Les affrontements survenus lundi sur l'avenue Habib- Bourguiba entre les manifestants et les forces de sécurité «n'étaient pas totalement spontanés», a affirmé hier le ministre des Droits de l'Homme et de la Justice transitionnelle, Samir Dilou. «Des photos et des enregistrements vidéo montrent l'existence de sacs de pierres», a-t-il argumenté, rappelant également que «le ministère de l'Intérieur a déclaré avoir saisi des cocktails Molotov». Le ministre a admis, dans une déclaration à la presse, que les photos et les vidéos montrent que «les manifestants ont été traités avec beaucoup de violence», affirmant que «ceux qui seront désignés par l'enquête devront répondre de leurs actes devant la loi, qui que ce soit et quelles que soient leurs responsabilités». S'exprimant au terme de ses rencontres avec nombre de personnalités nationales dans le cadre des concertations sur la justice transitionnelle, Samir Dilou a souligné que «dans un pays libre, il faut certes respecter la liberté de manifester, mais également le prestige de l'Etat». «Les batailles auxquelles fait face aujourd'hui le pays sont essentiellement d'ordre économique et social, a-t-il dit, considérant que «la bataille de libération de l'avenue Habib- Bourguiba ne peut en aucun cas en faire partie». Le ministre a, en outre, souligné que «ceux qui n'ont pas accepté la décision du ministre de l'Intérieur d'interdire temporairement les manifestations sur l'avenue Habib- Bourguiba peuvent exprimer leur refus par divers moyens», estimant que «la politique du bras de fer» et les tentatives d'«imposer par la force» la manifestation sur cette avenue est «une erreur politique». Il a, en substance, indiqué que toutes ces considérations «ne justifient en aucun cas les violations de l'intégrité physique et morale de ceux qui se trouvaient dans le centre-ville hier, qu'ils soient manifestants, militants, élus ou policiers». Le ministère ne publiera pas de communiqués ou de déclarations parce qu'ils sont souvent «interprétés et politisés», a-t-il par ailleurs relevé. Au sujet des déclarations accusant des milices d'avoir attaqué hier les manifestants, Dilou a qualifié d'«étonnantes» ces «accusations hâtives» portées «avant les conclusions de l'enquête». Il a, à ce propos, estimé «très grave» d'accuser des parties non gouvernementales d'être en charge de l'application de la loi dans un Etat d'institutions. Si l'existence d'individus n'appartenant à aucun parti politique ni aux forces de sécurité est établie, «ils doivent être jugés et punis étant donné que nul n'est au-dessus de la loi», a averti le ministre. «La police tunisienne n'a pas besoin d'un parti, d'un mouvement ou de quiconque pour l'aider à maintenir la sécurité», a-t-il encore lancé, faisant noter que «celui qui commet un crime ne tient pas la preuve de sa culpabilité dans la main».