Le musée du Bardo accueille, jusqu'au 12 avril prochain, l'exposition d'art contemporain «l'Aboyeur» de Faten Rouissi, projet réalisé en partenariat avec l'Agence de mise en valeur du patrimoine et de promotion culturelle. Il s'agit d'une belle rencontre entre le patrimoine historique tunisien et l'art contemporain, avec des installations éphémères en son et lumière bien adaptées à l'esprit du lieu. Le projet « L'Aboyeur » de l'artiste plasticienne pluridisciplinaire Faten Rouissi est né à l'été 2017. Le personnage, affublé d'une muselière, créé part l'artiste tunisienne avait investi déjà l'amphithéâtre d'El Jem. L'aventure artistique continue au musée du Bardo et comme le dit l'artiste, on ne visite plus le musée de la même manière qu'avant. Mais, pour bien vivre la déambulation, il faut connaître les origines de l'histoire. L'Aboyeur a existé à travers l'histoire. Selon Marie Deparis-Yafil, commissaire d'exposition, c'est l'archétype du « contestataire professionnel ». C'est de cet aboyeur muselé, qui est le comble du paradoxe, qu'est né le projet et surtout le sens qu'il en donne. « La muselière sur le plan artistique est une image, un symbole des médias de masse après la révolution et dans la démocratie tunisienne naissante. Il y avait, explique l'artiste, dans les divers débats télévisés et radiodiffusés, quelque chose relevant de l'ordre du chaos et de la dissonance, des voix s'élevant non pas ensemble mais une cacophonie interminable et inintelligible, finalement plus pénible que constructive ». Avec « L'Aboyeur », l'art devient ainsi producteur de sens. « Car il ne s'agit pas, bien entendu, de museler la liberté d'expression, mais de proposer une communication relationnelle apaisée... de faire place au discours raisonné afin de suppléer tout ce bavardage médiatique... » ajoute la commissaire d'exposition. A l'entrée dans la grande salle du musée, on tombe nez à nez ave « l'Aboyeur géant », une sculpture monumentale tout en blanc accueille les visiteurs. Avec ses cinq mètres de haut, il évoque la puissance des médias et représente les « Aboyeurs » dans toutes les démocraties. « L'Aboyeur », une œuvre toujours évolutive au gré des espaces et du temps. Ces installations éphémères en son et lumière se sont adaptées à l'esprit de ce lieu rempli d'Histoire. L'artiste a utilisé plusieurs techniques plastiques : peinture, collage, assemblage, mosaïque, effets lumineux et vidéos pour la nouvelle série d'œuvres « spécial Bardo » qui trônent parmi les vestiges d'un passé punique et romain. La pérégrination commence par la Driba avec la première de la série des « Aboyeurs » : l'Aboyeur principal, le nourrisson Aboyeur, l'Aboyeur junior, l'Aboyeur chic, l'Aboyeur et la rêveuse, le mariage de l'Aboyeur ; l'Aboyeur fauviste, l'Aboyeur caméléon, l'intello et l'Aboyeur, l'Aboyeur soleil, la muselière et la feuille d'or, l'Aboyeur et l'Aboyeuse en noces d'or (50 ans d'aboiement). A la salle Constantin, on retrouve Lis l'Aboyeuse, à la salle Carthage, l'Aboyeur fêtard, à la salle Dougga, l'Aboyeur mosaïque, à la salle des mosaïques marines l'Aboyeur mobile, dans l'alcôve de Virgile, l'Aboyeur et Virgile. Cette dernière œuvre « Virgile et l'Aboyeur », pour ne citer qu'elle, est un puissant témoignage d'un échange entre le personnage moderne du XXIe siècle et un des plus grands poètes de l'Antiquité romaine travaillé à la feuille d'or. Dans cette alcôve, l'Aboyeur est venu offrir à Virgile la « Médaille du mérite culturel ». A la fin de la visite, le petit plus de cette exposition consiste en une nouvelle collection de bijoux dédiée à « L'Aboyeur au Bardo », signée Amel Henchiri, créatrice de bijoux, invitée par l'artiste Faten Rouissi qui a réalisé une collection conçue dans le même esprit décalé de l'exposition. A voir absolument !