Ce sont des centaines d'indépendants politiquement et de tous bords professionnels, membres du Groupe éco-constitution et du Réseau Associatif pour la Nature et le Développement en Tunisie (RANDET), qui ont décidé, en tant que frange de la société civile déterminée à intervenir positivement sur le cours des événements, de défendre le respect du droit à un environnement sain et équilibré dans la jeune démocratie tunisienne qui se construit et où tous les dérapages sont possibles. La voie légitime et assurément porteuse choisie par ces ONGs et experts pour parvenir à cette fin est une lettre ouverte adressée à l'Assemblée nationale constituante, dont la première mission consistera à élaborer la nouvelle Constitution tunisienne, l'architecture de base du futur système de gouvernance. Cette initiative citoyenne de militants écologistes vise, pour la première fois dans l'histoire de la Tunisie, l'inscription dans le texte de la nouvelle Constitution du droit de tout citoyen à un environnement sain. Droit qui stipule la mise en place de politiques de développement économique et social qui tiennent compte du respect de la nature et de la protection de l'environnement afin d'assurer autant que possible une croissance durable et une qualité de vie respectable pour les générations actuelles et futures. Dans le domaine environnemental, faut-il le rappeler, beaucoup a été fait en termes de réalisations notamment liées au développement urbain comme l'assainissement. Mais beaucoup d'erreurs de choix et de gestion ont été également commises. La révolution du 14 janvier a permis de lever le voile sur nombre d'affaires en relation avec l'environnement, comme celle du centre de gestion des déchets dangereux de Jradou, de la pollution par le phosphogypse à Gabès ou encore des nuisances engendrées par les décharges contrôlées, pour ne citer que ces problèmes qui ont fait polémique dans les mois qui ont suivi la chute de l'ancien régime. Aujourd'hui, les espérances sont grandes pour réussir à rectifier le tir là où c'est nécessaire et booster les programmes ou projets en souffrance. Les craintes aussi sont présentes: «Il est indiscutable que les priorités sont d'ordre économique et social, l'environnement en est une composante essentielle; malheureusement, il n'est pas toujours considéré à sa juste valeur par les décideurs», indique M. Mounir Majdoub, expert environnemental et coordinateur du groupe Eco-constitution Une conférence nationale dans les six prochains mois Dans la lettre, les revendications de ces défenseurs de l'environnement relèvent du court et du moyen termes. En première position, les signataires soulignent l'indispensable «constitutionalisation» du droit à un environnement sain et équilibré. Ils y ajoutent le droit de tout citoyen d'accéder à l'information, de son droit d'ester en justice et de son droit de participer à l'élaboration des politiques, programmes et projets en relation avec l'environnement. Ils mentionnent également l'obligation de l'Etat d'œuvrer à l'intégration de la dimension écologique dans ses politiques publiques. L'autre revendication est institutionnelle, sollicitant la création d'un ministère de l'Environnement à part entière. Les signataires revendiquent aussi «des mesures urgentes et énergiques pour faire face aux actes de vandalisme et aux exactions qui ont porté préjudice aux ressources naturelles, aux écosystèmes et à l'environnement urbain et rural, au cours des mois écoulés». Ils proposent, par ailleurs, que ces mesures soient prises «dans un cadre concerté et en partenariat avec toutes les parties prenantes». Le groupe des signataires, près d'une centaine au 11 novembre, informent les nouveaux élus du peuple qu'ils envisagent d'organiser, dans les six prochains mois, une conférence nationale sur l'environnement et le développement. Le but étant de réfléchir sur une nouvelle vision des politiques de développement en vue d'une meilleure durabilité des réalisations. La conférence devrait regrouper toutes les parties intervenant dans le domaine de l'environnement : élus de l'ANC, gouvernement, partis politiques, organisations de la société civile, secteur privé, scientifiques et experts.