A l'occasion de la visite du professeur James Robinson, de l'Université Harvard et coauteur avec Daron Acemoglu de l'ouvrage «Why Nations Fail?», le Centre tunisien de l'information économique organise, ce vendredi, à la Maison de l'entreprise, une table ronde autour du thème «Quel risque d'effondrement pour la Tunisie : fondamentaux et institutions». Le thème est pour le moins accrocheur. Sa formulation, fort maladroite, peut cependant choquer plus d'un. Que ceux, toutefois, qui pourraient être choqués se rassurent : on ne fait pas un si long voyage pour ne rien dire, surtout quand on est titulaire d'une chaire à Harvard! La nature des liens entre croissance et régime politique est depuis longtemps l'objet de vifs débats. Elle est au centre des travaux de recherche de J.Robinson. Cependant, en se penchant sur les institutions politiques, les économistes s'aventurent dans des domaines dont la complexité est avérée. «Toute société doit être organisée de telle sorte que les talents et l'ambition de tous ses membres puissent être encouragés», pose-t-il comme principe de base. De l'avis de M. Robinson, les économies inclusives sont capables d'utiliser au mieux les compétences. Au-delà des institutions économiques, il faut prévoir des institutions politiques inclusives. Il faut ainsi une distribution très large du pouvoir politique, c'est-à-dire un pluralisme politique et social, ainsi qu'un Etat centralisé. Le propos est fort instructif par ces temps où il est encore et toujours question, à l'échelle nationale, de remaniement ministériel, d'ouverture de la troïka au pouvoir à d'autres partis politiques et à la société civile. Une configuration de l'exécutif où le facteur compétence semble avoir depuis peu la cote. Reste que la thèse de Robinson rayonne tout autant sur tout ce qui a trait au processus de prise de décision en matière de développement économique et social. Elle intègre également cette nécessité de faire participer le plus grand nombre à la dynamique de développement. Inclusive, elle s'élève en quelque sorte contre tout diktat d'une minorité et d'une élite quelle qu'en soit la nature. Il est à cet égard heureux de relever que la nouvelle vision qu'a aujourd'hui le gouvernement en matière de développement régional tend à conférer aux régions une certaine autonomie dans la définition de leurs priorités de développement ainsi qu'une autonomie dans la gestion de leurs ressources. Cette vision s'inscrit dans le droit fil des principes de la démocratie directe. Elle pose surtout un principe de subsidiarité. Principe au nom duquel «ce qui peut être mieux fait à l'échelle régionale doit prioritairement être fait par la région elle-même». Cela va bien au-delà de la politique de décentralisation.