Par El Koufi Nejib Le paysage politique post-électoral nous offre aujourd'hui un spectacle désolant, tant et si bien qu'on se dit qu'on a été roulé dans la farine d'avoir trop cru que certains qui n'ont jamais porté la démocratie dans leur cœur ont prôné moult slogans les apparentant aux ténors de la Grèce antique. Ennahdha, puisqu'il faut l'appeler par son nom, nous distille plus d'un langage à la fois. Ouverture tous azimuts de certains, archaïsme et fermeture, d'autres allant jusqu'à un voyage qui a soulevé plus d'une interrogation et plus d'un rejet, du leader du mouvement au Qatar dont la paternité et le financement de l' «Association des Ulémas musulmans» une sorte d'Internationale, ne sont un secret pour personne. N'est-il pas légitime de s'interroger sur les buts réels de cette visite qui ressemble étrangement à un serment d'allégeance à la nouvelle Mecque de l'islam politique ? La course effrénée aux postes, la déclaration hâtive du second d'Ennahda de briguer la charge de Premier ministre, les tractations pour la formation du gouvernement, les déclarations de Rached Ghannouchi à propos de la loi relative à l'adoption, qui si elle est abolie va être la première de la série, nous éloignent tellement du débat sur la Constitution que l'on est en droit de se demander si leur seul but non avoué n'est pas la remise en cause des acquis qui font de notre pays une nation moderne. Kasbah I, Kasbah II n'aurait été alors qu'un pont pour y parvenir, pont dont le terrassement a été préparé par certains illuminés en mal de grand soir. Tout a été échafaudé pour qu'on ne s'achemine pas vers l'élection de la présidence de la République et celle de l'Assemblée législative pour lesquelles les principaux bénéficiaires de la situation n'étaient pas prêts au mois de février. Tout a été fait pour qu'on s'achemine vers l'impasse de l'Assemblée constituante qui sera alors une assemblée législative qui ne veut pas dire son nom et à travers laquelle ces forces nouvelles veulent faire passer leur projet de société, un négatif de notre modernité. De tout le monde arabo- musulman riche ou pauvre, proche ou lointain, les Tunisiens se sont distingués par un élan vers la modernité qui n'a pas son pareil. Depuis des lustres et de l'avis de toutes les nations, la Tunisie a toujours été la tête de pont entre les deux rives de la Méditerranée entre les civilisations pour avoir vécu elle-même un brassage de peuples et de religions différents et qui ont donné notre identité une et plurielle avec un sens de la modération caractéristique des peuples des plaines. Un pays qui sort du lot, un pays où la femme a depuis des siècles marqué de son empreinte le devenir national. Fier et attaché à sa modernité, à tout ce qui a été acquis depuis des siècles et consolidé par l'indépendance politique de son pays, le Tunisien quelle que soit sa génération ou sa condition n'est pas prêt de perdre au change. Il appartient aujourd'hui à la majorité qui s'est dégagée de comprendre cela et d'en tenir compte afin d'éviter de créer des fossés qu'il sera difficile de combler, des ruptures que notre pays ne peut se permettre.