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De lettres et de notes, telle est la chanson d'un artiste hors norme
Entretien du lundi avec Yasser Jeradi (Chanteur)
Publié dans La Presse de Tunisie le 18 - 02 - 2019

Son sourire est communication, et son énergie est positive. C'est chez lui que Yasser Jeradi nous a accueilli, pour une rencontre presque à bâtons rompus, pour parler de la vie, de l'art, du monde, du présent et de l'avenir. Artiste au cœur sur la paume de la main, Yasser ne dit jamais non à l'appel des actions citoyennes, avec son groupe Dima Dima ou seul avec sa guitare et son harmonica et se dit un troubadour qui diffuse l'amour. L'appel de la nature semble le séduire, c'est bien là qu'il est dans son élément. Yasser est un être exceptionnel de générosité et d'humanisme, le public le ressent à chaque concert, et toutes ses chansons nous arrachent, à chaque fois, une larme que nous avons du mal à cacher.
Entretien
Commençons par le commencement, on vous connaît auteur, compositeur et chanteur, mais beaucoup ignorent que vous êtes plasticien.
Avant le 14 janvier j'ai reçu le prix le plus important des arts plastiques, celui de l'Union des plasticiens. Après le 14 janvier, je me suis rendu compte que mon rôle en tant que musicien est plus important que celui du plasticien. Les arts plastiques ont un public acquis, déjà intéressé et averti. Les concerts de musique touchent un public plus vaste et paient cash en émotions et en échange, avec la musique ( live) j'arrive à ouvrir des portes. Et mine de rien, depuis le 14 janvier, j'assure en moyenne un concert par semaine, partout en Tunisie et ailleurs avec un contact intense à chaque fois avec des publics aussi divers : je charge et je me recharge en émotion et en énergie. C'est ce qui m'importe le plus dans ce que je fais.
Comment est née cette passion pour la musique ?
La première fois que j'ai vu un guitariste, c'était à l'Ecole des Beaux Arts de Tunis ; c'était comme une petite voix qui me disait « c'est cela ton chemin, c'est ta destinée », j'ai suivi mon cœur et j'ai acheté ma première guitare. Ma première apparition dans la musique c'était un pur hasard, et c'était, mine de rien, avec Fadhel Jaziri sur la scène mythique de Carthage dans le méga spectacle « Noujoum » et j'y jouais de l'harmonica. C'est à ce moment-là que j'ai goûté à la scène.
Que représente la musique pour vous ?
La musique est une chose extraordinaire qui a la capacité de changer votre vie. Les arts d'ailleurs en général ont cette faculté d'adoucir les mœurs et de construire notre humanité. L'intelligence musicale est la création de la sensibilité et la sensibilité mène à l'éthique. Toute l'histoire est une histoire d'énergie et la manière avec laquelle on l'évacue dans but de communiquer avec le monde. De scène en scène, ce qui m'importe le plus c'est l'échange d'énergie avec le public, le monde et même toutes les créatures.
Après le 14 janvier, plusieurs expériences ont vu le jour et tout est qualifié de scène alternative, est-ce une classification qui vous dérange ?
Au contraire, je n'y vois rien de négatif, je trouve que ça bouge, ça bouillonne, et c'est une manière de désigner toutes les formes musicales qui sont hors le main stream. Même si nous nous ne ressemblons pas vraiment et que le cachet de chacune des expériences gagnerait à être mise en valeur, je suis heureux de ce grand bazar. Je ne suis pas du tout pour l'exclusion. Car la diversité impose le choix et faire un choix est forcément un apprentissage de la vie.
Beaucoup sont pessimistes de ce qu'est devenu le rêve de la révolution, l'êtes-vous aussi ?
Je trouve que nous sommes chanceux de vivre cette période aussi intense de l'Histoire de la Tunisie contemporaine, nous nous affrontons, nous discutons, et nous participons à la construction d'un rêve. Le temps nous est nécessaire pour nous en sortir et nous ne devons pas oublier que nous sommes dans un contexte international qui ne nous pousse pas vers l'avant, avec l'extrémisme d'un côté et le capitalisme de l'autre. Chacun tire les ficelles de son côté et œuvre pour ses intérêts.
Je comprends la déception de certains qui ont espéré voir les fruits de la révolution rapidement, c'est la différence entre celui qui met la première marche d'un escalier et celui qui pose la dernière et arrive en haut. Il faut garder la foi. Récemment, j'ai donné un concert à Rejim Matoug, une ville qui depuis 15 ans vit sans culture et dont la seule distraction sont les mariages et pourtant un jeune de 27 ans a ouvert, sans aucun soutien, un espace culturel dans le garage de son père. Cela ne vous donne pas espoir ?
Trop d'optimisme tout de même, rien ne vous semble clocher ?
