Par Abdelhamid GMATI La 3e réunion du dialogue national, initié par le président de la République, a été suspendue vendredi et reportée à lundi. Motif: certains partis ont exigé la participation d'autres partis (Al Massar, le Front populaire) et de l'Ugtt. Laquelle a déjà annoncé son refus, rappelant son initiative qui avait réuni plusieurs partis, tenu plusieurs réunions, puis a été ignorée. On ne sait si la centrale syndicale reviendra sur sa décision et consentira à rejoindre les autres. Ce dialogue qui avait entretenu beaucoup d'espoir semble mal parti. Outre cet obstacle, plusieurs objets de litiges risquent de compromettre définitivement ce processus; et on remettra indéfiniment à des dates de plus en plus incertaines ce processus destiné à parvenir à un consensus. Cette remise au lendemain de l'examen de questions litigieuses semble devenir générale. A l'ANC, la séance plénière de vendredi a été reportée à mardi prochain faute de consensus entre les présidents des blocs parlementaires sur la composition de l'Instance provisoire de l'ordre judiciaire (article 6). Les députés ont d'ailleurs pris l'habitude d'ajourner leurs discussions, aussi bien au sein des commissions qu'en séances plénières, sur plusieurs sujets. Où en est-on avec le projet de Constitution maintes fois annoncé et plusieurs fois ajourné ? M. Mustapha Ben Jaâfa r, président de cette Assemblée, a bien tenté de présenter un calendrier des travaux de l'Assemblée tenant, entre autres, à la fin de ce mois d'avril la présentation du texte de la Constitution. Au vu du nombre d'articles litigieux, il serait étonnant que ce projet soit prêt dans ces délais. On nous dit qu'il y a eu accord sur les dates des élections prévues pour la fin du mois de décembre, au plus tard. Soit; mais comment peut-on les organiser lorsque les textes nécessaires, outre la Loi fondamentale, ne sont pas finalisés ? Qu'en est-il du régime politique, du code électoral, de l'Isie, des instances indépendantes concernant l'indépendance de la justice, de la presse, etc.? Autre ajournement : le texte de la demande d'exemption du président provisoire de la République de ses fonctions, signé par 76 des 217 députés de l'Assemblée nationale constituante, et reporté pour demain lundi 22 avril. Un rapport sera rédigé et la date de la tenue d'une séance plénière pour trancher dans ce dossier sera annoncée. Il ne faut pas croire que nos députés ne font rien; bien au contraire, ils débattent, ils discutent et ils s'invectivent avec véhémence . Le dernier sujet en date du vendredi dernier : un projet portant sur les indemnités des députés. Le député Mongi Rahoui, du Watad, a affirmé que le mouvement Ennahdha est très soucieux d'accélérer l'augmentation des rémunérations des députés, soulignant que la 1ère vice-présidente de l'Assemblée nationale constituante, Meherzia Laâbidi, vient d'obtenir un rappel de 37.000 dinars. Il a affirmé détenir des preuves irréfutables qui dénoncent l'opportunisme de certains des électeurs au sein de l'Assemblée nationale constituante, spécialement ceux du parti Ennahdha, dont des PV où le représentant des élus d'Ennahdha réclamait des primes pour les députés pour l'achat de voitures. Il a spécifié que ses collègues de l'ANC ont été gratifiés, au cours des 18 derniers mois, d'une augmentation variant entre 7.000 et 8.000 dinars par élu. Ce qui lui a valu des protestations et des insultes de la part des élus de plusieurs partis. Sahbi Atig, le président du bloc d'Ennahdha, a considéré qu'il s'agit d'informations erronées vu que ce projet de loi émane du gouvernement et non pas du parti Ennahdha, alors qu'une députée d'Ennahdha l'a traité de «chien». La séance a été levée mais le «crêpage de chignons» a continué. On comprend que nos députés soient très occupés par les affaires du pays. Au ministère de l'Intérieur, on se préoccupe de l'assassinat de feu Chokri Belaïd. 18 enquêteurs et 68 agents sont aux trousses des assassins. Il y a quelques jours, les portraits des présumés coupables étaient publiés avec appel à la population. Au lendemain du meurtre, il y a quelque deux mois, le ministre de l'Intérieur faisait état d'arrestations et recherche d'un autre individu en fuite. C'est-à-dire qu'on n'a encore rien de tangible surtout sur les commanditaires d'un tel meurtre. Attendons donc. On attend toujours des solutions aux problèmes épineux, comme le chômage, le développement régional, la situation économique et financière, les problèmes des phosphates et du tourisme, la cherté de la vie, l'éducation, les écoles coraniques, les mosquées, le jihad, les jeunes envoyés en Syrie, etc. Il faut donc croire que nos responsables sont tous atteints par «la procrastination», ce mal qui fait que l'on remette au lendemain ce que l'on peut accomplir aujourd'hui. Par paresse, par manque de motivation ou par volonté délibérée pour des motifs cachés. Il y a quelques jours, M. Abderrahmane Ladgham, ministre de la Gouvernance et de la lutte contre la corruption, affirmait : «Nous allons éliminer la mentalité du ‘‘revenez demain'' de l'administration qui ajoute à la bureaucratie et retarde les intérêts du contribuable». Il a raison de vouloir s'opposer aux «retardataires chroniques». Et il serait bien inspiré de commencer par nos gouvernants, à l'ANC, au gouvernement, dans les régions et... devant sa porte.