Par Jawhar CHATTY Pour une fois, les données de l'Institut national de la statistique(INS), en matière d'inflation et de surenchérissement des prix, sont en phase avec la perception qu'ont en les ménages tunisiens au quotidien. «Pour une fois», et là il s'agit bien de nous entendre sur les ressorts de ce constat qui pourrait amener certains à pointer du doigt la crédibilité des données de l'NS. Disons-le d'emblée : la crédibilité de l'INS a toujours été intacte, même du temps de l'ancien régime. Le sérieux et la rigueur scientifique de cet institut sont irréprochables et mondialement reconnus. Pour preuve, les données de cette institution ont toujours été scrupuleusement reprises par les institutions monétaires et financières internationales. S'il y avait le moindre doute sur la crédibilité des données, telles que transmises par l'INS, ces institutions n'auraient jamais et en aucun cas pris le risque de les adopter et de fonder sur elles leurs rapports d'étude de risque pays. Il y a, à ce titre, lieu de saluer ici le talent de toutes les compétences de l'INS qui, aujourd'hui comme hier, ont toujours remarquablement fait leur travail de statisticiens et dont la qualité n'a rien à envier aux plus prestigieux instituts internationaux d'études et de production statistique. Mais alors d'où vient cette dissonance entre le vécu et les données de l'INS ? De deux choses l'une : ou bien les chiffres officiels sont erronés ou bien alors les ménages sont collectivement frappés de myopie face à la valse des étiquettes. A vrai dire, l'une et l'autre de cette alternative sont partiellement tronquées. Les chiffres officiels n'ont pas toujours été, et c'est capital de le préciser, ceux que l'INS a toujours veillé à fidèlement communiquer et en bloc aux pouvoirs publics. Les données officielles ne reprenaient que partiellement les données de l'INS. Les pouvoirs publics ne se gênaient guère de piocher, dans ce bloc de données, seulement celles qui les arrangeaient et dont ils permettaient la diffusion et la publication, à l'exclusion de toutes les autres, bien plus dérangeantes pour les hautes sphères du pouvoir politique. Il n'a, à cet égard, jamais été question de manipulation de chiffres, mais de...rétention de l'information. C'est ce qu'ont toujours soutenu les statisticiens de l'INS et l'on a de sérieuses raisons de les croire. Quand, aujourd'hui, l'INS fait état d'une augmentation des prix à la consommation de 5.4% au mois de février 2012 par rapport à la même période une année auparavant, le consommateur tunisien peut enfin constater que, pour une fois, les pouvoirs publics ont «fidèlement» diffusé les données, relatives à l'inflation, qui leur ont été transmises par l'INS. Ce n'est tout de même pas rien : le consommateur tunisien se trouve ainsi au moins réconforté quant à sa bonne acuité visuelle. Non, il ne souffre pas de myopie ! C'est la réelle valse des prix qui l'inquiète aujourd'hui le plus tout autant que l'effritement de son pouvoir d'achat. Mais cette question n'est hélas pas de son unique ressort. La balle serait, à cet égard, plutôt dans le camp du gouvernement.