Si, un seul point que je trouve grave, le fait est que la jeunesse a perdu le sentiment d'appartenance au pays, elle manque de « tunisianité ». Ce désistement se voit dans l'immigration massive des compétences ; même si je comprends très bien les raisons sociales et économiques qui les poussent à partir. Je trouve aussi que les jeunes ont perdu beaucoup au niveau de la langue, le fait de ne plus savoir s'exprimer, car la langue forme la structure de notre réflexion et construit notre personnalité. Ne pas maîtriser sa langue ou parler comme on le fait maintenant un peu de français un peu d'arabe, un peu de tout, est à mon sens une forme de dyslexie. La langue est un axe essentiel pour construire sa réflexion, ses idées et son sens critique. Mokhtar Loghmani, un poète tunisien de Zarat, mort très jeune, a résumé ce que je viens de dire en peu de mots : «sois arabe dans ce que tu ressens et n'oublies pas que le monde est vaste ».
Car le monde à besoin de nous avec notre cachet, notre identité particulière, il n'a pas besoin de nous comme une pâle copie d'autre chose. Nous ne devons pas nous dissoudre dans la globalisation culturelle, nous devons nous faire une place en tant qu'entité et exception. Sans une langue qui offre un cadre pour la réflexion, les jeunes seront une proie facile sans aucun discernement et sans confiance en soi.
Revenons à la musique. Vous diffusez votre énergie et votre sincérité à chaque escale, quel est le but de ce voyage ?
« Yasser mhabba » est l'histoire de ma vie en chansons, une manière de dire, il faut se réconcilier avec soi pour pouvoir aimer. Ce voyage que je mène à travers ce que je fais a pour objectif le retour à la nature. Picasso dit « l'artiste ne doit pas copier la nature mais doit apprendre à travailler comme elle ». Pendant ce voyage de plus de 20 années, j'ai emmagasiné tellement d'énergie positive des gens que j'ai rencontrés que maintenant je ne peux me permettre de vivre comme je veux et comme je l'entends. Je me rends compte que la notion de « ville » est une notion limitée qui s'essouffle très vite et devient un élément oppressant. Vous savez, la calligraphie est un art qui nous apprend une question essentielle celle de la proportion par rapport à l'échelle humaine. Et transgresser cette loi dans nos villes ne peut que générer de la tension, de la violence et la dépression.
Puisque vous en parlez, la calligraphie est un art qui vous passionne et que vous exercez avec un point de vue particulier, pouvez-vous nous en dire plus ?
De l'école des beaux arts je suis sorti un artiste occidental puisque tout ce que nous apprenons est occidental. Très vite j'ai compris qu'il y avait un décalage entre ce que nous faisons et le peuple auquel nous sommes supposés nous adresser. La calligraphie, qui n'était pas bien appréciée à l'école des beaux arts, je l'ai apprise au Centre national des arts de la calligraphie, et j'ai choisi d'abord la calligraphie maghrébine qui n'est pas considérée comme artistique. Je voulais dire que la calligraphie peut être une expression contemporaine et peut survivre et s'exprimer au XXIe siècle.
Vous en êtes où ?
Je suis dans une expérience qui me parle beaucoup, que j'appelle la pop-calligraphie, comme les artistes pop, la question de l'appréciation et du goût n'est plus exclusive à la bourgeoisie, la peuple aussi a droit à sa culture et à ses expressions artistiques. Ibn Arabi l'évoque d'ailleurs bien avant moi (rires) en parlant de rapprocher l'élite du peuple. Si les inégalités salariales se réduisaient, les complexes disparaîtront et le droit à la culture sera généralisé pour tous les citoyens qui auront les moyens d'accéder à la culture. Et tout cela aura des répercussions sur le goût et les sens.
Expliquez-nous ce nouveau concept de la pop calligraphie ?
La pop-calligraphie c'est une manière de casser le clivage entre matériau noble et matériau non noble, Andy Warol a travaillé sur le photogramme, moi sur le calligramme. Je suis encore au stade de l'expérimentation et d'ici 4 mois je pense que je pourrais annoncer la naissance de la pop-calligraphie.
Revenons à la musique, quels sont vos projets ?
Côté musique j'ai trois nouvelles chansons, la première est comme une réponse à la chanson de Ali Riahi « el Alem Yadhhak » le monde rit, et ça parle de l'environnement, la seconde « sous Zero », une chanson provoquée par la photo « Qatar khayria » et une dernière s'inscrit dans la trilogie de l'amour de la patrie après Dima Dima et Chbik Nsitini. L'enregistrement sera live avec la vidéo qui va avec en guise de clip.
Toujours avec le même groupe ?
Les membres du groupe avec lequel je travaille font partie du projet, ils ont leur marge de liberté et à chaque concert c'est une nouvelle aventure faite de belle surprise. Amor Adala aux percussions, Hassine ben Miloud au nay, Amine Haddaoui à la basse et Karim Gharbi à la guitare. Je crois en l'énergie qui circule entre nous et que le public ressent. Je sens que je suis en train de diffuser du bonheur et cela n'a pas de prix.


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