KIEV (Reuters) — Le président du parlement ukrainien a prononcé hier l'acte de décès de la coalition sortante de Ioulia Timochenko, cinq jours après la prise de fonction de son adversaire à l'élection présidentielle, Victor Ianoukovitch. Ce dernier a été déclaré vainqueur de la présidentielle du 7 février avec 48,95% des voix contre 45,47% à Timochenko, qui a contesté la régularité du scrutin, entaché selon elle de fraudes massives, et refusé jusqu'à présent de quitter son poste. «J'annonce que la coalition cesse ses activités au parlement», a déclaré aux députés Volodomir Litvine, le président de l'assemblée, à la veille d'un vote sur une motion de censure déposée contre Timochenko. Cette annonce fait suite à une réunion des chefs des groupes parlementaires lors de laquelle les leaders de la coalition sortante n'ont pas été en mesure de prouver qu'ils détenaient toujours une majorité de travail, ce qui est de mauvais augure pour Timochenko. L'ancienne égérie de la «révolution orange» de 2004 a laissé entendre qu'elle démissionnerait si la motion de censure était adoptée et abandonnerait immédiatement «toutes les responsabilités» entre les mains de Ianoukovitch. Ioulia Timochenko a imputé ses déboires à ses anciens alliés parlementaires, qui l'ont lâchée, en déclarant aux journalistes : «Ils ont détruit aujourd'hui le dernier bastion, la dernière barricade défendant notre Ukraine». La prochaine coalition au pouvoir à Kiev devrait entretenir avec la Russie voisine des relations plus apaisées que les tenants de la «révolution orange», minés par leurs dissensions internes. «Ecarter Timochenko n'est pas un problème» Avec un recul de 15% en 2009 de son PIB et une crise économique qui l'atteint de plein fouet, l'Ukraine, qui espère un plan de sauvetage de 16,4 milliards de dollars du FMI, a désespérément besoin de stabilité politique. Mais, avec la chute probable de Timochenko, aujourd'hui, c'est une longue période d'incertitude politique qui risque de s'ouvrir pour le pays. Les groupes parlementaires disposeront d'un mois pour trouver une nouvelle coalition et de 60 jours pour mettre sur pied un gouvernement. En cas d'échec, Viktor Ianoukovitch pourra provoquer des élections législatives anticipées, un scénario que les investisseurs redoutent parce qu'il prolongerait de plusieurs mois les incertitudes économiques et politiques. Même si la motion de censure est adoptée, Ioulia Timochenko pourrait expédier les affaires courantes durant cette transition, mais les propos qu'elle a tenus hier tendent à indiquer qu'elle y renoncerait, ajoutant aux incertitudes. Viktor Ianoukovitch, originaire de l'est russophone du pays, a avancé les noms de trois personnalités pour diriger le gouvernement : l'ancien président réformiste de la Banque centrale Sergueï Tigipko, l'ancien ministre des Affaires étrangères Arsénié Iatseniouk et l'ex-ministre des Finances d'origine russe Mikola Azarov. Pour parvenir à une coalition majoritaire, le Parti des régions du nouveau chef de l'Etat devra s'allier à des dizaines de députés de Notre Ukraine, qui regroupe une constellation de partis qui soutenaient l'ancien président Viktor Iouchtchenko, l'autre figure de proue de la «Révolution orange» «Ecarter Timochenko demain n'est pas un problème, mais former une nouvelle coalition est moins évident», souligne l'analyste Mikhaïl Pogrebinski.