«Dans une économie d'urgence, nous n'avons d'autres choix que de s'endetter», renchérit le gouverneur de la BCT Le montant du prêt contracté auprès du FMI s'élève à 400% de la quote-part de la Tunisie dans le capital du FMI, soit 2,7 milliards de dinars, remboursable sur 5 ans avec un taux d'intérêt de 1,07% Lever des fonds auprès du Fonds monétaire international (FMI) ne cesse de susciter de larges contestations. Hier, sous l'hémicycle de l'Assemblée nationale constituante, les constituants ont formulé des reproches d'ordre procédural et technique à cette opération de crédit «stand-by». Selon certains, la liste des réformes adossées à cette demande de crédit est dictée par le FMI. Et selon d'autres, l'Etat aurait pu traiter, autrement, la crise dans le bassin minier et générer cette enveloppe contractée par les exportations des phosphates et de ses dérivés. Ainsi, le débat a dépassé les conditions de crédits, notamment de taux et de période de remboursement, ainsi que le besoin de l'économie à ce financement pour emprunter des pistes politisées. En effet, plusieurs interventions, notamment du parti majotritaire au pouvoir, ont diabolisé les grèves et les sit-in. L'un des députés a poussé encore plus loin pour qualifier ces mouvements de «terrorisme économique». Ils ont critiqué, également, ceux qui saluent la dernière intervention musclée des forces de l'ordre contre «Ansar Echaria» alors qu'ils soutiennent les grèves et les sit-in, notamment au bassin minier. Sur un autre plan, plusieurs de ces députés ont rappelé que le recours aux produits de la finance islamique, notamment les «Soukouk», permet de lever des fonds considérables, «sans taux d'intérêts et qui n'aggravent pas le taux d'endettement», estime l'un d'eux. De l'autre côté, les constituants se sont interrogés sur les répercussions d'une réforme du système de compensation sur les ménages. Ces réformes dictées par le FMI, comme le qualifient plusieurs, portent atteinte à la souveraineté de l'Etat. D'autant plus que les audits et les plans de restructuration douloureux conséquents des entreprises publiques, à l'instar de la Steg et la Stir, aggraveraient la situation financière et sociale de ces entreprises. Dans cette lignée, M. Salah Chouaïeb a souligné qu'il fallait restructurer les entreprises et surtout les ministères avant de s'endetter. L'endettement, estime-t-il, est un financement de dernier recours, après les recettes fiscales et les bénéfices des entreprises publiques. Une députée du CPR a rappelé qu'une mission du FMI s'est déplacée en Tunisie pour préparer tout ce travail. «Qui a préparé ce programme de réformes? Et quand? Pourquoi les partis politiques et la société civile n'ont pas été mis au courant des travaux de réformes?», s'est-elle interrogée. Pour sa part, le gouverneur de la BCT a soutenu la thèse selon laquelle l'endettement est un levier de croissance. Il a rappelé que la réalisation d'un taux de croissance de 4% nécessite de porter le taux d'investissement à 24% du PIB. Pour ce faire, il faut recourir à l'endettement pour compléter la contribution de l'épargne nationale, de seulement 15%, dans le financement des projets. Dans une économie d'urgence, renchérit-il, nous n'avons d'autres choix que de nous endetter. Rassurant, M. Elyes Fakhfakh, ministre des Finances, estime que le crédit du FMI est un message fort aux investisseurs et aux bailleurs de fonds. Par ailleurs, en raison des pressions exercées sur la balance de paiement qui a généré une baisse continue des réserves en devises ainsi que la dégradation de la note de la Tunisie, toute sortie sur les marchés financiers internationaux est devenue aussi délicate que coûteuse. «Face à cette situation, la Tunisie s'est adressée au FMI pour lever des fonds considérables mais aussi émettre un fort message aux investisseurs et aux bailleurs de fonds en termes d'engagement de la Tunisie dans des réformes économiques et financières susceptibles de préserver les équilibres financiers et assurer une relance économique», rappelle-t-il. Il est à rappeler que le montant de ce prêt s'élève à 400% de la quote-part de la Tunisie dans le capital du FMI, soit 2,7 milliards de dinars, remboursable sur 5 ans avec un taux d'intérêt de 1,07%.