•Appel à l'application des mesures sociales décidées d'urgence après le 14 janvier Les mouvements sociaux et les débordements qui se sont amplifiés, ces jours-ci, dans plusieurs régions du pays, remettent à l'ordre du jour le dossier du développement régional et les engagements du gouvernement de transition en vue de réhabiliter les régions de l'intérieur en leur accordant la priorité. Six mois après la révolution du 14 janvier, plusieurs partis, militants syndicalistes et représentants de la société civile se posent la question sur les solutions proposées jusqu'à présent par le gouvernement de transition pour réduire le chômage, assurer la répartition équitable des richesses et lutter contre l'insécurité. En effet, la reprise, récemment, des incidents et des mouvements de protestation à Gafsa, Sbeïtla, Jendouba, Sidi Bouzid et Kasserine rappelle le scénario du déclenchement de la révolution pour la liberté, la dignité et la justice sociale. Sur ce point, Iyed Dahmani, porte-parole du Parti démocrate progressiste (PDP), fait remarquer qu'il est difficile actuellement d'évaluer ou de porter un jugement sur le rendement du gouvernement de transition dans le domaine du développement régional car, ajoute-t-il, «aucune mesure décidée par le gouvernement de transition ne peut avoir de résultats immédiats et personne ne possède une baguette magique pour résoudre la question du chômage en un court laps de temps». Il appelle le gouvernement à mettre en application les mesures sociales décidées d'urgence après le 14 janvier, à revoir le plan de développement à l'échelle nationale et régionale et à élaborer une nouvelle politique économique susceptible d'impulser la dynamique économique dans les régions et de créer des emplois. 251 MD alloués au développement régional S'agissant de la question de l'insécurité, le porte-parole du PDP relève une amélioration, depuis l'arrivée de M. Béji Caïd Essebsi, à la tête du gouvernement de transition, mais ce gouvernement a encore du pain sur la planche, surtout au niveau du système de la sûreté qui nécessite une réforme profonde. Hamza Lakhoua, porte-parole du ministère du Développement régional, affirme, pour sa part, que son département collabore avec la société civile et les structures d'appui dans la région en vue de mettre en place une stratégie cohérente de développement régional, soulignant que l'absence d'indicateurs précis sur le chômage et la pauvreté dans les régions empêche d'élaborer une conception d'avenir dans ce domaine. Evoquant le plan du ministère, il signale qu'une enveloppe de 251 millions 300 mille dinars a été allouée au développement régional et à la réduction des disparités entre les régions (80 % au profit des régions de l'intérieur et 20 % aux régions côtières). De son côté, Sami Tahri, secrétaire général du Syndicat des enseignants du supérieur, indique que les derniers événements dans les régions de l'intérieur sont dus à trois facteurs : l'incapacité du gouvernement à présenter des solutions convaincantes et l'émergence de l'esprit tribal suscité par certains éléments de l'ancien régime, outre le sentiment d'insatisfaction chez certains citoyens dans les régions où sont tombés les premiers martyrs de la révolution. Il insiste sur la nécessité de trouver une solution aux débordements afin de rassurer la population et d'agir d'urgence dans les régions à forts taux de chômage et de pauvreté en créant des projets générateurs d'emplois. Il souligne que le gouvernement de transition gère les affaires du pays sans le moindre contrôle sur son rendement et cherche à imposer ses décisions, proposant dans ce cadre de créer un conseil des partis ou d'élargir les prérogatives de la Haute Instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique. Pour sa part, Abdeljalil Bedoui, expert en économie, considère que certaines parties anti-révolution sont derrière ces débordements et tentent de détourner les objectifs de la révolution, soulignant que le gouvernement ne peut résoudre en une courte période la question de l'emploi, surtout que le nombre de chômeurs atteint 700 mille. L'impératif de lutter contre la violence et l'anarchie Il relève que le programme d'urgence du gouvernement pour la création de 60 mille emplois dans le secteur public n'est pas encore clair. Il recommande, par ailleurs, de prendre des mesures contre la hausse des prix et le phénomène de monopoles sur le marché. Il appelle le gouvernement à lutter contre la violence et l'anarchie, à juger les personnes corrompues et à accélérer le règlement des dossiers des martyrs afin de rétablir la confiance auprès des Tunisiens. Kamel Ayadi, président du Centre de réflexion stratégique pour le développement du nord-ouest, critique la manière dont le gouvernement de transition traite la question du développement régional en écartant les composantes de la société civile et les experts de l'élaboration des programmes dans ce domaine, ajoutant que le gouvernement n'a pas de politique de communication ni de vision stratégique en la matière. Il ajoute que le gouvernement aborde cette question au jour le jour et se montre plus préoccupé des revendications des partis politiques et des conflits qui les opposent. De son côté, Chokri Chortani, secrétaire général de l'association Initiative économique et sociale à Gafsa, indique que le traitement de la question du chômage dans la région requiert la création de conditions favorables à l'investissement à travers le développement de l'infrastructure routière, l'aménagement de zones industrielles et le renforcement de la présence dans la région du Centre de promotion des exportations (Cepex) et de l'Agence de développement de l'investissement extérieur (Fipa). Il fait remarquer que les solutions avancées par le gouvernement en accord avec la Compagnie des phosphates de Gafsa ne peuvent résorber le chômage dans la région, soulignant la nécessité de créer des entreprises dans les diverses délégations qui recèlent d'importantes ressources naturelles.