Bras de fer avec la CAF qui n'en est pas à sa première aberration. Le feuilleton du match Kaduna United-Etoile Sportive du Sahel, comptant pour le second tour de la coupe de la CAF riche en épisodes rocambolesques, a tenu en haleine l'opinion publique sportive tunisienne.Jusqu'au dernier moment, dirigeants, staff technique et joueurs étoilés ne savaient pas sur quel pied danser et à quel saint se vouer.Des décisions et des contre-décisions qui ont mis tout le monde sur le qui-vive et fait planer le flou durant toute la semaine écoulée. Mais procédons par ordre et voyons pourquoi et comment nous en sommes arrivés là. Chronologie des faits 13 avril 2011 : La CAF désigne l'arbitre sud-africain Daniel Bennet pour diriger le match aller des huitièmes de finale de la coupe de la CAF qui doit opposer le samedi 23 avril à 16h00 au Kaduna Township Stadium, le Kaduna United FC ( du Nigeria ) à l'Etoile Sportive du Sahel. 20 avril 2011 à 17h00 : La CAF informe par fax les dirigeants étoilés de la délocalisation de ce match dans la ville d'Abeokuta ( à 140km de Lagos ) en remplacement de la ville de Kaduna en raison des troubles politiques qui ébranlent le nord du Nigeria. 20 avril 2011 à 18h00 : Le secrétaire général de l'Etoile, M. Tijani Grira, fait savoir par un communiqué que le bureau directeur de l'Etoile a annulé le vol spécial en direction du Nigeria prévu pour le jeudi 21 avril à midi à partir de l'aéroport d'Enfidha-Ville. 21 avril 2011 à 16h00 : Malgré la correspondance envoyée par l'Etoile à la CAF par le biais de la FTF qui fait état de sa décision de ne pas se rendre au Nigéria en raison de l'état d'insécurité qui prévaut dans ce pays, l'instance fédérale africaine maintient la désignation du match Kaduna-Etoile pour la même date et pour le même horaire. 21 avril à 20h00 : Face à la persistance de la CAF et en dépit des craintes exprimées, le BD de l'Etoile fixe un autre rendez-vous pour la délégation de l'Etoile pour prendre le cap vers le Nigeria. Le départ est fixé pour le vendredi 22 avril à 8h00 à partir de l'aéroport d'Enfidha-Ville. 21 avril tard dans la nuit: Le comité directeur de l'Etoile, réuni en urgence, prend officiellement la décision de ne pas se rendre au Nigeria sur recommandation et sommation du ministère des Affaires étrangères et intervention énergique du ministère de tutelle. Voici le rapport circonstancié de l'ambassade tunisienne à Abuja ( fax envoyé le jeudi 21 avril au ministère de la Jeunesse et des Sports et au ministère des Affaires étrangères ): Nous tenons à mettre en garde la délégation de l'Etoile Sportive du Sahel contre le déplacement au Nigeria dans la période actuelle.La situation sécuritaire s'est rapidement dégradée dans la totalité des Etats de ce pays.Pour le moment, on recense plus de 200 morts, 450 blessés et environ 4.500 déplacés.Des représailles sont très possibles surtout dans l'Etat de Lagos et les Etats avoisinants dont la ville d'Abeokuta, lieu de la rencontre Kaduna-Etoile.La traversée du trajet Lagos-Abeokuta même en voitures fortement escortées risque de mettre en danger la vie des membres de la délégation du club tunisien.Le fait que l'équipe de Kaduna, qui fait partie d'une région musulmane où il y a eu plus de 50 morts, des centaines de blessés, des maisons de hauts responsables politiques chrétiens incendiées et des églises saccagées, aille jouer dans une région à forte communauté chrétienne, risque de déclencher des incidents meurtriers surtout que que la date de ce match coïncide avec la tenue des élections des gouverneurs. Actuellement, la plupart des ambassades des pays occidentaux, l'américaine en particulier , ont strictement interdit à leurs ressortissants de se déplacer dans les Etats du Nigeria.Pire encore et même en temps normal, le déplacement en voiture est déconseillé au nord du pays comme au sud en raison des fréquentes attaques de bandes armées jusqu'aux dents en plein jour. Pour toutes ces raisons, nous réitérons notre appel pour que l'Etoile renonce à ce déplacement périlleux au Nigeria. Hier, à une heure tardive de la nuit et après avoir reçu une copie de cette mise en garde, le BD de l'Etoile s'est réuni sous la présidence du Dr Hamed Kammoun. Après de multiples tractations et concertations