Mohamed Essayem, commissaire régional au tourisme à Djerba, avait l'air d'un homme heureux. Il rencontrait le samedi 10 septembre les représentants d'une profession qu'il apprécie particulièrement, les journalistes étrangers : depuis le 14 janvier 2011, aucun communicateur n'avait foulé le sol de l'île. Les quatre journalistes suisses accompagnés d'Odile Koehn, grande connaisseuse de la Tunisie et organisatrice en chef de l'Echappée belle djerbienne, et d'Alain Mullauer, directeur de Destinations Santé, une agence suisse spécialisée dans le créneau Spa et thalassothérapie, étaient donc les premiers à revenir à Djerba pour une visite de cinq jours. Ils venaient à la redécouverte de la Tunisie «après la Révolution de Jasmin». Solidarité suisse «Nouveau départ pour le tourisme de bien-être», tel est le thème prometteur et un brin solidaire de ce voyage. La conférence de presse tenue à l'hôtel Djerba Plaza, qui a réuni le commissaire régional au tourisme, trois hôteliers, Hamadi Chérif, directeur du centre culturel de Sidi Jmour, et les journalistes, a été l'occasion d'un débat passionnant sur la Révolution tunisienne, ses répercussions sur la vie politique, sociale, sur les médias et le tourisme en Tunisie. Ressuscitant le souvenir des lendemains des évènements de janvier, Alain Mullauer a rappelé que le 26 de ce mois-là il s'était retrouvé, avec un autre touriste uniquement, dans un hôtel de Gammarth de 250 personnes, qui d'habitude ne désemplissait jamais ! «Rien de plus triste», a-t-il rajouté. Déplorant la frilosité des visiteurs européens, le voyagiste a évoqué le cas de cette touriste suisse qui s'est plainte à son retour chez elle vers le mois de mars du trop-plein de Chinois arrivés de Libye et se posant en transit à Djerba, qui ont «envahi son hôtel ». «La Tunisie, qui a donné l'exemple d'une mobilisation et d'une solidarité quasi unanimes envers les milliers de réfugiés de toutes les races qui ont traversé Djerba depuis ses frontières sud, ne mérite pas d'être boycottée», a insisté Mohamed Essayem. Moins de 50 % de la clientèle traditionnelle étrangère (près d'un million et demi de touristes ont séjourné dans l'île en 2010) se sont déplacés à Djerba cette année. L'ile, pourtant dotée de 137 hôtels et de 50 000 lits, est la première destination thalassothérapie du pays. Corinne Pont, directrice générale d'exploitation au Park Inn Ulysse Palace, ne considère pas la saison comme totalement perdue : «Cette période de répit, nous l'avons exploitée pour nous bonifier, former notre personnel, mettre en place des soins de bien-être à base de produits locaux». Une démarche suivie par tous les hôteliers présents au débat. «Nous sommes en train de réviser nos normes qualitatives pour répondre aux attentes de nos partenaires européens et autres, tout en élaborant un travail de personnalisation de la destination Djerba», a ajouté le représentant de l'Office du tourisme. L'arrière-saison sera meilleure Pour Alain Mullauer, le spécialiste du créneau Spa et thalassothérapie, le meilleur choix à faire aujourd'hui en Tunisie consiste à améliorer les services des établissements hôteliers plutôt que d'en construire d'autres. Il explique l'important taux de retour des Suisses en Tunisie par la chaleur de l'accueil et la qualité du toucher des masseurs locaux. Rassurant, il affirme : «Maintenant que la crise libyenne est résolue, les Suisses ne demandent qu'a revenir». Les journalistes, eux, partiront pour un tour de l'île, qui les mènera de la synagogue de la Ghriba à une découverte des maisons d'hôte et des hôtels de charme, au Fort El Kébir, au Musée du patrimoine traditionnel de Houmet Souk et au Centre culturel Dar Chérif. Pour Mohamed Essayem, une chose est sûre : l'arrière-saison sera très bonne, promet-il…