Salah El Bahri alias «Young Salah» est une figure historique de la boxe tunisienne. C'est l'un des pères de la boxe tunisienne. Il compte des dizaines de brillantes victoires et deux matches nuls. L'un contre le challenger du champion du monde des pieds mouches «Young Siki». Am Salah, on l'a souvent comparé à un ouragan qui foudroie, balaie tout sur son passage. Malgré sa petite taille, il a battu tous les champions de son époque. De 1928 à 1936, «Young Salah», bien plus sage que ses confrères (Tahar Ghanjou, Mokhtar Ben Mrad et Ben Said), n'a pas fait une longue carrière. Cette courte carrière est due à son triomphe. Il a été écarté par les autorités coloniales... En 1932, il bat aux points l'Italien Angelo dans un rude combat qui est allé au finish des dix reprises... L'année suivante, en 1933, un gala de boxe est organisé au théâtre Ben Kemla à l'avenue de Londres. Trois Tunisiens sont en tête de l'affiche. Tahar Ghanjou contre Edmond Zerbib (poids léger). Ali Ben Said contre Lesoto (poids s/léger). Young Salah contre Ted Morris (poids mouche). Secrets et manœuvre au théâtre Ben Kemla. Un théâtre moyen, un endroit à l'échelle humaine et un vrai théâtre d'opération. Deux communautés arabe et juive dans l'enceinte. Le spectacle était autant dans la salle que sur le ring au cours de ces samedis incontournables! Jour idéal pour les commerçants et la haute bourgeoisie tunisoise. On venait pour voir mais surtout pour être vu... Le Tout-Tunis et des beys se pressaient. Ils sont à la fois acteurs et spectateurs. Les responsables, dont Ali Ben Kemla (le patron du théâtre), avaient une certaine dureté d'âme mais le génie des grandes rencontres et une formule : «Combats à risques mais équilibrés où il valait mieux faire un beau vaincu qu'un mauvais vainqueur», selon l'expression de Joé Guez. Cela se vérifia avec des hommes restés très populaires, comme le pionnier de la boxe Hassen El Karrèche, qui a boxé dans la même salle du théâtre face à Buffy en 1920. Son neveu Gaman, et Salah Bel Khéchina faisaient toujours le plein du théâtre de Ben Kemla. Bref, c'est dire combien l'ambiance était bien animée à la rue de Londres (Le Passage). Revenons au résultat de cette soirée. Le trio, Tahar Ghanjou, Ben Saïd et «Am» Salah alias «Young Salah» sont vainqueurs aux points… Les Tunisiens étaient en liesse… En 1934, «Young Salah» bat un Français, un certain Melly par K.-O. à la 4e reprise… La même année, notre héros Salah El Bahri enregistre, une fois de plus, une victoire par abandon à la 3e reprise de son adversaire, le Français Maurice Strick… L'année suivante en 1935, on peut dire que c'est une année fructueuse pour «Young Salah». Il ajoute à son palmarès trois fulgurantes victoires. Le premier combat, c'était contre Costantini de nationalité italienne. Ce dernier était un dur à cuire. Il a tenu tête à notre champion «Am Salah» pendant dix rounds. Car tout au long du combat, Costantini fait connaissance du tapis à quatre reprises et, à chaque fois, il se relève et continue le combat et, au final, «Young Salah» le vaincra aux points. La même année, saison 1935-1936, notre champion bat aux points deux boxeurs, un certain Cheval et Condoria. Am Salah, un puncheur de marbre, nouveau champion de Tunisie… En 1936, pour avoir triomphé dans la boxe, «Young Salah» fut écarté du domaine du pugilat par les autorités coloniales. C'est une courte carrière, mais elle est bien remplie. De 1926 à 1936, notre champion a livré quarante combats au cours desquels il a rencontré tous les meilleurs nationaux et métropolitains de l'époque: Rosario, Condoria, Jean Ferryville, Luca, Billy Smadja, Bocca, Bruno, Bé David, Ted Morris, Strick, Donjel, Melly, Cheval, Signorino, etc. tout en disputant cinq fois le championnat de Tunisie professionnel… Il quitte le domaine de la boxe au mois de décembre de l'année 1936 pour convoler en justes noces et construire son «nid» familial. Il reste loin des rings, pendant une dizaine d'années. Young Salah, en 1946, allait de nouveau revenir à la charge, non en tenue de boxeur, mais en qualité de prévot, puis entraîneur de la Musulmane «El Islamia». Avec l'avènement de l'Indépendance, il dirigea pendant dix années les couleurs de l'Association des travaux publics (Astp) à la rue El Benna, «Essabbaghine», Bab El Jazira. Ses poulains étaient de grands champions, tels Tahar Belhassen, Naceur Soudani, Amara Boukhris, Abdelwahab Jendoubi, Hédi Bouromana, Habib Dhifallah, Dakhni Abdelwahab, Mohamed Khedher et son frère Abdelwahab, Khélifa Trabelsi et la liste est longue. «Am Salah» était et demeurera pour toujours une grande personnalité de l'histoire de la boxe tunisienne (le père de la boxe tunisienne) qui a contribué à l'épanouissement de ce sport dans notre pays et ne doit jamais être oublié… Malheureusement, ces dernières trois décennies qui sont passées, aucun président de notre Fédération tunisienne de boxe et Dieu sait combien ils s'étaient relayés et nombreux, aucun d'eux n'a pensé à honorer «Am Salah» même à titre posthume ! Car chaque président parachuté à la tête de la «vache laitière», qu'est la FTB ne connaît pas l'histoire de la boxe tunisienne ! Ignorance et ingratitude ! Am Salah mourut en 1975 suite à une crise cardiaque… Que Dieu le Tout-Puissant lui accorde Son Infinie Miséricorde et l'accueille dans Son éternel Paradis.