Le ministère de la Justice a dénié à l'Organisation Human Rights Watch (HRW) et à la directrice du Bureau de l'ONG à Tunis Emna Kalleli, « la qualité l'habilitant à avoir accès aux données personnelles des magistrats révoqués ». « Ces données sont régies par les lois et standards internationaux relatifs à la protection des données personnelles», a précisé le ministère dans un communiqué publié mercredi. Le ministère de la Justice avait décidé, le 26 mai 2012, la révocation de 82 magistrats de leurs fonctions pour leur implication présumée dans des affaires de corruption, une décision qui a provoqué une vive polémique auprès du syndicat et de l'association des magistrats, qui ont émis des réserves sur l'adoption de ce mécanisme. «L'autorité de contrôle des décisions de l'administration n'est pas du ressort de Human Rights Watch ou d'autres structures, mais de celle du Tribunal administratif, qui est seul habilité à annuler une décision faisant l'objet d'un recours », souligne le ministère de la Justice dans une mise au point en réaction à une déclaration de Emna Kalleli sur 10 magistrats parmi le groupe révoqué. L'ONG américaine de défense des droits humains avait estimé, dans un communiqué de presse publié le 15 janvier sur son site WEB, que « les juges révoqués devraient avoir accès à leur dossier ». Dans une lettre adressée le 20 décembre 2012 au ministre de la Justice, Noureddine Bhiri, Human Rights Watch «demandait accès aux dossiers (des juges révoqués), forte du consentement écrit de dix des juges révoqués ». Selon l'ONG, « les magistrats avaient déclaré qu'on les empêchait de consulter leur dossier et que, par conséquent, ils ne connaissaient pas les motifs de leur révocation et ne pouvaient pas faire appel efficacement de cette décision ». Le directeur adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch, Eric Goldstein, a noté dans ce communiqué que « le manque de transparence dans la révocation des juges met à mal une composante essentielle de l'indépendance judiciaire », estimant que « les mesures disciplinaires devraient être prises à la fois dans la transparence et avec une possibilité de recours ». Le bureau de HRW à Tunis avait également publié, le 29 octobre 2012, un communiqué dans lequel il a qualifié la décision de révocation de magistrats tunisiens « d'injuste et arbitraire ». L'ONG avait qualifié cette décision de « dangereuse, car elle maintient la mainmise du pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire ». Le ministère de la Justice souligne dans le communiqué que « le principe de transparence ne permet à quiconque ni même à l'administration d'exposer les gens et de dévoiler leurs secrets ni de les diffamer », exhortant Emna Kalleli à « cesser de mener des campagnes et à faire preuve de neutralité, comme l'exige la nature de ses activités de défense des droits humains».