L'annonce par le ministre de l'Education, M. Hatem Ben Salem, de l'intention de son département de publier une liste noire des médecins «complaisants» a fait réagir le Conseil national de l'Ordre des médecins (Cnom) et le ministre de la Santé publique. Si l'idée, en elle-même, a eu l'impact que l'on sait, c'est qu'elle intéresse l'opinion publique au plus haut degré. Car l'absentéisme des enseignants est tellement préoccupant qu'il concernerait plus de 15.000 absences quotidiennement. De plus en plus d'établissements sont privés de professeurs ou d'instituteurs. Pis encore, des classes entières sont totalement privées de cours pendant de longues semaines (parfois des mois). Ces absences sont, le plus souvent, justifiées par des certificats médicaux. Dont plusieurs sont de longue durée. Autant de certificats délivrés à tour de bras ne peuvent que mettre la puce à l'oreille de n'importe quel service de contrôle. Le ministère de l'Education est en droit de vérifier et de soumettre l'enseignant à une contre-visite. Selon le ministère, il y aurait près de 6.000 certificats de complaisance. 90 % de ces certificats émaneraient de psychiatres. Le Cnom et le ministère de la Santé jugent que la publication d'une liste des médecins impliqués ne relève pas des prérogatives du ministère de l'Education. C'est, de toute évidence, un argument qui tient, rigoureusement, la route. Mais il aurait fallu pour les parties qui critiquent, aujourd'hui, cette initiative de peser de leur poids pour éviter ces abus d'autant qu'ils sont connus de tous et tout le monde sait qu'ils sont monnaie courante. Un travail de sensibilisation des médecins ne serait pas de trop. Donc, il revient aux autorités sanitaires et à la corporation de moraliser le secteur pour éviter tout amalgame. Il y aurait eu, selon le Cnom, des rappels à l'ordre contre certains praticiens. Les sanctions seraient allées jusqu'à la radiation. Nous pensons que l'initiative du ministère de l'Education a permis de lever le voile sur un des aspects les plus catastrophiques, en l'occurrence le fléau de l'absentéisme des enseignants. Ce phénomène a des retombées largement dévastatrices sur la qualité de l'enseignement dispensé à nos enfants en ce sens qu'il les prive, indûment, de dizaines et de dizaines d'heures de cours chaque année. Ce n'est, donc, pas un crime de parler de cette question des certificats médicaux de complaisance. Ce fait est resté, très longtemps, un tabou en raison de la puissance du corporatisme. Actuellement, tous les sujets, sans discrimination, doivent être abordés dans le respect des lois en vigueur. Chacun est tenu de les respecter scrupuleusement. Le mérite de M. Hatem Ben Salem est d'avoir ouvert le débat sur un sujet sur lequel planait un silence de plomb incompréhensible. Que la loi s'applique, maintenant. Le ministère de l'Education peut communiquer les dossiers dont il dispose au Cnom et au ministère de la Santé publique pour qu'ils mènent leur propre enquête et prennent les mesures qui s'imposent. Pour le ministère de l'Education, ce qui importe c'est que le phénomène de ces certificats médicaux de complaisance cesse. Il est très préjudiciable à tout le système éducatif. Toujours est-il que le ministère de l'Education lui-même gagnerait à être plus vigilant au niveau des autorisations de complaisance accordées par certains chefs d'établissements à quelques enseignants.