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«La commune est à la démocratie ce que l'école primaire est à la science»
Notre dossier : Décentralisation - Entretien avec : Mustapha Ben Letaief, professeur agrégé de droit public
Publié dans La Presse de Tunisie le 08 - 10 - 2012

Les questions liées à la mise en œuvre d'un processus de décentralisation sont nombreuses et diffèrent d'un pays à l'autre, en fonction des spécificités historiques, économiques, sociales et civilisationnelles de chaque nation. En Tunisie, l'on peine encore à faire la différence entre décentralisation et déconcentration, tout autant que l'on s'interroge souvent sur la nature du découpage économique et politique à faire et sur les compétences à décentraliser. A ce propos, M.Mustapha Letaief, professeur agrégé de droit public à la faculté de Droit de Tunis et à l'Ecole nationale d'administration et ancien membre du comité des experts au sein de la Haute Instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique ainsi qu'au sein de l'Instance nationale de réforme de l'information et de la communication, a bien voulu nous apporter bien des éclairages. Interview.
Quelle différence voyez-vous entre décentralisation et déconcentration ?
Ce sont deux modes d'organisation de l'administration territoriales qui sont complètement différents quant à leur logique, à leurs finalités et à leurs procédés. Traditionnellement, la déconcentration est une modalité allégée de la centralisation qui vient du constat qu'on ne peut tout gérer depuis le centre et que l'administration a besoin , ne serait-ce que pour sa propre légitimité, d'être plus proche des administrés ou des citoyens. Les structures déconcentrées sont représentées par des représentants du pouvoir central. Ce sont des structures nommées qui se manifestent dans l'organisation administrative tunisienne actuelle par les gouverneurs, les délégués, les omdas et encore par les services extérieurs des ministères (les directions régionales de l'équipement, de la santé, etc.). Ce sont donc en réalité des structures qui sont une émanation du pouvoir central, qui n'ont aucune autonomie par rapport au centre. Elles n'ont pas une légitimité autre que celle du centre et n'ont pas à rendre compte à la population puisqu'elles sont nommées et n'ont pas de personnalité juridique. Elles n'ont pas non plus d'indépendance financière. Cela nous amène à dire qu'il s'agit là d'une pénétration territoriale du pouvoir central. Historiquement, la logique de la déconcentration est une logique absolument sécuritaire qui consiste à mieux pénétrer le territoire afin de mieux le contrôler. Dans la logique même de la déconcentration il y a un rejet de l'idée d'autonomie ou d'indépendance locales. D'ailleurs, on est passé de 13 gouvernorats fin des années 62 début des années 70 à 24 aujourd'hui et c'était toujours la logique de diviser davantage pour mieux contrôler. Par exemple, Gafsa qui faisait à l'époque un grand gouvernorat du sud-ouest était divisé en trois gouvernorats : Tozeur, Sidi Bouzid et Gafsa. La même chose pour le gouvernorat de Sousse qui a été divisé entre trois gouvernorats, à savoir, Monastir, Mahdia et Sousse, dès qu'il est devenu difficile à contrôler.
La décentralisation est néanmoins aux antipodes de cette logique. Elle est une forme de contre-pouvoir par rapport au centre. Dans sa logique démocratique, elle repose sur des structures élues et jouit ainsi d'une légitimité électorale. L'on parle ici de la légitimité de la base et non pas de celle du sommet. Dans cette perspective, les élus sont censés représenter et défendre les intérêts des citoyens à la base vis-à-vis du pouvoir central. Une structure décentralisée suppose de là une personnalité juridique, c'est-à-dire la capacité juridique de prendre des décisions, de gérer de manière autonome et d'avoir son budget et ses recettes propres. L'autre spécificité de la décentralisation est qu'elle n'est pas soumise à un contrôle hiérarchique (on ne contrôle pas l'opportunité de la décision). Contrairement à la structure déconcentrée où le contrôle est assuré par le supérieur hiérarchique qui est le ministre. Dans le cas d'une structure décentralisée, il est limité à l'aspect légal.
L'on parle parfois de différents types de décentralisation. Lesquels ?
Dans le monde Il y a deux modèles de décentralisation. Le premier modèle est formel et considère la décentralisation comme une simple modalité d'organisation administrative. Le deuxième modèle consiste en une conception substantielle de la décentralisation qui fait du pouvoir décentralisé un véritable pouvoir local qui a les moyens et le pouvoir de décision pour mettre en place les politiques locales susceptibles de promouvoir le développement régional. Avec ce modèle de décentralisation, il faut dire qu'on est confronté à certaines difficultés. C'est que traditionnellement les collectivités locales et régionales ont manqué de ressources humaines compétentes. En effet, tous les hauts fonctionnaires et les meilleures compétences préfèrent s'installer à Tunis et dans certaines villes côtières. Ajoutons le manque de ressources financières et l'insuffisance des fiscalités. On a donc un héritage lourd qui fait que la décentralisation soit un discours sans réalité, faute de moyens, de volonté politique et faute de culture aussi.
