L'important, c'est de ne pas perdre ; l'idéal serait de gagner Quoi qu'on dise, quoi qu'on pense et abstraction faite du dernier match contre le Danemark, nos handballeurs nous ont offert bien du plaisir et nous ont même rendus fiers par ces temps où les héros sont plutôt rares. Autre motif de fierté: les nôtres n'ont à aucun moment triché et c'est ce qu'on demande avant et après tout à un international défendant les couleurs de son pays. Loin de toute démagogie. De nos footballeurs, nous nous attendons la même chose, même si nous sommes objectivement plus ambitieux, plus exigeants, plus gourmands. C'est qu'une CAN, ce n'est tout de même pas un championnat du monde et nous sommes en droit de rêver d'un exploit de notre équipe nationale qui serait un peu la continuation ou encore le couronnement d'un parcours tout en progression (victoire au CHAN, puis qualification à la CAN, et ce, en dépit d'une situation héritée plus que compromise). Saut dans l'inconnu? Aujourd'hui, ce groupe arrive à maturité et il est temps qu'il cueille quelque laurier, en attendant les éliminatoires de la Coupe du monde. Et peut-être un premier passage historique au second tour. Mais nous n'en sommes pas encore là... Aujourd'hui, c'est jour de derby face à l'Algérie, sans doute la formation la plus fantasque du tournoi, capable du meilleur comme du pire. De flamber comme de passer à côté. Mais qui en fera baver plus d'un adversaire. A commencer par la Tunisie qui devra terriblement se méfier d'une formation bourrée de talents, mais au jeu collectif un peu approximatif. Mais on sait également que Vahid Halilhodzic est dépositaire d'une certaine tradition, celle de l'école nantaise dont il a longtemps été le baroudeur, puis entraîneur de Lille qu'il aida à revenir au tout premier plan. Mais il n'y a pas que le côté technique ou tactique. De Vahid Halilhodzic, on connaît aussi le caractère bien trempé et son attachement à une discipline de fer. Alors, si l'Algérie est à son image, méfiance ! Equilibres... C'est vrai que pour gagner un match, il faut avoir une parfaite connaissance de l'adversaire, mais il faut aussi et surtout compter sur ses propres atouts, sur son propre jeu. Les problèmes que connaît aujourd'hui cette équipe de Tunisie sont des problèmes d'identité et de croissance. C'est que depuis son avènement en équipe nationale, Sami Trabelsi s'est justement attelé à lui donner une nouvelle identité : on est passé d'un jeu subi à un jeu imposé. Expliquons-nous. De tout temps, le onze tunisien rechigne à faire le jeu, préfère attendre l'adversaire, puis partir en contre. Cela se traduisait par une solide défense, deux, trois, voire quatre pivots à profil défensif, ou du moins récupérateurs (Mnari, Nafti, Bouazizi et Chedly avec Roger Lemerre, par exemple), puis deux attaquants qui devaient souvent se «débrouiller» devant. Cela nous a parfois souri (CAN 2004), mais souvent desservi, puisque nous n'avons remporté qu'une CAN et jamais dépassé le premier tour d'une phase finale de la Coupe du monde. Pas facile non plus de changer de cap et notre équipe nationale l'apprend un peu à ses dépens en ce moment et cela explique également les hésitations et parfois même le doute du sélectionneur national. Cela ne le fait pour autant pas changer d'avis, ni revenir en arrière. Cela n'empêche la prudence, comme en témoigne l'entrejeu annoncé par Sami Trabelsi contre l'Algérie : Mouelhi, Traoui et Chedy Hammami. Un entrejeu qui se justifie à partir du moment que Traoui et Hammami participent activement à la relance du jeu et à la manœuvre offensive. Le premier en particulier, à qui on a appris dans son club et son équipe nationale à ne pas quitter la ligne médiane et souvent même à être collé à sa défense. Et cette dernière? Le sélectionneur opte visiblement pour la sécurité et l'expérience, Chemmam à gauche, Ifa à droite, Abdennour et Hicheri à l'axe. Avec la surprise du chef : Ben Cherifia. A propos de ce dernier, on ne peut parler à proprement dit d'un saut dans l'inconnu, même si une équipe nationale diffère un peu du club. Mais s'il devait être titularisé ce soir, Ben Chrifia ne l'aurait pas volé, puisqu'il a été le plus brillant et surtout le plus régulier ces deux dernières saisons. Gardien, défense et entrejeu : c'est important, mais pas suffisant pour un parcours brillant à la CAN. Attaque : atout maître Cela amène à parler de ce que tout le monde considère comme le point fort de cette équipe nationale : l'attaque. Msakni-Khelifa et Jomaâ. Aucune inquiétude concernant le deuxième et le troisième, mais des points d'interrogation concernant le premier. Ce n'est pas tant son talent qui est en doute, mais sa forme et son actuel état d'esprit. Il n'a plus la même envie et semble — déjà — blasé par les sacres et une gloire précoce. En équipe nationale, on l'attend toujours et on espère que l'attente ne durera pas éternellement. Un Msakni en veine, c'est un plus; un Msakni quelconque peut très bien perdre sa place dans le onze du départ, d'autant que les solutions de rechange abondent sur le banc : Darragi, Harbaoui, Dhaouadi, Ben Youssef et même Kharzi. Espérons qu'on n'en arrivera pas là... Une chose est sûre : avec cette attaque et ces choix, notre équipe nationale peut être redoutable même si tout viendra de derrière et même si nous ne sommes pas certains de la configuration annoncée du milieu où on pourrait par exemple retrouver Ben Yahia à la place de Traoui. Ce qui serait plus logique en ce moment. Tunisie-Algérie sera de ce fait très important. Pour le résultat, pour la formation du départ et pour le jeu que cette équipe pourrait et devrait développer. Avec un espoir : que ce Tunisie-Algérie soit disputé dans un bel état d'esprit car un match pas propre entre les deux voisins pourrait laisser des traces et compromettre les chances des uns et des autres dans ce groupe. Une certitude : Tunisie-Algérie ne sera pas triste...