Slah Smaoui, promoteur du célèbre Espace Kèn, réalisation unique en son genre, dédiée au patrimoine et aux arts, est entré en grève de la faim depuis mercredi dernier. Il entend, par ce geste désespéré, mettre devant leurs responsabilités les ministères de la Culture et du Tourisme qui, en dépit de sollicitations réitérées depuis des années, n'ont rien entrepris pour venir en aide à cet espace d'exception. L'Espace Kèn est un «village» situé à Bouficha (gouvernorat de Sousse), une sorte de cité de l'artisanat d'art tunisien. Sa fondation, du moins dans sa partie primitive, remonte à près d'une trentaine d'années. Il a été édifié grâce au labeur de ses promoteurs, Slah et Noura Smaoui, et à un prêt bancaire, pour dérisoire qu'il fût (450 mille dinars), n'en a pas moins constitué une hypothèque dans la mesure où en dépit de l'excellence du projet qui devrait faire la fierté du pays, le projet (à la fois culturel et touristique) ne parvint pas à décoller, commercialement parlant, par suite de l'inertie des administrations de tutelle qui n'ont jamais répondu à des demandes de classement du site en tant qu'établissement culturel et touristique. La loi d'airain du système bancaire en vigueur en Tunisie a plombé l'entreprise et, aujourd'hui, l'établissement créancier a intenté une action en justice pour mettre l'Espace Kèn en vente. Audience a été fixée à cette fin par le Tribunal pour le 9 juin prochain. C'est pour protester contre le silence de l'Administration que Slah Smaoui a entrepris sa grève de la faim. La menace qui se profile est double. Elle est à la fois dirigée contre l'établissement dont l'éventuel repreneur n'aura cure de sa spécificité conceptuelle; dirigée aussi contre l'intégrité physique du promoteur, grand malade de 66 ans opéré à cœur ouvert.