L'une des problématiques qui se posent en abordant la question de la décentralisation, se rapporte essentiellement au découpage économique et politique du territoire. Comment voyez-vous la chose ?
Il y a plusieurs propositions. Mais, il est clair aujourd'hui que nous avons besoin, je l'ai déjà dit devant la Commission des collectivités publiques locales et régionales à l'ANC, de revoir la place du gouvernorat dans le découpage actuel. On mélange encore décentralisation et déconcentration. Dans le cadre juridique et l'organisation actuels, le gouvernorat est à la fois une structure déconcentrée, donc un prolongement du pouvoir central et une collectivité territoriale décentralisée. Il y a besoin de nos jours de distinguer gouvernorat et région, vu que le premier est encore géré par un conseil régional. Que le gouvernement reste à l'image un peu du département, c'est-à-dire une structure déconcentrée qui est un prolongement du pouvoir central. Mais, qu'on crée des régions qui ont suffisamment de taille géographique, sociologique, humaine et économique pour pouvoir mettre en place des politiques régionales efficaces et viables. Ces régions doivent avoir des conseils régionaux élus qui ont une autonomie réelle et un pouvoir de décision. De plus, il faut revoir la constitution de la commune et de son rôle, tout en gardant à l'esprit ce qu'a dit l'un des grands spécialistes de cette matière au XIXe siècle : «La commune est à la démocratie ce qu'est l'école primaire à la science».
Il y a un troisième niveau auquel il faudra penser. Dans le projet de Constitution, ils parlent de district, mais, moi, j'ai défendu l'idée de pôles ou de grandes agglomérations urbaines. Si on peut créer une structure qui gère tout l'espace Grand-Tunis, c'est-à-dire les communes des quatre gouvernorats faisant la totalité de cet espace (une démarche est adoptée par d'autres pays comme les Etats-Unis et la Grande Bretagne), on peut réaliser des économies de moyens, un partenariat solide entre les différentes communes de cette grande agglomération. Cela permet de mettre en place une réelle harmonie de l'expansion du tissu urbain, une cohérence et une complémentarité génératrice de plus d'efficacité au niveau du service public rendu au citoyen. Et de mieux affronter les problèmes énormes auxquels est confronté l'espace urbain : l'habitat anarchique, la saleté, la médiocrité des services, l'assainissement, etc.
Quelles seraient les compétences à décentraliser, selon vous ?
Il faudrait d'abord commencer par faire le constat. Personnellement, quand j'ai travaillé le chapitre Afrique dans le premier rapport mondial sur la décentralisation et la démocratie locale, je me suis rendu compte, en regardant le tableau comparatif du rapport, que les communes tunisiennes sont parmi les communes ou les collectivités locales et régionales qui ont le moins de compétences et d'attributions en Afrique. En réalité les communes gèrent très peu de choses. L'assainissement est géré par l'Onas, l'électrification par la Steg, le transport soit par les sociétés régionales soit par les compagnies nationales, l'école primaire par le ministère de l'Education, le dispensaire par le ministère de la Santé. L'on entend par cela que beaucoup de services sont directement gérés par le centre. Les communes ont donc des attributions assez limitées. Aujourd'hui, les compétences à transférer à ces communes sont nombreuses. D'ailleurs, il serait hasardeux de lancer une série comme ça car j'en oublierais certainement beaucoup. Mais l'on sait que dans les démocraties consolidées, le principe qui est adopté et qui est d'origine allemande, au fait, vu que l'Allemagne est un pays très décentralisé, est le principe de subsidiarité. Ce principe stipule que toutes les compétences soient transférées au niveau le plus proche du citoyen et que le pouvoir du centre n'intervient qu'à titre subsidiaire. C'est que la compétence de principe au niveau le plus proche du citoyen doit intervenir sur la base de ce qu'on appelle la démocratie de proximité et que le pouvoir central n'intervient que lorsqu'il y a des activités qui dépassent le périmètre local. Dans ce sens, l'aménagement du territoire national peut relever de la compétence du centre, par évidence.
