La croissance a ralenti au deuxième trimestre en Espagne et l'économie italienne devrait connaître le même sort dans les mois à venir, estiment les économistes après la publication des chiffres préliminaires du produit intérieur brut (PIB) vendredi dans les deux pays. La torpeur de l'activité en Italie et en Espagne, troisième et quatrième économies de la zone euro, ne cesse d'alimenter l'inquiétude des marchés, qui redoutent que ce manque d'allant ne complique encore leur équation budgétaire et ne débouche sur une contagion de la crise de la dette. Selon l'estimation rendue publique par la Banque d'Espagne, l'économie espagnole a affiché une croissance de 0,2% au deuxième trimestre par rapport au premier, contre +0,3% sur la période janvier-mars. Les économistes interrogés attendaient en moyenne +0,1%. De son côté, l'agence italienne de la statistique Istat a fait état d'une expansion de 0,3%, conformément aux attentes, après une progression de 0,1% sur chacun des deux précédents trimestres. Mais ce léger sursaut italien s'annonce de courte durée: après le repli de la production industrielle en mai et en juin et des indicateurs moroses du côté des directeurs d'achat et du climat des affaires, les économistes s'attendent à ce que la croissance ralentisse à nouveau au second semestre. "La plupart de la croissance du deuxième trimestre a été obtenue au début de la période, et les indicateurs au fil des trois mois ont bel et bien montré un ralentissement marqué", relève Raj Badiani, d'IHS Global Insight. Même constat pour Paolo Mameli, d'Intesa Sanpaolo: "La faiblesse de la production industrielle sur les deux derniers mois soulève des inquiétudes pour la croissance du PIB au troisième trimestre, qui, à l'heure actuelle, pourrait retomber à +0,1%. Même la croissance du PIB sur l'ensemble de l'année, attendue autour de 1%, pourrait en fait être en-deçà." La Banque d'Espagne pour une politique «énergique» Nombre d'économistes jugent désormais difficilement atteignable la prévision de croissance de 1,1% fixée par le gouvernement de Silvio Berlusconi, même si Istat a précisé que "l'acquis de croissance" à la fin du deuxième trimestre atteignait 0,7%. D'une année à l'autre, le PIB de l'Italie a grimpé de 0,8% au deuxième trimestre, un chiffre lui aussi conforme au consensus des analystes, après +1,0% au premier trimestre. Pour l'Espagne, ce chiffre ressort à +0,7%, comme attendu, après +0,8% sur les trois premiers mois de l'année. Les données définitives doivent être publiées par Madrid le 16 août. Dans son bulletin mensuel, la Banque d'Espagne souligne que la bonne tenue du tourisme au deuxième trimestre a permis de compenser en partie la dégradation de la consommation des ménages et de l'activité manufacturière. Elle estime toutefois que les tensions grandissantes sur le marché de la dette souveraine sont la principale source de risque pour la croissance. "L'information disponible sur le deuxième trimestre suggère un affaiblissement de l'activité, dans un environnement marqué par la détérioration de la crise de la dette souveraine en zone euro", souligne l'institut d'émission. Symbole de ces tensions, le marché obligataire a connu hier, en début de séance, une nouvelle poussée de fièvre, le rendement des obligations italiennes à 10 ans dépassant même celui du papier espagnol de même échéance, une première depuis mai 2010. Les titres à 10 ans de Rome affichaient en séance un rendement de 6,18%, tandis que le rendement espagnol était de 6,11%, des taux considérés comme difficilement soutenables à long terme. La Banque centrale espagnole a prévenu qu'une conclusion ambitieuse et rapide des travaux sur les réformes structurelles aiderait à réduire l'incertitude et à rétablir une croissance solide. Pour surmonter la crise de la dette, les responsables européens doivent sans hésitation mettre en oeuvre l'accord décidé lors du sommet du 21 juillet, a-t-elle poursuivi. "Toutefois, dans le but de contenir la contagion, il doit aussi y avoir une réponse énergique en matière de politique économique nationale." La Banque d'Espagne discerne tout de même une lueur d'espoir: tablant sur une poursuite de la reprise économique mondiale, elle évoque le "rétablissement" prévisible de la production industrielle espagnole au cours des prochains trimestres.