Aussi, le retour des Kouttebs, ces écoles du Coran longtemps délaissés par les enfants, qui comme par magie reprennent de leur superbe pendant ce mois saint, apporte la preuve, si besoin est, de l'attachement constant de la Tunisie libre à consacrer la continuité entre le passé et le présent et à œuvrer à assurer durablement la pérennité, la solidité, la vitalité et le renouveau constant de l'identité religieuse et culturelle, conformément aux dispositions de l'article premier de la Constitution qui stipule que “la Tunisie est un Etat libre, indépendant et souverain; sa religion est l'Islam, sa langue l'Arabe et son régime la République”. Mais Ramadan pour les Tunisiens n'est pas qu'ablutions, prières et cérémonies religieuses. En effet, commerçants ou consommateurs, l'effet «Ramadan» fait tourner plus les commerces et générer plus de cash-flow. Déjà, quelques jours avant l'observation du Croissant annonçant l'avènement du mois saint, c'est un vrai top-départ qui se traduit souvent par une véritable frénésie où les consommateurs sollicitent davantage leur portefeuille pour, au final, stocker des produits qu'ils ne consommeront pas forcément avant l'Aïd. Il n'empêche, d'aucuns y voient une occasion pour faire de bonnes affaires; SMS, courriels et même coups de téléphone privés, sans parler du phénomène bouche- à-oreille, tout est bon pour attiser les lèche-vitrines à la recherche de bonnes affaires. Plus les jours de Ramadan passent et plus la fièvre acheteuse monte, faisant oublier momentanément aux Tunisiens leurs problèmes de pouvoir d'achat écorné par les dépenses imposées par les vacances et autres évènements joyeux. Cependant, qui dit nouveau Ramadan dit aussi "nouvelles séries dramatiques". Entre drame social, action, suspense insoutenable et humour décalé, le mois saint nous invite à découvrir des séries dont on ne peut se passer, trente jours durant. Ainsi, feuilletons, sitcoms et variétés sont au rendez-vous. Pour mieux choyer le téléspectateur, les chaînes de télévision locales misent sur une programmation à même de forcer le Tunisien à arrêter son nomadisme cathodique et de se focaliser sur les productions tunisiennes. Mais passés ces moments où l'on reste scotché aux postes de télé, finie la prière d'Ettaraouih, pendant les soirées de Ramadan, il est pratiquement impossible de se retenir et lutter contre les pulsions de la fête et de la joie. Place alors à une symphonie où se mêlent les mélodies musicales des festivals ramadanesques aux sons de cuillères et de fourchettes, attablés parmi les convives. Car, comme par enchantement, nos villes qui sommeillent dans leur bulle royale tout au long du reste de l'année, se transforment en destinations festives capables de rivaliser avec les plus grandes villes réputées pour leur attrait ludique. En effet, pendant ce mois saint, la nuit entraîne une autre dimension à la vie urbaine qui favorise la sociabilité, les rapprochements et la créativité. En effet, les amateurs des sorties vespérales et culturelles n'ont que l'embarras du choix pendant ce mois saint, entre une multitude de festivals et de carnavals. Qu'importe la canicule du jour, une brise de fraîcheur nocturne ponctuée de notes, de tempos et de rythmes fait vibrer les Tunisiens au gré des milliers de décibels qui font monter la sauce jusqu'à une heure tardive de la soirée. Parmi les nouveautés de cette année, on découvre les «cafés chantants» nouvelle version. Cependant, si ces établissements se convertissent en lieux de «music-hall» pendant le Ramadan, faisant ainsi le bonheur des noctambules, ils mettent les nerfs de leurs riverains à vif.