Par Soufiane Ben Farhat Les débats sur la loi de finances complémentaire s'éternisent. Ils promettent de s'étendre plus que la durée du vote de la loi de finances proprement dite. Et cela pose problème. Pourtant, les urgences économiques ne sauraient souffrir davantage d'attentisme. Çà et là, le chaudron bout. Les débats sont toutefois nécessaires sans pour autant donner dans le registre pathologique. Parce que, précisément, la «débattite» aiguë est la maladie infantile des révolutions. Entendons-nous bien. La vocation première de l'Assemblée constituante consiste à élaborer la nouvelle Constitution. C'est-à-dire la loi fondamentale qui doit régir le pays pour des générations, voire des siècles. Or, jusqu'ici, on s'est davantage englué dans la politique politicienne que dans la conception de la nouvelle Constitution. Le seul débat sérieux en la matière a été relatif au fameux article 1. La charia avait été invitée aux conciliabules, sournoisement et dangereusement au bout du compte. Cela a failli nous induire dans un cercle vicieux et infernal de faux débat. Aujourd'hui, on constate que le débat constitutionnel cale. Les charges gouvernementales et publiques accaparent tout. Pourtant, il y a bien des instances gouvernementales appropriées. La loi portant organisation provisoire des pouvoirs publics a bien délimité les prérogatives de l'Etat. Mais, étrangement, seules les prérogatives de l'exécutif gouvernemental priment. Aujourd'hui et maintenant, le rappel des urgences s'impose. Le gouvernement doit s'assumer, à ses risques et périls. Les partis de la Troïka devraient considérer davantage la réalité immédiate que les considérations électoralistes à brève échéance. L'Assemblée constituante gagnerait à recouvrer sa vocation. Raison pour laquelle on devrait s'atteler au plus pressé à la fixation d'un deadline pour l'élaboration de la nouvelle Constitution. Tout comme on l'a déjà fait pour la tenue des nouvelles élections législatives et présidentielle. Il faut revenir aux fondamentaux de la politique. Celle-ci instruit que l'on doive prendre le taureau par les cornes. Principalement et surtout lorsque, comme c'est le cas actuellement, l'économique et le social calent. Le chômage atteint des seuils faramineux. Le renchérissement du coût de la vie est une réalité douloureusement tangible. Les régions souffrent, elles aussi. Elles saignent même en certains endroits. Et menacent de troubles de plus en plus graves et tragiques. Les investissements, eux, se font désirer. Idem de l'exportation. Par un effet de retour de flamme, l'incertitude économique grève lourdement l'épargne des ménages. Il en résulte un brutal rétrécissement des ressources et un net recul de la consommation. Le spectre de la stagnation endémique est comme une épée de Damoclès suspendue sur la tête de tous. Ici et maintenant, le pacte social fait encore défaut. Par-delà la politique politicienne, l'échange, les conciliabules et les accords doivent s'articuler autour de l'économie. Parce que la réalité est telle que les choix économiques efficients et porteurs passent outre les querelles de chapelle et les ostentations idéologiques. L'économie s'impose en termes de solutions parfois uniques. Nos partis politiques et nos élites opérantes sur l'échiquier doivent l'admettre. Ce n'est pas tant une question de parti pris que de voie de salut pour tous. Il est bien évident que les issues tragiques ne font guère de distinguo. La lame de fond emporte tous, sans distinction. Les échéances constitutionnelles sont la clé de la porte de sortie de crise. S'y atteler ici et maintenant autorise le gouvernement à s'occuper des priorités économiques. Parce que, dans l'ordre des choses, les assemblées élues légifèrent et les gouvernements proposent des solutions immédiates.