Gros échec de la sélection des locaux dans son aventure du CHAN. Si le but recherché de ces deux rencontres face au Maroc consistait à élargir la base de l'effectif de l'équipe nationale «A», comme on a pu l'entendre, on choisirait un contexte moins pénalisant pour le prestige du foot national. Car on a entendu certaines justifications proprement ahurissantes consistant à dire qu'après cette sortie, le choix en sélection s'est enrichi de deux ou trois nouveaux joueurs. Comme pour justifier l'injustifiable. Si brader le CHAN n'inquiète pas outre mesure les autorités du football, pourquoi se faire toute cette peine et prolonger encore plus une interminable saison et ses souffrances à des joueurs qui n'auront plus le temps de souffler et de récupérer cet été? Le CHAN pour laboratoire? Autant y aller franchement en avouant clairement ses choix. Nos amis algériens se sont tout simplement retirés de cette compétition, déclarant d'avance forfait face à la Libye dans ce seul tour qualificatif pour la phase finale prévue du 10 janvier au 1er février 2014 au pays de Mandela. Pour mieux se concentrer sur les éliminatoires de la coupe du monde. Sans salamalecs ni faux-fuyants. Sans chichis ni détours. Sans énergie ni argent dépensés inutilement. De toutes façons, du point de vue état d'esprit, investissement et préparation, ce n'était pas le top. On a rassemblé un ensemble hétéroclite durant une semaine sans aucun match-test pour rôder un tantinet les automatismes. Et bonjour la galère. Le Maroc était pourtant samedi loin de rappeler les grandes cuvées d'antan, ce qui conforte la thèse d'une réelle crise de qualité du foot chérifien. L'excellent Youssef Keddioui tentait de prendre en main la manœuvre, mais il parut souvent prêcher dans le désert. Les Aigles de Carthage ont manqué de tranchant, de spontanéité et parfois de jus pour forcer la décision. Partie avec trois attaquants : Ben Youssef à droite, Sassi à gauche et Mhirsi dans l'axe, l'attaque sembla timorée. Elle eut quatre ou cinq occasions pourtant mal conclues, souvent par des frappes hors du cadre. A l'image d'un Mossaâb Sassi qui se signala par un bel esprit d'entreprise mais aussi par un manque flagrant de réalisme. Ou d'un Driss Mhirsi, très actif et généreux à souhait mais parfois individualiste et brouillon. Il y eut même jusqu'à Fakhreddine Ben Youssef qui parut stéréotypé et tourner en rond. Mais il faut avouer que certains joueurs sont vraiment au bout du rouleau. Les Samah Derbali et Ferjani Sassi notamment. Le premier rechigna à apporter son soutien habituel en phase offensive, surtout dans les premières 45 minutes, alors que le second parut parfois submergé par le milieu marocain. Le dépit du public Mais c'est surtout la défense qui trahit les plus grosses lacunes. Les latéraux se faisaient souvent surprendre par des ballons dans leur dos, alors que la charnière manquait de complémentarité et de rigueur. Des avertissements, les hommes de Rachid Taoussi en ont lancé pourtant sur la durée de la rencontre: à la 22e minute lorsque Keddioui perd son duel face à un irréprochable Ben Mustapha, et à la 50e lorsque le même Keddioui lance Hafidhi à la limite du hors jeu. Ce dernier voit son tir caresser le montant. Les Aigles l'ont échappé belle. La chance les abandonnera pourtant à la toute dernière minute lorsque tout le monde monta en attaque, lorsqu'on sous-estima le danger représenté par un Maroc réduit à neuf certes, mais capable de porter l'estocade finale tellement la défense du tandem Boulaâbi-Falhi donnait des sueurs froides à chaque accélération adverse. Y a-t-il erreur de casting? S'était-on laissé abuser par une sélection qui ne voulait pas du CHAN, mais qui faisait comme si... La priorité du Mondial brésilien serait-elle à ce point écrasante au point que tout le reste n'est que futiles petites joutes insignifiantes? Il faut croire que le public de Sousse ne s'y était pas trompé en venant en petit nombre au stade olympique samedi soir. Sa réaction de dépit n'est peut-être pas le meilleur moyen de faire avancer les choses, mais sa déception reste légitime et compréhensible. Le 13 juillet à Tanger, les Marocains peuvent se contenter d'un nul pour passer le tour. Dans la foulée de deux nuls tirés par les cheveux arrachés par la sélection A à Freetown et à Malabo et qui l'exposent à présent au danger d'un dernier match contre le Cap-Vert, cet échec à domicile rappelle d'abord que l'été n'a jamais réussi aux sélections nationales. Mais aussi que tous ces résultats appellent une réaction salutaire et une prise de conscience de la crise d'une élite qui n'a peut-être pas réellement les moyens de ses ambitions.