On se craint, on se respecte et on se connaît. Et on veut gagner. Dans les deux camps… La CAN, on ne devait même pas y être. On s'apprêtait à la regarder à la télé pour cause de débuts calamiteux aux éliminatoires, dans un groupe, somme toute modeste : Botswana, Malawi et Tchad. Sauvés par le gong, sauvés par le Tchad, sauvés par Ezechiel — on chuchote même — par une poignée de dollars offerte aux Tchadiens. Nous n'en avons pas la preuve, mais le football est également fait de rumeurs. De bonne guerre en tout cas, depuis que la très «respectable» Fifa a décidé de tolérer qu'un adversaire puisse payer l'adversaire pour gagner. Allez vous demander après pourquoi la Fifa accumule autant de scandales ! Déceptions et joies Fermons la parenthèse. La CAN, nous y sommes et elle nous fait toujours autant rêver depuis qu'un soir du 14 février 2004, Jaziri, Santos, Hatem Trabelsi et autre Mnari ont mis fin à un interminable signe indien qui veut que notre équipe nationale ne puisse avoir un grand destin continental. Nous étions restés sur une terrible déception en 1965 au Zouiten... Battus aux penalties par les Ghanéens. Pauvre Chetali, pauvre Habacha; pas de chance pour le grand Tahar Chaïbi, pour Sassi et Abdelwahab Lahmar! Puis il y eut 1996, la finale que nous ne pouvions pas gagner en Afrique du Sud avec la présence de l'immense Nelson Mandela. Aucune chance ce jour-là : le peuple sud-africain voulait la coupe d'Afrique ! Accueillis en héros, pourtant, les El Ouaer, Sellimi, Beya, Ben Younès, Ghodhbane, feu Ben Rekhissa et... Sami Trabelsi. Comme on se retrouve! Parcours calamiteux, parcours en hausse, parcours et doute pour arriver au moment de vérité. Cette équipe, ce groupe est passé par toutes les épreuves et tous les états d'âme. Aujourd'hui pourtant, trêve de sentiments : on joue. Voyons comment se présente l'affaire. Mathlouthi est revenu au bon moment. Sûr et régulier, le gardien de l'Etoile est un atout de taille car un bon gardien, c'est toujours 50 pour cent d'une équipe. Sur ce plan bien précis, le onze tunisien part sur du solide. Un peu moins juste devant avec une défense indiscutable sur le plan individuel, un peu moins sur le plan collectif et surtout de la relance, essentiellement au niveau deux latéraux, mais aussi de l'axe central où Hagui et Abdennour ne sont pas, à proprement dire, des liberos classiques. D'où les critiques qui ont accompagné la configuration de l'entrejeu avec les deux pivots qui se doivent de compenser à ce niveau. On parle de repartir de Korbi qui reformera le duo de l'Espérance. La couverture sera importante mais attention : il faudra également aller chercher les Marocains dans leur zone pour espérer gagner et éviter la pression dans notre zone. Revoilà Chedly ? Devant, Chikhaoui, Dhaouadi et Saber Khlifa devraient être de la formation rentrante. Demeure un poste marquant: celui d'un troisième demi à associer à la paire Korbi-Traoui, ou alors un attaquant de soutien. Les deux favoris à cette onzième place, ce sont Adel Chedly et Youssef Msakni. Ce dernier n'ayant plus la cote comme avant à cause de son irrégularité sur le terrain et de certaines frasques en dehors, c'est donc le premier qui tient la corde. Bon techniquement et tactiquement, hargneux et gagneur, l'ex-sociétaire de Sochaux peut apporter le plus sur tous les plans, y compris celui de l'expérience. Et s'il nous refaisait la CAN 2004 et le Chan 2011, ce serait tout bénéfice. Demeure le fait que nous aurons en face un adversaire aux ambitions dévorantes et à la confiance retrouvée avec l'arrivée de Gerets. Le football marocain était dans le trou et semble s'en être sorti de belle manière. Mélange réussi de jeunes, de moins jeunes, de locaux et de professionnels à l'étranger qui jouent dans leurs clubs respectifs (ce n'est pas le cas de tous les nôtres), le Maroc sera un redoutable adversaire. Comme nous le saurons pour eux car à la minute où ils fouleront la pelouse, quelques souvenirs de vieilles batailles perdues face à ces diables de Tunisiens qui leur ont souvent fait des misères. Vous en voulez une preuve? La presse marocaine parle de la Tunisie comme d'un favori de la CAN. Laissons-les croire cela. Ça nous arrange !