"Hiwar" ou "Dialogue", tel est le thème de l'exposition collective organisée à la galerie "Le violon bleu", sur la colline de Sidi Bou Saïd, du 22 mai au 15 juin 2010. Passionnée d'art contemporain, Khédija Hamdi, commissaire de l'exposition, a voulu réunir des artistes arabes de trois pays, (Tunisie, Egypte et Irak) autour d'œuvres de peinture, photos, vidéos, installations et performances, pour livrer des récits, sensations, révélations, et autant de questionnements sur des maux que les mots ne parviennent pas parfois à faire comprendre pour libérer "le dialogue" dans toutes ses formes, aussi simples que complexes. Cette exposition, fruit de rencontres d'artistes croisés lors de ses différents déplacements ici et ailleurs, œuvre à les faire parler, chacun sur son support et selon son propre regard. Certaines œuvres ont ce pouvoir magique de figer celui qui regarde. L'installation vidéo "Ping-pong" de Adel Abidin (Irak) invite tout simplement à lire entre les lignes de son œuvre : match entre deux joueurs qui se déroule non pas autour d'un filet mais d'un corps féminin allongé sur la table de jeu. Dans cette trame de bruit et de fureur, est couchée une femme nue, fragile et effrayée qui ressemblerait à une ville, belle et souffrante, "tout comme Bagdad". D'origine irakienne, Sama Alshaibi et Dena Al-Adeeb, sont présentes avec trois triptyques «Bagdadi Mem» et crient, dans leurs photos, et à un travers un dialogue corporel entre deux femmes enveloppées de noir, à la révolte et à la liberté. Plutôt personnelle, la vidéo de l'artiste égyptien Moatez Nasr «Father and Son», qui semble moins attractive à première vue, intimide. Bien que l'enregistrement du dialogue entre l'artiste et son père, soit très intime, il est le symbole de cette quête de la réconciliation et des ponts de rapprochement et de compréhension au sein de la famille. Le dialogue entre les couples est, quant à lui, au cœur de l'installation de Mohamed Allam, Egyptien lui aussi, et qui dans «une conversation très privée» sur le Nil au Caire, porte son regard sur la culture des jeunes couples qui peuplent les bords du Nil. Des confessions de la Médina de Tunis Dans une empreinte à partir de cire et d'encre de Chine sur papier,illustrée d'un texte sur le mur, la Tunisienne Nadia Kaâbi Linke expose sa peinture «Rue Abderrahman Ben Mami», dont l'idée serait de transmettre des confessions de la médina de Tunis. Et ce sont les murs qui «deviennent les écrins de nos secrets». L'œuvre créée à partir d'un tube en néon blanc de Dora Dhouib est quant à elle une traduction littérale d'une expression traditionnelle tunisienne utilisée pour éloigner le mauvais œil. "Five and Thursday on you" serait-elle une manière de dire que la traduction peut servir à réduire l'incompréhension de l'autre et à susciter sa curiosité pour le connaître, en dépit des différences de langues, de cultures et de croyances. Par son installation "Topos", Meriam Bouderbala (Tunisie) brode avec des fils des récits complexes et des chemins qui n'appartiennent à personne. Le brouillage et la confusion de son œuvre renvoient à des repères qui informent, précisent ou suggèrent des pistes de réflexion pour découvrir et explorer l'essence des choses, et pourquoi pas entraîner celui qui regarde à voir autrement ce qu'il croyait connaître. Utilisant la réalité extérieure comme point de départ, les œuvres sont là pour dire tout simplement que l'identité des personnages, le sens des scènes, la raison d'être du décor vous invitent à apprendre à lire ce qu'un dictionnaire ou un manuel vous donne comme première réponse.