Toutefois, il faut reconnaître que ces démarches peuvent être confrontées à certaines difficultés. Sur ce point, sans être bourguibien, je crois que Bourguiba avait raison, en disant que dans notre pays, le phénomène régionaliste est une réelle menace à l'union nationale. En observant l'actualité régionale aujourd'hui, l'on constate que dans certaines régions, on exige la propriété du pétrole, dans d'autres on revendique la propriété des phosphates. Au nord, l'on revendique la constitution d'un gouvernorat en partant d'une logique tribale. C'est une preuve que le phénomène persiste. De ce fait, pour faire face à ce phénomène dangereux à l'ère de la mondialisation et pour éviter de se disloquer davantage là où les coalitions politiques et économiques se multiplient sur le plan international (l'Union européenne essaie de mettre sur pied un seul Etat fédéral), le principe de subsidiarité doit être mis en place avec beaucoup de prudence. Il nous faut bien des garde-fous. Il nous faut une orientation, où l'on réalise que le local est le plus proche des réalités et le plus susceptible d'être le plus efficace. Mais le local, tout en préservant, le fondement même de la décentralisation qui est d'assurer un équilibre entre le respect des spécificités locales et régionales et l'autonomie régionale est la garantie de l'unité du pays. Une unité qui doit être garantie sans pour autant toucher à la diversité locale. L'équation ne peut réussir qu'en prenant en considération ces deux éléments de l'équation. Il faut opérer en sorte que toutes les composantes du territoire national soient solidaires, et ce, par le biais d'une démocratie participative entretenue à la base.
La Commission des collectivités publiques locales et régionales vient de mettre en place les textes de loi relatifs aux grandes lignes du processus de décentralisation à entreprendre. Que pensez-vous de son travail ?
Généralement, on peut admettre que le travail fait jusque-là est très respectable. Le projet dans l'ensemble est bon. Certains points sont intéressants. Sauf que l'on remarque certains problèmes de rédaction. Je pense que le projet est assez mal rédigé, dans le sens où il y a des articles qu'on peut regrouper dans un seul. Ce faisant, au lieu d'avoir un projet de 13 ou 14 articles, on aurait pu avoir uniquement 8 ou 9 articles. Puis, je n'ai pas trop bien vu ce qu'ils veulent dire par district. Est-ce dans le sens de région ou bien d'une répartition géographique à l'instar des pays de l'Orient ? Je pense qu'il y a un besoin de clarification sur ce point-là. La répartition des compétences est aussi mal formulée, puisqu'ils parlent notamment de compétences transférées et de compétences partagées avec le centre. Or il convient de dire des compétences propres et des compétences transférées. L'on compte également un manque critiquable. C'est qu'on n'a nulle part mentionné les besoins de cette démocratie participative. Quand on n'a une révolution qui a eu lieu contre l'exclusion et la marginalisation, il devient impératif de mettre en place une démocratie participative qui doit être mentionnée dans la Constitution.
Propos recueillis par M.H. ABDELLAOUI
M.Imed Hammami (président de la Commission des collectivités publiques locales et régionales à l'ANC) : Un travail de longue haleine
La Commission des collectivités publiques locales et régionales opérant au sein de l'Assemblée nationale constituante est, selon son président M.Imed Hammami Ennahdha, consciente des enjeux et des défis d'une orientation politique dont la réalisation nécessite un travail de longue haleine. Dans ce sens, M.Hammami, récemment rencontré à Tunis, fait remarquer que la première esquisse relative aux articles portant sur la question de la décentralisation a été positivement évaluée par la Commission de coordination et d'élaboration de l'ANC. «Notre Commission compte 22 membres appartenant à plusieurs sensibilités politiques et a commencé le travail depuis le 13 février 2012 pour présenter sa première conception le 6 août dernier. Il s'agit de 13 articles, réduits après avoir été examinés par la Commission de coordination et d'élaboration, à 11 articles. Le contenu que nous avons proposé n'a pas fait l'objet de grandes modifications, à l'exception d'un article qui a été transféré à la compétence juridique pour en dire son mot. Cet article se rapporte, en effet, au différend portant sur la spécialisation entre les collectivités locales elles-mêmes ou encore avec le pouvoir central ».
Afin de s'enquérir du degré de satisfaction des citoyens de cette première esquisse du projet relatif à la décentralisation, la commission des collectivités publiques locales et régionales entreprendra prochainement un débat national durant trois semaines. « Pendant cette période, nous essayerons de visiter le maximum de régions où nous mènerons un dialogue ouvert avec les citoyens sur leurs propres attentes et aspirations quant à l'adoption de cette nouvelle orientation politique », a-t-il clarifié.
M.Hammami pense également que d'ici le début de la nouvelle année, le chapitre relatif à la décentralisation dans le projet de la Constitution sera devant la partie concernée dans sa version revue au moins deux fois par la Commission de tutelle.
