La capacité des navires est-elle en mesure de répondre à la demande des opérateurs au double niveau de l'importation et de l'exportation ? La CTN a établi des lignes régulières en Méditerranée pour le transport des marchandises pour toucher les ports de Marseille, de Gênes, de Livourne et de Barcelone, soit 18 départs par jour dans les deux sens. Aussi, cinq unités navales RoRo sont déployées pour satisfaire les besoins. La compagnie est propriétaire des 80% des navires alors que les 20% restants sont affrêtés. Nous disposons également de 810 remorques. Cela signifie que la capacité disponible répond largement à la demande et il y a même un déséquilibre au milieu de la semaine puisque l'offre est plus importante que la demande. Le samedi, la demande est plus significative avec un taux d'occupation variant entre 40 et 50% en moyenne. Le samedi, on charge près de 370 remorques sans compter la compagnie française qui opère sur la même ligne. Et qu'en est-il de la qualité de service? Les opérateurs économiques sont-ils vraiment satisfaits des prestations? La compagnie essaye de faire de son mieux pour présenter les meilleurs services à ses clients. Nous avons des témoignages des opérateurs français, hollandais et belges qui reconnaissent la bonne qualité de service offerte et qui s'explique par la ponctualité, le délai de voyage très court en rapport avec les concurrents. Mais la CTN n'opère pas seule dans le port car il y a d'autres partenaires comme ceux qui sont chargés de la manutention et de l'acconage qui relèvent de la Société tunisienne de l'acconage et la manutention (STAM). Des problèmes sociaux, comme les grèves ou un manque d'équipement à ce niveau, peuvent se répercuter sur la qualité. Notre société dispose d'un programme de renforcement des moyens de travail. Au cours de la révolution et même après, en dépit des troubles dans le pays, et malgré le couvre-feu, tous les services de la compagnie ont poursuivi leurs activités. Des clients qui exportent vers certains pays d'Europe comme l'Allemange ainsi que le Groupe Leoni ont pu exploiter nos services sans problèmes. Nous avons l'obligation de servir l'économie nationale dans tous les cas. Cependant, certains opérateurs étrangers ne veulent pas encore venir estimant que le climat d'insécurité ne les encourage pas à investir et à utiliser, par conséquent, le fret maritime. Le manque de chargement des entreprises tunisiennes et étrangères fait bien sûr perdre à la compagnie de l'argent. Les investisseurs demandent en premier la visibilité politique pour qu'ils puissent s'installer en Tunisie. Nous espérons l'amélioration de la situation économique au cours de la période à venir pour que les activités économiques des entreprises soient plus dynamiques et l'utilisation du fret maritime renforcée. Et au niveau de la concurrence avec les compagnies étrangères, êtes-vous préparés pour affronter les défis de la qualité? Sur la ligne de l'Italie, on compte au moins trois transporteurs concurrents aussi bien pour le transport des passagers que pour celui des marchandises avec remorques et conteneurs. A une certaine période, les transporteurs européens bénéficiaient d'une subvention de l'Union européenne dans le cadre de ce qu'ils appellent les autoroutes de la mer, ce qui leur permet de partiquer des prix très compétitifs. Une concurrence déloyale a été constatée au niveau de certaines compagnies concurrentes à un certain moment. Or, les charges du fret maritime ne cessent de s'alourdir et le carburant représente, à lui seul, 35 à 40% des charges de notre compagnie qui pratique des prix en fonction de plusieurs paramètres dont les charges portuaires, le combustible, le délai poste... Il est tenu compte également des prix pratiqués sur le marché par les autres compagnies. Non seulement nous devons proposer des prix compétitifs mais nous consentons un rabais de 30% par rapport au tarif normal pour l'exportation des produits agricoles comme les agrumes, les dattes, les pastèques au cours de cette saison estivale, les tomates. D'autre part, la compagnie assure un transport totalement gratuit pour les équipements, matériel ou produits destinés à des associations sociales dans le cadre des dons pour les personnes à besoins spécifiques. C'est une opération qui se poursuit tout au long de l'année. La compagnie est pourtant appelée à réaliser ses équilibres financiers... La compagnie cherche, en effet, à réaliser son équilibre financier même si les résultats d'exploitation de l'exercice 2012 sont négatifs vu la diminution des quantités importées et exportées, mais ils sont meilleurs que ceux de l'année précédente. Pour 2013, l'objectif est de réaliser des bénéfices et les signes sont déjà bons même si le tarif a stagné et a même baissé pour certaines catégories de transport. Les compagnies concurrentes pratiquent des prix similaires aux nôtres ou plus bas. Par le passé, la compagnie nationale n'avait pas de concurrents aussi puissants et bénéficiait même des avantages de l'Accord tarifaire conclu dans le cadre de la conférence Tunisie-France. Depuis 1998, cet Accord n'est plus en vigueur et chaque pays doit fixer ses propres tarifs. Sur la ligne de l'Espagne, on a deux concurrents directs et deux indirects. L'environnement concurrentiel est donc très agressif alors que la compagnie nationale est appelée à honorer ses engagements et à atteindre ses objectifs. Avez-vous une stratégie pour développer de nouvelles lignes régulières ? Une ligne maritime a été déjà mise en service entre la Tunisie et la Libye en janvier 2013 suite à une demande du ministère de tutelle. Un tel choix est motivé par la fermeture pendant quelque temps du passage de Ras Jédir entre les deux pays. Cependant, le nombre limité des exportateurs tunisiens vers ce pays ne permet pas de rentabiliser la ligne. Cette rentabilité peut se concrétiser à la faveur d'un plan d'action adéquat d'autant plus que le ministère du Transport veut nous aider dans ce sens. En plus, l'attente des navires tunisiens qui arrivent en Libye dans le large (car elles ne disposent pas d'un poste acquis) le temps qu'un poste soit vacant peut léser les clients et fait perdre de l'énergie. L'idée est de développer le fret maritime à l'avenir avec d'autres pays comme l'Egypte avec qui nous avons des discussions, ainsi qu'avec le Maroc en plus d'une coopération possible avec la Turquie. Par le passé, nous avions eu une ligne subventionnée avec l'Afrique pour importer et exporter des produits comme le bois et rendre service aux sociétés de commerce international. Le voyage prenait beaucoup de temps avec des risques certains, ce qui a motivé sa suppression faute de rentabilité aussi. Pour renforcer l'offre, deux navires ont été acquis en 2010 en l'occurrence Amilcar et Elyssa. On espère, enfin que la situation économique s'améliore à l'avenir pour encourager les investisseurs à venir en Tunisie, ce qui permettra de booster le fret maritime de la CTN qui a acquis une tradition dans ce domaine.