La question de l'égalité successorale ne se pose plus aujourd'hui comme un luxe ou un privilège. C'est un droit qui a accusé beaucoup de retard. Créée en vertu de l'ordre présidentiel du 13 août 2017, juste après l'annonce du président de la République Béji Caïd Essebsi sur l'égalité successorale, la Commission des droits individuels et de l'égalité, que préside Bochra Belhaj Hmida, présentera son rapport au président de la République en février 2018. Un rapport censé contribuer encore plus à l'ancrage de l'égalité et au respect des droits individuels, tout en se conformant à la Constitution, aux normes internationales en matière de droits humains. Certaines de ces réformes ont déjà suscité un vif débat et alimenté même des rumeurs non fondées. Plus d'explications autour de ces réformes dans notre entretien avec l'avocate Bochra Belhaj Hmida. Où en est la Commission des droits individuels et de l'égalité dans ses travaux? Quand on a commencé le travail au sein de la commission, on ne pensait pas trouver un chantier aussi important. On a voulu établir l'état des lieux des lois discriminatoires, et finalement on a remarqué que ça touchait plusieurs codes et plusieurs lois et même des circulaires (Code pénal, Code du statut personnel...) . L'état des lieux a été fait aussi bien concernant les libertés individuelles que la question des égalités. On est actuellement en phase de finalisation des propositions pour garantir les libertés individuelles et assurer l'égalité entre les citoyens d'une manière générale et non seulement entre hommes et femmes. La légalité successorale figure parmi les grandes réformes proposées ? La question de l'égalité successorale demeure la plus difficile parce qu'on essaie de toucher à ce sujet tabou depuis une soixantaine d'années. Un sujet tabou non pas pour des considérations religieuses mais en raison des intérêts qui sont en jeu. On s'est engagé au sein de la commission à garantir l'égalité du fait que cette question revêt un caractère discriminatoire à l'égard de la femme. La femme contribue aujourd'hui aux dépenses familiales et l'acquisition du patrimoine, elle joue de plus en plus un rôle important au sein de la vie politique et la société civile. De ce fait, la question de l'égalité successorale ne se pose plus aujourd'hui comme un luxe ou un privilège. C'est un droit qui a accusé beaucoup de retard. Qu'en est-il de l'ajout du nom de famille de la mère à celui de l'enfant ? La question a été débattue lors d'une réunion d'échange entre la Commission des affaires de la femme, de la famille, de l'enfance, de la jeunesse et des personnes âgées à l'ARP et notre commission. On a évoqué toutes les réformes envisageables et les questions discriminatoires, dont la possibilité d'ajouter le nom de famille de la mère à celui de l'enfant avant l'âge de 18 ans. Une proposition qui s'inscrit dans l'esprit des libertés individuelles. C'est aussi une forme de reconnaissance du rôle que joue la mère durant la grossesse .Il est inutile de revenir à la mauvaise foi et à la polémique créée de bout en bout par certaines parties. Et la question de la dot ? La dot a une histoire et une signification sociale et économique. Elle garantit à la femme un minimum de dignité matérielle. Elle a perdu aujourd'hui sa valeur réelle mais ce la ne veut pas dire que nous envisageons la suppression pure et simple de la dot. Ce la fait aussi partie des libertés individuelles et il y a des femmes qui l'exigent. La dot doit-elle rester une condition pour la consommation du mariage ou pas, c'est la question qu'on s'est posée et qui est en rapport avec le respect et la dignité de la femme. Il faut la concevoir comme un choix personnel et non pas une condition au mariage.