Débattant des différentes étapes précédant l'élaboration du premier projet, il indique que la Commission a de prime abord fixé une méthodologie de travail alliant débats et visites sur le terrain. Et ce en gardant à l'esprit que la question des collectivités locales était à l'origine du déclenchement de la révolution populaire du 14 janvier. «Dans cet ordre d'idées, il faut dire que durant et après la révolution, bon nombre de citoyens ont attaqué non seulement les postes de police et bien d'autres administrations représentant le pouvoir central, mais aussi les municipalités. Cela prouve que la relation citoyen-municipalité a été empoisonnée par le régime déchu. D'où la nécessité d'un grand travail qui doit être fait sur le double plan juridique et pédagogique afin de restaurer la confiance ». Dans cette optique, il a été procédé, relève-t-il, au changement de l'appellation du chapitre en question dans le projet de la Constitution pour devenir «Chapitre du pouvoir local» après avoir été désigné par l'expression «Chapitre des collectivités locales».
Dans l'objectif de mieux rassurer les citoyens directement concernés par la décentralisation, il a été également procédé à une formulation claire dans le projet des principes de l'autonomie financière et de décision et du passage par les élections pour la désignation des membres de ces collectivités locales. Il y a, en outre, des articles qui stipulent que les collectivités locales jouissent d'un pouvoir décisionnel leur permettant de concevoir le modèle de développement qui va de pair avec leurs spécificités géographiques, économiques et culturelles. Mais, qu'elles obéissent au contrôle régulier de la Cour des comptes afin de lutter contre le détournement des dépenses publiques.
S'attardant sur les différentes expériences internationales consultées par la Commission des collectivités publiques locales et régionales afin de s'en inspirer, M.Imed affirme que les expériences les plus réussies dans le monde, telles que celles des Etats-Unis d'Amérique, du Brésil, du Royaume-Uni, d'Allemagne, du Portugal, de l'Afrique du Sud et du Maroc peuvent servir de flambeaux pour l'expérience tunisienne. Sans qu'il y ait une intention de les transposer telles quelles en Tunisie, compte tenu des données géographiques, économiques et civilisationnelles du pays.
Abdeljalil Bédoui (économiste et vice-président du Parti Al Massar) : La volonté politique fait toujours défaut
En parlant de la décentralisation comme étant un choix politique sine qua non pour l'essor des régions, M. Abdeljalil Bédoui, économiste et vice-président du Parti Al-Massar, ne mâche pas ses mots, brossant ainsi un tableau noir. Pour lui, du temps du régime déchu, la volonté politique faisait défaut dans un pays où l'on a constamment cultivé la logique de la pensée unique. « Pendant les années écoulées, le pouvoir central réalisait des études juste pour jeter de la poudre aux yeux, ou encore pour avoir une fausse autosatisfaction. Aujourd'hui, la question est abordée en l'absence de diagnostics réels et d'études menées par des experts. Autrement dit, l'on n'est pas sorti même après la révolution de la sphère de l'improvisation politique ».
M.Bédoui considère de même que la réalisation d'un processus de décentralisation réussi suscite une certaine marge de manœuvre dans la recherche. Laquelle marge, fait-il observer, permet aux experts et chercheurs d'élaborer la feuille de route qu'il faut, sans contrainte aucune.
Comme il le pense, même la déconcentration au vrai sens du terme n'a pas eu lieu en Tunisie, puisque tous les ministères ont créé des bureaux et des représentations dans les régions sans jamais leur donner le moindre pouvoir décisionnel. «Vue sous cet angle, l'expérience vécue en Tunisie est loin d'être assimilée à une déconcentration. Il s'agit néanmoins d'une simple délocalisation. Car la déconcentration suppose une certaine autonomie, quoiqu'elle soit minime, en matière de prise de décision ».
L'économiste et vice-président du Parti «Al Massar» avance, dans la même optique, que les conditions favorables à un vrai processus de décentralisation reste très limitées. «Cette orientation est la résultante de l'urgence de la question politique. Toutefois, en l'absence de programmes des divers acteurs politiques en place, on ne peut pas s'attendre à grand-chose. En effet, dans une étude que j'ai récemment réalisée sur le gouvernorat de Gafsa, je me suis rendu compte que les régions intérieures ne disposent pas, du moins jusqu'à présent, des outils et facteurs garantissant la réussite de cette orientation».
Selon le même interlocuteur, une collectivité locale ne peut prétendre à une véritable autonomie en l'absence d'un personnel suffisamment nombreux et qualifié pour répondre aux demandes des administrés et gérer efficacement les tâches complexes que requiert le développement de chaque circonscription. « L'absence de structures institutionnelles et administratives et d'une société civile vivace et dynamique sont des handicaps pesants. Mais comment voulez-vous qu'une telle orientation réussisse avec un gouvernement dont les composantes n'arrivent toujours pas à s'accorder sur le partage du gâteau ? », s'interroge-t-il ?


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