Un boxeur, un destin, une passion. L'histoire de la boxe tunisienne se poursuit à La Presse «J'ai mis un terme à ma carrière en octobre 1979, car il me fallait choisir entre boxer en amateur ou travailler. Alors, j'ai opté pour la deuxième solution afin de construire mon nid et assurer à ma famille un avenir meilleur». Abdelwahab Bettaïeb est né en 1953 à Tunis. A l'âge de quinze ans, le jeune commis-bijoutier était entré pour la première fois dans une salle de boxe, au Club Africain. Feu Hédi Siki a été son mentor. Il remarqua rapidement que son nouvel élève avait des aptitudes pour la pratique du noble art. Onze années chez les amateurs façonnent à partir de 1968 l'expérience du jeune pugiliste, vainqueur en finale du championnat de Tunisie 1979. Après 35 combats (20 victoires, 10 nuls et 5 défaites) il raccroche mettant un terme à une belle carrière. L'œil aiguisé de l'entraîneur, feu «Am El Hédi Siki», a vite décelé le talent de son nouvel élève. Abdelwahab Bettaïeb, qui était un boxeur doué, a su gravir les échelons en décrochant le titre de champion de Tunisie 1er round, champion de Tunisie Novice avant d'être sacré chez les «Seniors» de nombreuses années comme champion de Tunisie des super/légers et devenir membre de l'équipe nationale de 1969 à 1979, année où il quitta définitivement la boxe pour se consacrer à son métier de bijoutier. Parmi les boxeurs qui ont croisé le chemin de Abdelwahab, on peut citer Béchir Boundka, qui l'a rencontré à 3 reprises à Tunis, à Sousse et à Djerba. Bettaïeb est sorti vainqueur de deux rencontres, la troisième confrontation se soldant par un match nul. Notre champion garde en mémoire comment il a battu un adversaire turc, nommé Omar, lors d'une rencontre internationale à Ankara, en 1973 : «Oui, j'ai bel et bien mis ce boxeur à genoux deux fois, mais la décison finale, je l'ai remportée aux points. J'étais très fier de battre ce champion turc dans son propre pays. Car ce dernier, par deux fois, s'était exhibé dans des rencontres internationales Tunisie-Turquie à Tunis et à Sousse. Le hasard a voulu qu'il rencontre deux fois Béchir Boundka et le batte par K.-O. J'ose espérer avoir vengé mon camarade de l'Equipe nationale Béchir Boundka, en humiliant ce boxeur», confie Abdelwaheb Bettaïeb, avec un accent de nostalgie et d'orgueil. L'année 1972, l'année des J.O de Munich, feu Taïeb Louhichi est élu délégué technique au tournoi de boxe des olympiades. M.Taïeb Louhichi, directeur technique de la Fédération tunisienne de boxe (FTB), président de la Confédération africaine de boxe (CAB) et vice-président de l'Association internationale de boxe amateur (AIBA), a été élu, à la dernière assemblée générale de l'AIBA, délégué technique au tournoi de boxe des Jeux olympiques de Munich. C'est la première fois dans l'histoire des Jeux qu'un Africain est élu à ce poste. M.Louhichi sera responsable, avec le Soviétique Denisov, de la directon technique de la boxe aux Jeux de Munich. La même année, Bettaïeb sera sacré champion de Tunisie. Une année, à vrai dire, faste dans l'histoire du noble art en Tunisie. Revenons à notre champion Abdelwahab Bettaïeb qui se rappelle avec délectation des noms de ses amis et coéquipiers en sélection nationale de ces temps héroïques : Mongi et Néjib Boufrika (ASTP), Mohamed Ben Othmane (ST), Ali Gharbi (ASMT), Salah Ben Saâd (CA), Mouldi Ménaï (JSO), Mohamed Chaâbane (JSS), Hamda Rébaï (ST), Mohamed El Mejri (ASMT), Béchir Boundka (ASTP), Mohamed Salah Bouselmi (NAC), Béchir Jelassi, Chouanine, Mohamed Ben Arfa, Mohamed Salah Houidi, Ali Chtioui, Abdallah Neffati, Boujemaâ Sassi, et la liste est très longue… La boxe, dans l'esprit de notre champion, reste un sport qu'il faut savoir abandonner à temps. Car, dans la vie, il est nécessaire de savoir choisir entre le sport et la carrière professionnelle : «J'ai pu découvrir beaucoup de choses. A force de boxer, j'étais comme un taureau lâché dans l'arène. Je n'avais plus d'horizons ! D'un seul coup, j'ai découvert la vie et ses exigences multiples au-delà de la carrière sportive. Il faut juste trouver la passion qui peut vous amener à avoir une existence aussi exaltante que la boxe. Actuellement, je suis maître de mon destin. J'exerce en toute liberté mon métier de bijoutier. Je me sens un artiste dans mon métier. Ma plus grande joie a été celle d'avoir rencontré mon épouse et d'avoir eu mes filles et mon fils: Abir, Afoua, Oula et Mohamed Yadh. J'adore la boxe, c'est ma passion, mais mon travail passe à présent avant toute chose». Abdelwahab Bettaïeb regrette que la boxe ait connu un certain déclin ces dernières années et ce déclin est dû aux intrus et aux affamés qui n'ont rien à voir avec la boxe. «J'aime bien la boxe, avoue-t-il. C'est un sport qui mérite du respect car c'est au prix de beaucoup de sacrifices que les boxeurs montent sur un ring pour nous offrir le spectacle. Ces hommes sont les derniers gladiateurs de notre époque et il faut bien du courage, même aux plus mauvais». Puisse un nouveau bureau fédéral démocratiquement élu donner un nouvel élan à une discipline qui a rempli toute l'existence de notre champion des années 70 et qui continue à le passionner.