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Quand le principe du consensus n'est plus respecté... Le mouvement Ennahdha se retire de la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution
C'est la deuxième fois que le mouvement Ennahdha se retire de la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution. Le premier retrait ayant eu lieu quand la Haute instance avait décidé de reporter les élections de l'Assemblée constituante au 16 octobre au lieu du 24 juillet. Pourtant, la date initialement annoncée était le fruit d'un consensus, selon M. Rached Ghannouchi, président du mouvement, qui a tenu hier au siège du parti en compagnie de certains membres du bureau une conférence de presse. «Cette date était un point lumineux dans le processus de la transition démocratique, estime l'orateur. Puis sans attendre le consensus, la Haute instance a décidé de reporter cette date». Selon le mouvement Ennahdha, cette instance n'a de légitimité que celle du consensus. «Nous avons décidé de réintégrer quand il y a eu consensus entre le gouvernement, les partis et l'Instance sur la nouvelle date des élections qui est le 23 octobre, explique M. Ghannouchi. Notre mouvement est contre le fait que la Haute instance prenne la place d'une assemblée parlementaire élue pour examiner des lois concernant les partis, la presse, les associations...». Des sujets qui relèvent du pouvoir législatif «Si la Haute instance examine de telles lois que va-t-elle laisser au Parlement ?», s'interroge l'orateur. Selon lui, la Haute instance devrait se pencher plutôt sur des questions qui ont trait à la transition démocratique et aux élections en établissant, entre autres, la liste des candidats qui ne sont pas éligibles et en examinant les éléments liés à l'opération électorale. La procédure de l'élection des Tunisiens résidant à l'étranger devrait également être examinée en assurant le suivi des travaux de l'Instance supérieure indépendante des élections. Le mouvement craint que la date du 23 octobre ne soit pas définitive. L'ordre du travail est considéré aussi comme imposé et ne fait pas suite à un consensus. M. Ghannouchi s'étonne, par ailleurs, des déclarations du président de la Haute instance selon lesquelles le retrait d'Ennahdha ne perturbe en rien la marche du travail de cette structure. «Pas question de parler au nom du peuple, insiste le président d'Ennahdha. Qui êtes-vous pour prendre des décisions à sa place?» Les membres du mouvement ont cru nécessaire de se retirer de la Haute instance pour ne pas jouer le rôle de faux témoins. Ils sont disposés, cependant, de réintégrer cette structure si elle se ressaisit et emprunte le droit chemin, celui du consensus, seule légitimité dont elle peut se prévaloir. «Les objectifs de la révolution ne sont pas en train de se réaliser de cette façon», prévient M. Ghannouchi estimant qu'il n'a pas de problèmes personnels avec des personnes mais avec le rendement de certains membres. A noter que le mouvement n'était pas d'accord avec la nomination de certains membres à la Haute instance, vu leur passé, mais avait quand même décidé d'y prende part pour l'intérêt national. Mais de là à examiner des sujets qui relèvent du pouvoir législatif, le mouvement n'est pas prêt à jouer le jeu. Le mouvement pense que tous les sujets peuvent être discutés excepté celui qui intéresse l'identité arabo-musulmane de la Tunisie. Répondant aux questions des journalistes, M. Rached Ghannouchi a notamment indiqué que l'intégration du mouvement à la Haute instance s'était faite dans l'espoir de traiter des questions liées à la transition démocratique sur la base du consensus. La Haute instance ne doit en aucun cas décider à la place du peuple ou imposer ses points de vue. Pour la liberté d'expression «Cette manière de procéder nous rappelle celle de l'ancien régime», estime l'orateur. La déviation de la Haute instance de ses missions justifie, en définitive, le retrait du mouvement Ennahdha qui prend au sérieux certaines informations faisant état de la volonté de certaines personnes d'organiser un référendum, de reporter encore les élections, d'élire un président de la République. Le mouvement compte combattre cette «dérive» par des moyens politiques et pacifiques, bien entendu. L'objectif de la révolution étant de recourir au scrutin pour élire les futurs responsables du pays dans le cadre de la transparence totale. Le mouvement est toujours pour la concertation avec les autres partis en vue d'obtenir le consensus souhaité. Pour ce qui est du financement du mouvement, l'orateur estime que les comptes sont en règle et les autorités compétentes peuvent vérifier l'origine du financement. Le mouvement qui était «la première victime» du Rassemblement constitutionnel démocratique dissout et n'est pas prêt, aujourd'hui, à sympathiser avec ses membre. Le président d'Ennahdha est pour la liberté d'expression par les manifestations pacifiques et les sit-in mais dément avoir appelé à dissoudre la haute instance. «Les manifestations ne doivent pas être faites par des partis, mais par le peuple qui a fait sa révolution», précise l'orateur indiquant que le mouvement «n'a pas changé». Il a indiqué aussi qu'il existe une compétition entre les partis et cela est acceptable. Ce qui ne l'est pas c'est certains comportements à l'égard des membres d'Ennahdha dont certains membres n'ont pas encore retrouvé leur emploi alors que d'autres sont toujours incarcérés. Evoquant de l'incident qui a eu lieu au cinéma AfricatArt où des salafistes ont empêchés la diffusion du film de Nadia El Fani «Ni Allah, ni maîtres», M. Ghannouchi a condamné tout acte de violence quelle que soit sa source. Mais il a déploré aussi les provocations de certains artistes sous le couvert de la liberté d'expression. Pour lui, il faut respecter les croyances des autres et leur religion tout en améliorant le niveau du débat sans blasphèmes ni exécration.