avec le ministère de tutelle et le ministère des Affaires étrangères et la FTF, il a pris la décision d'annuler purement et simplement le déplacement de la délégation étoilée au Nigeria en dépit du refus catégorique des responsables de la CAF de reporter le match Kaduna United-ESS à une date ultérieure. Une décision qui pourrait conduire les instances fédérales de la CAF à sanctionner lourdement l'Etoile Sportive du Sahel et la suspendre de deux ans de participation aux compétitions continentales.Le BD étoilé est conscient des retombées du désistement entrepris.Mais il compte sur la disposition des responsables de la CAF à comprendre les mobiles qui ont conduit le représentant du football tunisien à recourir à une telle décision. Le Dr Hamed Kammoun: " La sécurité prime sur toutes sortes de considérations " A l'issue de cette réunion, le président de l'Etoile a déclaré que la voix de la sagesse et de la précaution a fini par prévaloir sur toutes les autres conséquences sportives et matérielles. " Nous étions tous unanimes pour assumer pleinement la responsabilité de cette décision.Il est hors de question d'exposer la vie des gens à tout danger.La situation actuelle au Nigeria n'incite guère à prendre ce risque.La question de prendre à la légère toutes les recommandations faites et de s'aventurer dans un périple aux issues incertaines.Par la suite, les regrets ne serviront à rien. Je ne crois pas que la CAF puisse voir la situation différemment. Elle finira par nous donner raison et accéder à notre légitime requête ", a-t-il insisté. En attendant que la CAF dise son dernier mot sur cet imbroglio, il est vivement souhaité que ce feuilleton ait un dénouement qui satisfasse toutes les parties concernées.Le bon sens exige que la CAF tienne compte objectivement des circonstances extrasportives qui prévalent au Nigeria et délocalise ce match Kaduna -Etoile dans un pays voisin que ce soit le Ghana ou le Niger ou une autre destination. ------------------------------------------------------------------------ Qui arrêtera la CAF?! Nouvelle incohérence de la Confédération africaine de football en charge de gérer le sport-roi dans le continent: l'obligation faite à l'Etoile Sportive du Sahel de disputer un huitième de finale de la coupe de la CAF sur un «champ miné», dans un pays agité par de graves violences. Kaduna était pourtant à feu et à sang depuis dimanche dernier, la représentation diplomatique tunisienne à Lagos en atteste suffisamment, invitant le représentant tunisien à la plus grande prudence, dans un premier temps, puis l'exhortant à éviter un tel safari pour, inconnue. La délocalisation, de Kaduna à Abeokuta, du match aller ne change en rien la substance quand bien même l'instance de M. Issa Hayatou se voulait rassurante sur la sécurité assurée dans la ville de rechange, Abeokuta, à 140 km de la capitale. On jette, en effet, en pâture une équipe visiteuse aux risques inévitables générés par de sanguinolentes émeutes. Un scénario de déjà-vu, rappelons-nous. Un mois plutôt, un envahissement de terrain au stade international du Caire aurait pu tourner au drame. Les joueurs du Club Africain s'en sortent avec des blessures, fort heureusement sans gravité. Il y a deux jours, la CAF annonçait ses sanctions après le cauchemar du Stadium du Caire: Ezzamalek écopait de quatre matches à huis clos, dont deux avec sursis ! On croit rêver tellement est révoltante et déconcertante la légèreté avec laquelle la vénérable organisation continentale rend ses jugements. Inutile de remonter jusqu'au drame de l'enclave de Cabinda où a été mitraillé le bus de l'équipe du Togo qui se préparait à disputer la Coupe d'Afrique des nations Angola 2008. Les rebelles feront deux morts dans la délégation des Eperviers qui se retirent de la compétition. Et tout le monde l'a fort bien compris et admis. Sauf l'instance sise au Caire sourde à toute logique et au bon sens : elle trouve ainsi le moyen d'infliger quatre ans de suspension au Togo d'Adebayor. Là aussi, on croit rêver ! Bref, la sécurité des joueurs, priorité absolue en tout lieu et toute place sur laquelle insistent les règlements, la CAF ne connaît pas. En attendant un nouveau drame qui viendrait endeuiller le foot continental… T.G.
