La conformité dans son acception usuelle dépasse le cadre du respect des conventions, des lois et des règlements. Elle englobe le respect de l'éthique, «ethect» en anglais, qui en droit anglo-saxon est une recherche inlassable pour coller à une réalité changeante. Dans le secteur bancaire, la conformité vise à maîtriser les risques en matière de déontologie et d'éthique professionnelle. C'est pourquoi pour désigner le responsable de la fonction conformité, on parle de compliance officier, mais aussi de déontologie dont la signification renvoie à des principes distincts et à des règles de conduite disparates, dans un code de conduite accepté par l'entreprise marquant sa spécificité. La création des responsables conformité rattaché aux conseils d'administration des diverses banques, tel que recommandé par les accords de Bâle II et consacré par la circulaire de la Banque Centrale de Tunisie du 19 mai 2006, implique la mise en place d'un certain nombre d'instruments, afin de permettre l'émergence de cette sensibilité nouvelle, qui se traduit dans l'exercice d'un nouveau métier. Son exercice sous-entend l'existence de préalables dont nous citons, la publication d'une charte de conformité comportant l'engagement solennel de la direction générale de l'entreprise et son appui fort pour l'exercice de ce métier, l'implication des responsables, la compilation des référentiels externes (lois, règlements) ou internes (manuel de procédure, circulaires, organigramme), la détection par l'acquisition de logiciels, des opérations transitant par les banques pouvant déceler de possibles opérations de blanchiment d'argent et la sensibilisation de personnel et sa formation pour être aux aguets, pour contrecarrer toute dérive. L'existence d'un mécanisme d'alerte éthique, d'un comité de déontologie, etc. Outre ces instruments, l'exercice d'une telle fonction nécessite la conscience et son enracinement , que le risque de non-conformité constitue un enjeu réel pour les banques; que derrière le respect apparent des lois et des règlements peuvent se cacher, en connaissance de cause ou non, des procédures irrégulières, et même des détournements de procédures mettant en cause certains principes fondamentaux de l'activité bancaire et touchant l'éthique qui guide le secteur. Le risque de non-conformité concerne plusieurs domaines et prend plusieurs aspects. Nous allons dans le cadre de cette rapide réflexion inventorier quelques-uns afin de donner un aperçu succinct de l'importance de cette mission, et des attentes de l'organe régulateur, suite à la mise en place d'une telle fonction. L'énumération des exemples cités en infra touche plusieurs facettes non limitatives de l'activité bancaire, afin de rendre compte de la diversité des domaines d'intervention du compliance officier. Dans le domaine relation clientèle : Identifier les grandes catégories de clientèle constituant le portefeuille d'une banque, afin de répondre à ses besoins spécifiques, en inventant des produits appropriés. Surveiller de près le principe de l'égalité de l'accès au crédit et son coût. Segmenter les conditions de banque par catégorie de clientèle afin d'éviter de rattraper les moins-values occasionnées par le consentement de taux préférentiels à la clientèle d'engagement, réputée revendicative, en grevant les opérations effectuées par la clientèle des salariés, réputée plus faible. Dans le domaine litigieux : Eviter l'excès de procédure, par la multiplication des actions, dont les frais sont supportés par le poursuivi, chaque fois qu'une seule action permet d'aboutir au même résultat. Eviter l'éparpillement, des garanties conférées sur plusieurs biens immeubles ; tant qu'une seule inscription suffirait à garantir la totalité de la créance bancaire. Eviter le refus abusif ou bien le soutien abusif pouvant précipiter les difficultés d'un client. Eviter les vases communicants mettant en cause la séparation des patrimoines, en permettant l'ouverture et le fonctionnement laxiste de comptes, au nom du gérant, avec d'autres au nom de la société. Eviter le laxisme en matière d'information figurant sur les chéquiers, par l'acceptation par exemple d'inscrire un nom, une dénomination commerciale, une adresse parfois, fantaisistes, rendant, en cas de rejet, l'exécution en faveur du bénéficiaire, pénible, et les possibilités d'échappatoires offertes au contrevenant, fort nombreuses. Sur le plan comptable Etre aux aguets au risque d'absence de transparence des états comptables suite à une mauvaise conception des procédures, comme par exemple la comptabilisation d'avance, des recettes, bien avant leur perception réelle. Le non-respect de la division des risques de crédit, mettant en péril l'intérêt des actionnaires. L'absence d'information de la clientèle. Le non-respect des pistes d'audit. Cette énumération, limitative, permet néanmoins d'imaginer les obstacles que, sûrement, le compliance officier rencontrerait dans l'exercice de ses fonctions ; à commencer par la fronde des structures de gestion, qui verront d'un mauvais œil, une complexité supplémentaire venant s'ajouter à leur quotidien, pouvant retarder la finalisation de plusieurs projets. Seuls des esprits avertis verront qu'un environnement sécurisé pour l'employé, le client et les organes de gouvernance, constitue un formidable avantage, facteur de performance et source d'opportunités durables (surtout dans l'état actuel des choses, où l'image renvoyée par les banques, est sérieusement écornée).