SHANGHAI (Reuters) — Le Président Nicolas Sarkozy a demandé hier à la Chine de mieux traiter les entreprises et les investisseurs français, qui se plaignent de difficultés croissantes d'accès au marché chinois. Les entreprises françaises doivent pouvoir se battre "à armes égales" avec leurs concurrentes chinoises, a-t-il déclaré à l'issue d'une visite du pavillon français de l'Exposition universelle de Shanghai, en compagnie de sa femme Carla. Une illustration de la ligne que les dirigeants français s'efforcent désormais de mettre en pratique vis-à-vis de Pékin : amicale sur le plan politique mais ferme sur le plan commercial. Nicolas Sarkozy achevait dans la capitale économique de la Chine une visite d'Etat destinée à tourner définitivement la page des tensions franco-chinoises de 2008 autour du Tibet. "Il est inutile avec la Chine d'avoir un discours agressif ou fait de reproches, c'est parfaitement contre-productif", a-t-il expliqué à des représentants de la communauté française réunis dans un grand hôtel de Shanghai. "Mais, en revanche, je ne crois pas au discours seulement diplomatique, fait de beaucoup de mots, d'énormément de phrases et parfois de peu de contenu", a-t-il ajouté. Le Président français avait eu, en début de matinée à Pékin, un entretien avec le Premier ministre chinois, Wen Jiabao, en grande partie consacré aux dossiers économiques. "Je lui ai indiqué combien nous étions et nous serons accueillants aux investissements chinois en France mais combien également j'étais attentif aux problèmes de nos chefs d'entreprise en Chine", a-t-il expliqué. Il a dit avoir rappelé à Wen Jiabao que les industriels français et leurs partenaires chinois avaient du mal, dans certains secteurs, à obtenir les licences nécessaires pour opérer en Chine — c'est notamment le cas d'Alstom. Il lui a également dit son souhait de voir les entreprises françaises pouvoir être majoritaires dans les sociétés qu'elles sont obligées de mettre sur pied avec des partenaires chinois. "C'est un choix qui appartient aux entreprises (...) Ce n'est pas un choix qui appartient à l'Etat", a souligné Nicolas Sarkozy devant la communauté française. Il a fait valoir que la France soutenait la demande de la Chine d'accéder à l'horizon 2016 au statut d'économie de marché accordé par l'Union européenne à ses partenaires. Il a également dit avoir exprimé sa préoccupation à propos des obligations administratives imposées aux entreprises étrangères — obligations si détaillées qu'elles reviennent pratiquement à livrer des secrets industriels. "Il est normal de remplir les démarches prévues mais les secrets de fabrication, les brevets, les technologies, nous les transférons si nous avons décidé de les transférer et si cela correspond à un contrat, pas à une démarche administrative", a expliqué le Président français. Sur le plan politique, Nicolas Sarkozy, qui a justifié sa venue en Chine pour la quatrième fois en trois ans par la nécessité d'avoir des relations "confiantes et amicales" avec Pékin, a continué à donner des gages aux dirigeants chinois. "Il y a eu dans le passé des difficultés, des malentendus. Nous nous sommes donné beaucoup de mal pour lever ces malentendus sans renoncer à nos convictions", a-t-il dit. Alors qu'il accusait jusqu'à récemment la Chine de gonfler ses exportations grâce à un "dumping monétaire", il a jugé, cette fois, "déplacé" de lui reprocher ses excédents commerciaux et le niveau de sa monnaie, le yuan. De même, Nicolas Sarkozy n'a évoqué que dans le secret de ses entretiens avec les dirigeants chinois la question des droits de l'Homme et celle du Tibet, toujours sensibles en Chine, sans jamais y faire la moindre allusion en public, contrairement à sa première visite d'Etat en 2007. Il n'a en revanche eu de cesse d'affirmer que le nouvel ordre politique, économique et monétaire mondial qu'il appelle de ses vœux ne se ferait ni sans la Chine ni contre elle. Il a ainsi rappelé qu'il était convenu avec le Président Hu Jintao que la France et la Chine prépareraient ensemble en amont la présidence française du G20 en 2011 — une présidence que Pékin a au demeurant aidé Paris à obtenir.