PORT HARCOURT, Nigeria (Reuters) — Les services de sécurité nigérians ont remis à leurs employeurs hier 19 ex-otages du Mouvement pour l'émancipation du delta du Niger (Mend) libérés la veille, parmi lesquels figurent deux Français. Le groupe, qui comprend en outre deux Américains, deux Indonésiens, un Canadien et 12 Nigérians, a été secouru au terme d'une vaste opération militaire dans le delta du Niger, a déclaré Charles Omoregie, commandant de l'unité chargée de cette zone pétrolifère. L'armée, a-t-il souligné, s'est emparée de plusieurs camps rebelles situés dans les Etats de Rivers, de Bayelsa et du Delta, dont celui qui était dirigé par Obese, figure montante du Mend, qui détenait les 19 otages. "Deux camps ont été pris dans (l'Etat du) Delta, deux à Bayelsa et trois à Rivers (...)", a déclaré l'officier lors d'une conférence de presse. Les otages, a-t-il poursuivi, "ont tous été secourus dans le camp d'Obese, ici, dans l'Etat de Rivers, au terme d'une longue opération militaire". Après le début de l'offensive, entamée lundi, Obese a fait savoir à l'armée qu'il était prêt à se rendre, par l'intermédiaire d'anciens cadres du mouvement ayant déposé les armes l'an dernier dans le cadre d'une amnistie. "Le raid contre son camp l'a amené à décider de libérer les otages", a expliqué Charles Omoregie, ajoutant qu'Obese avait pris la fuite. L'opération est un succès d'envergure pour le président nigérian Goodluck Jonathan, qui briguera un nouveau mandat en avril. Premier chef de l'Etat issu de la région du delta, il est aussi à l'origine de l'amnistie négociée l'an dernier et la poursuite de la guérilla jetait une ombre sur son bilan. Interrogé à Londres, son conseiller Hassan Tukur a parlé de "tournant" dans le conflit. "Ceux qui croient pouvoir retenir le gouvernement en otage vont devoir y réfléchir", a-t-il déclaré à Reuters. Les sept expatriés avaient été enlevés le 7 novembre sur une plateforme pétrolière de la compagnie Afren et huit des Nigérians ont été pris en otage dimanche sur une installation d'Exxon. Les quatre autres travaillaient pour l'entreprise de construction locale Julius Berger. "C'est une expérience traumatisante", a témoigné le Canadien Robert Croke. "Ils nous ont donné des matelas pour dormir, mais pratiquement rien d'autre. On mendiait l'eau et la nourriture parce que les nôtres étaient épuisées. Ils ne nous ont pas maltraités. Ils n'étaient pas hostiles envers nous. Ils manquaient tout simplement du strict nécessaire", a-t-il poursuivi, s'adressant à la presse. Le Mend avait revendiqué l'attaque des deux plateformes où les otages ont été enlevés et fait savoir que toute tentative pour les libérer les mettrait en danger. "L'opération a duré jusqu'à 03h00 (02h00 GMT) ce matin. Il s'agissait d'une initiative conjointe de l'armée de l'air, de l'infanterie, de la marine, de la police et des services de sécurité", a précisé un militaire ayant requis l'anonymat. Charles Omoregie a par ailleurs salué le rôle joué par d'anciens dirigeants du Mend ayant accepté l'offre d'amnistie, dans la libération des otages. "Ce qui s'est produit la nuit dernière est retentissant (...) Il semble que les commandants (de la région) des gisements aient coopéré avec l'armée pour ces opérations. C'est inédit", s'est-il félicité. Les actes de guérilla du Mend, qui réclame une meilleure redistribution des richesses, se sont traduits par un manque à gagner qui a pu atteindre un milliard de dollars par mois pour l'industrie pétrolière nigériane. Sa production est actuellement de 2,2 millions de barils par jour.