Par Mohamed Salah Kasmi * La question du choix du meilleur mode de scrutin témoigne de l'absence d'un modèle universel unique recueillant l'unanimité. Paradoxalement, ce choix est primordial pour assurer la légitimité de la représentation. Rappelons qu'une représentation juste devrait être fidèle aux vœux des citoyens sans pour autant perdre de vue l'importance de la gouvernabilité garantissant l'efficacité du gouvernement à élire. Dans ces conditions, l'important est de concilier au mieux l'efficacité de la gouvernance et la fidelité de la représentation à la volonté des élections. Il faut donc mettre en harmonie la justice de la représentation électorale et les préoccupations liées à la stabilité gouvernementale. La recherche de la transparence et celle de l'égalité des élections et des candidats, ainsi que la promotion progressive de la démocratie représentative, doivent guider la réflexion des membres de l'Instance nationale pour la protection des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique. Nous devons intégrer les principes fondamentaux du droit commun universellement admis et pratiqués chez les vieilles démocraties dans leurs consultations électorales empreintes de liberté, de sincérité et de transparence. Nous devons, aussi, éviter un mode de scrutin qui contribue, par la dispersion des voix sur un grand nombre de candidats, à défigurer la représentation démocratique et réduit la légitimité de l'institution représentative. La Tunisie aspire à l'émergence d'une Assemblée nationale constituante forte qui assurera sa responsabilité historique en garantissant la stabilité politique du pays et en donnant naissance à une véritable Constitution démocratique. Dans cet ordre d'idées, il faut opérer un panachage des deux systèmes majoritaire et proportionnel. Ainsi, on peut élire le cinquième du Parlement à la proportionnelle sur des listes nationales, en complément des candidats par circonscription. À l'ère de la mondialisation, notre pays a tout intérêt à avoir une majorité ayant les idées claires sur les choix politiques, économiques, sociaux et culturels d'une nation qui incarne depuis le 14 janvier, dans l'histoire du 21e siècle, la révolution ayant bouleversé tous les schémas traditionnels des mouvements révolutionnaires. Ainsi, la Tunisie renouera avec son héritage démocratique punique et arabe. La Constitution de Carthage avec ses deux suffètes composés de juges élus chaque année, son Sénat (le Conseil des anciens) et son Assemblée du peuple, a été louée par de nombreux auteurs antiques, qui célébraient sa «réputation d'excellence». Aristote la considérait comme un modèle de Constitution «mixte» et «équilibré». Le 26 avril 1861, la Tunisie fut le premier Etat arabe à avoir adopté une Constitution après la proclamation du Pacte fondamental en 1857. Cette Constitution consacre un partage des pouvoirs entre le Bey et ses ministres et accorde de larges prérogatives au Grand Conseil formé de 60 conseillers d'Etat. La nouveauté à l'époque est que ce conseil avait le pouvoir de déposer le Bey en cas d'actes anticonstitutionnels. Formons l'espoir que l'année 2011 accouchera d'une nouvelle loi électorale qui sera un modèle réussi, qui permettra à la Tunisie de redevenir une véritable nation démocratique. Tout mode de scrutin exerce une influence sur les résultats de l'élection. Mais au-delà de ce débat, il faut souligner que le mode de scrutin demeure en étroite liaison avec le milieu de sa mise en œuvre et qu'il est en partie déterminé par lui. L'essentiel est de faire progresser la démocratisation. Pour conclure, j'insisterai sur l'éducation civique et électorale de la population tunisienne à travers les médias, en la sensibilisant et en l'informant sur le processus électoral. L'objectif est de motiver et de préparer l'ensemble des électeurs pour aller voter le 24 juillet 2011 de façon éclairée.