KIEV (Reuters) — Au plus offrant: ma voix lors du scrutin de dimanche. Ce type d'annonces apparues sur Internet ces derniers jours traduit le climat de désenchantement à cinq jours des élections présidentielles en Ukraine. Un des internautes, qui met son bulletin de vote aux enchères pour une somme de 300 à 500 hryvnias, se propose même d'assurer la coordination des électeurs qui mettent leurs voix à l'encan. "Je ne crois pas en notre démocratie et je vends ma voix aux élections. Peut-être y aura-t-il dix autres voix à vendre. Seul un enchérissement est négociable", explique Lviv, un internaute de l'ouest de l'Ukraine. La Sécurité de l'Etat n'a pas voulu faire de commentaire sur ces annonces, mais la commission électorale officielle a rappelé que le trafic de voix était illégal et passible de poursuites pénales. Mais les "vendeurs" ne semblent pas avoir conscience des risques de poursuites, certains livrant même leur adresse e-mail, tandis que d'autres se contentent de préciser leur numéro de téléphone. "Je me fiche complètement de qui gagnera. Il y a trois voix à vendre. Deux à Kiev et une à Bila Tserkva, à 500 hrynvias pièce", écrit un autre internaute, de la capitale ukrainienne.. "Déception et cynisme" Vadim, un ouvrier du bâtiment de 25 ans, confie avoir déjà reçu des offres après avoir diffusé son annonce sur Internet, sans préciser si elles émanaient de partis ou de particuliers. "La politique ukrainienne m'est complètement indifférente. Je ne m'intéresse pas à qui sera président. Je ne suis pas chauvin", assure-t-il. Vadim s'affirme en mesure de réunir une dizaine de voix à vendre, entre les membres de sa famille et ses amis, la moyenne de prix pour chacune étant de 500 hryvnias. La présidentielle de dimanche, la cinquième depuis que l'Ukraine s'est émancipée en 1991 d'une URSS en ruine, se déroule dans un climat global de désenchantement face à la crise mondiale qui affecte les emplois et les budgets des foyers. La mise aux enchères de voix d'électeurs "traduit la déception et le cynisme croissant des Ukrainiens envers la politique et les hommes politiques", estime l'analyste politique Volodimir Fessenko. "Il n'y a aucune confiance de la part des Ukrainiens à l'égard de la majorité des candidats", dit-il. Le scrutin de dimanche ne devrait pas départager les candidats et un second tour est probable le 7 février entre Ioula Timochenko, chef du gouvernement sortant, et l'ancien Premier ministre Victor Ianoukovitch. Selon les sondages, le Président Victor Iouchtchenko, porté au pouvoir par la "Révolution orange" de 2004, serait éliminé dès le premier tour.