La révolution est féconde. Si elle apporte les tempêtes, elle fait également jaillir le souffle de la création. Il suffit, pour s'en convaincre, de voir les galeries d'art, un temps en attente, rouvrir et rendre toutes, d'une manière ou d'une autre, hommage à ce printemps tunisien. La dernière Dernière en date, la galerie Ibn-Rachiq accueille, à l'initiative de la revue Id Deco, un collectif d'artistes qui ont souhaité travailler sur l'écume de ces jours de peine certes, mais de fête aussi, de communion, de foi et d'espoir. Ces journées ont laissé des strates, des écueils, des traces, des stigmates, des souvenirs dans la cité. Les artistes s'en sont emparés, les ont interprétés, transcrits et inscrits dans une démarche artistique personnelle qu'ils offrent à la confrontation du public. Le choix du lieu a été judicieux, car il fallait rester au cœur de la cité, et tout près de l'emblématique Avenue Bourguiba. Celui des artistes l'a été tout autant, car il n'y a pas eu d'exclusive. On a accueilli des plasticiens, mais aussi des designers, des artisans d'art… tous ont raconté avec des objets récupérés, des débris réhabilités, des alliages inattendus, leur révolution, celle qui fera que plus rien ne sera pareil, et qui nous montre avec talent que l'art n'est pas seulement fait pour être joli. La prochaine La prochaine sera celle que prépare actuellement Aïcha Gorgi à la galerie Ammar-Farhat, et qui a demandé à un collectif d'artistes, car cette démarche ne peut qu'être collective, de travailler sur la citoyenneté. La citoyenneté, cette notion souvent diffuse, quelquefois confondue avec le patriotisme, l'authenticité, ce sentiment d'appartenance à un pays, à un drapeau, à un passeport, à un hymne national, qui vous fait vous demander non pas ce que votre pays doit vous donner, mais ce que vous, vous pouvez lui offrir. Cette citoyenneté que nous portions, bien sûr, en nous, souvent sans en avoir toujours une conscience exacerbée, voilà que des artistes vont s'en faire les chantres et les illustrateurs, voilà qu'ils vont lui donner une densité artistique, une matière, une forme plastique, une dimension poétique. Voila qu'ils vont mettre en images cette fierté qui nous a tous fait vibrer Ailleurs aussi Ailleurs aussi, la révolution inspire les artistes. Et à Dubaï où se tient Art Fair, l'un des plus courus salons d'art contemporain, celui où se pressent les conseillers artistiques des grandes collections d'art contemporain, et les conservateurs des musées, la révolution arabe était à l'honneur. Les deux œuvres qui attiraient le plus grand public y faisaient référence. L'une présentait, sur un panneau, une mosaïque de drapeaux des pays arabes, et au-dessous, un alignement de balais. Quant à la seconde, elle offrait une installation, accumulation d'objets ramassés sur la place Tahrir.