan était présent, accompagné du Premier ministre bulgare, lors de l'ouverture à Istanbul d'une église orthodoxe, l'église Saint Stéphane. Il a déclaré que «Istanbul a montré de nouveau au monde entier qu'elle est une ville où différentes religions et cultures coexistent en paix». Cette volonté de civilisation, si l'on peut dire, est à saluer. Mais elle n'occultera pas la brutalité de certaines mesures prises contre beaucoup d'opposants turcs et ne nous garantit pas contre le risque que cette brutalité finisse par donner à l'islamisme turc une tournure néfaste à plus d'un point de vue.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.