A l'occasion de la célébration du cinquantième anniversaire de l'organisation Amnesty International, la section tunisienne de ladite organisation a concocté une série de manifestations visant, d'abord, à rendre hommage aux ex-détenus politiques, vivants soient-ils ou disparus sous l'effet de la torture, mais aussi à créer une ambiance de fête pour un cinquantenaire de militantisme pour la cause des droits de l'Homme. Hier, et pour la première fois, la place des Droits de l'Homme située à l'avenue Mohamed-V a été digne de son appellation. Sous le regard des badauds et des couples assis cà et là, l'équipe de la section de Tunisie de l'Organisation a pris place pour une rencontre festive, à laquelle ont pris part des militants, des ex-détenus politiques ainsi qu'un certain nombre de citoyens curieux, attirés sans doute par les ballons noirs et jaunes décorant le lieu. «Le choix de ce lieu n'est pas fortuit. Il acquiert une symbolique particulière. Aujourd'hui, Amnesty International célèbre ses cinquante ans; une fête qui n'aurait pu avoir lieu dans un climat autre que celui de la liberté d'après la révolution», indique M. Chokri Ben Jannet, vice-président de l'annexe de Tunisie de l'organisation. Au programme,: lancement de ballons de couleurs jaune et noir— couleurs symboles de l'organisation— sur lesquels sont inscrits les noms des ex-détenus politiques tunisiens et étrangers. «L'organisation œuvre dans plus de 120 pays. C'est pourquoi, et en raison de son aspect international et de l'universalité de sa cause, nous ne nous focalisons pas uniquement sur les ex-détenus tunisiens», précise M. Ben Jannet. L'animation a inclus, en outre, un atelier de peinture exprimant les souffrances qu'ont endurées les ex-détenus derrière les barreaux. Telle cette toile où le rouge, couleur sang, de la colère et de la révolution domine et l'arrière-plan et le modèle en détresse. Les personnes présentes se sont mises à se regrouper, séduites par les notes de guitare que compose Majdi Chabbar, membre du groupe de musique «Alberto's». «Notre groupe est né depuis quatre mois. Nos penchants touchent un peu à tous les genres occidentaux, notamment le reggae, le rock..Notre participation à cette manifestation a pour finalité de contribuer à un événement qui concerne tout le monde, car il touche l'être humain d'une manière générale mais aussi de présenter le groupe au public», souligne Majdi. Certes, l'assistance n'a pas été pour autant nombreuse, en cette matinée fort ensoleillée. Cela s'explique, en partie, par le programme de la veille et qui a permis à ladite organisation de rendre hommage à 12 ex-détenus politiques. Parmi ces derniers, M. Lotfi Azouz, représentant de la section tunisienne de l'organisation, cite MM. Faouzi Gara Ali et Lasaâd Jouhari, du mouvement islamiste; M. Abdellatif Bou Hajila, militant; M. Hamma Hammami, gauchiste; Mme Radhia Nasraoui, avocate, et M. Slim Boukhdhir, journaliste. Toutefois, cette manifestation, qui prend fin le jour même au centre culturel et sportif des jeunes d'El Menzeh 6, fait partie de tout un programme à l'échelle internationale. «Pour ce qui est de la section de Tunisie, nous avons démarré cette campagne depuis près d'un mois dans le but d'informer le grand public sur les missions de l'organisation Amnesty International, chose qui ne nous était pas permise auparavant», souligne M. Ben Jannet. L'assistance n'a cependant pas été unanime quant à l'efficacité des actions menées tant par ladite organisation que par celles qui œuvrent dans ce sens. L'une des citoyennes présente a crié au nom de ceux auxquels Amnesty International n'a toujours pas accordé l'attention qu'il faut et qui, selon ses dires, endurent encore les sévices de la torture dans les prisons. «Je parle surtout des manifestants de la Kasbah 2 que personne n'évoque et, entre autres, de Oussama qui y a subi des abus sexuels pour avoir exercé le droit de manifester. En fin de compte, rien n'a changé. Les médias sont désorientés et on a même déçu les martyrs de la révolution», indique-t-elle sur un ton mêlé de colère et d'amertume.