Ali Laârayedh et Mustapha Ben Jaâfar répètent leurs promesses que les élections se tiendront avant fin 2013 alors que Marzouki reconnaît que Bourguiba est bien le bâtisseur de la République Les trois discours prononcés, hier à l'ANC, par Mustapha Ben Jaâfar, Moncef Marzouki et Ali Laârayedh avaient un point commun, une idée générale partagée comme s'ils se sont passé leurs copies : «Il est vrai que nous ne sommes pas dans les délais pour la Constitution. Mais faites un effort et attendez-nous encore et vous aurez une Constitution qui rompra à jamais avec la dictature et installera la démocratie dans nos contrées pour des siècles contrairement à d'autres pays frères qui ont choisi un autre processus et ils sont en train d'en récolter amèrement les fruits». Les élections tant attendues auront lieu fin 2013, comme promis, bien que la mise en place de l'Isie qui «organisera de A à Z l'opération électorale» ne soit pas encore achevée et bien que la nouvelle loi électorale sur la base de laquelle se tiendront les élections ne soit pas encore à l'ordre du jour des constituants accaparés qu'ils sont par d'autres dossiers. Le Dr Mustapha Ben Jaâfar n'a pas résisté pour révéler aux présents que la «future loi électorale est pratiquement prête», alors que personne ne sait encore quel régime politique on va adopter et que les constituants ne sont au courant de rien. Un dernier quart d'heure crucial Et le président de l'ANC de préciser : «Aujourd'hui, nous pouvons dire que nous abordons le dernier quart d'heure crucial avant que la stabilité, la sécurité et la tranquilité ne s'installent pour toujours. Les instances constitutionnelles (justice, médias et élections) sont mises sur pied. Restent quelques petits détails à régler dans les prochains jours pour que l'Isie entame effectivement ses travaux et monte, en toute indépendance, l'opération électorale dans tous ses détails. Suivra ensuite, l'adoption de la loi portant création de l'Instance indépendante chargée de la justice transitionnelle pour que tous ceux qui ont fauté soient sanctionnés et que les victimes des abus soient enfin réparées». Quant à la commission parlementaire des compromis censée résoudre les points de discorde dans le projet actuel de la Constitution, «elle avance à grands pas. Elle rendra sa copie dans les jours qui viennent afin que l'ANC puisse entamer la discussion de la Constitution, chapitre par chapitre et article par article et puisse l'adopter au cas où tous les partis politiques reviendraient à la raison et décideraient de placer l'intérêt supérieur de la nation au-dessus de leurs intérêts». En parallèle, Ben Jaâfar n'oublie pas d'exprimer son soutien total à la troisième mi-temps du dialogue national de l'Ugtt qui devra démarrer, au plus tard, lundi prochain. «Nous sommes condamnés au consensus, nous n'avons d'autre alternative que le dialogue», renchérit-il. Bourguiba, bâtisseur de la République Marzouki a, enfin, lâché du lest pour reconnaître que Bourguiba est bien le bâtisseur de la République. Pour répondre au constituant Salah Choueïb (dissident d'Ettakatol, fondateur du parti la Troisième voie) qui insistait bruyamment pour qu'une minute de silence soit observée à la mémoire du leader Habib Bourguiba, le président de la République provisoire a fini par lâcher le morceau pour dire, en début de son allocution : «Aujourd'hui, nous célébrons la fête de la République, la République qui a été bâtie par le leader Habib Bourguiba. Une phrase accueillie par les applaudissements des présents. Et Marzouki de poursuivre : «Nous comprenons les critiques des Tunisiens lassés par la longueur de la période transitoire. Nous leur disons nous avons opté pour le meilleur choix en élisant l'ANC et en lui confiant la mission de rédiger la Constitution. Nous avons fait ce choix, le meilleur et le plus indiqué, pour que la rue ne s'empare pas de notre révolution et en fasse son otage. Toutefois, la voie est encore longue et truffée de dangers d'où la nécessité absolue d'éviter les dérapages qui peuvent nous mener vers l'inconnu. Nous avons besoin d'une feuille de route claire et de dates définitives pour les élections présidentielles, législative et municipales». «Ces dernières doivent se tenir, souligne Marzouki, le printemps prochain». La jeunesse doit être écoutée, estime-t-il encore. «Sur les listes électorales, il faudrait instituer le principe de la parité entre les jeunes et les adultes. Nous l'avons déjà fait pour les femmes et rien ne nous empêche de le refaire pour les jeunes». Nous avons besoin de notre passé pour édifier notre avenir Et comme s'ils avaient rédigé, de concert, leurs allocutions, Ali Laârayedh revient à la fameuse réconciliation avec l'histoire pour marteler : «Les peuples ont besoin de leur histoire pour rectifier leur marche sur la voie du militantisme. Ce sont le présent et l'avenir qui ont besoin du passé et non le contraire». Laârayedh indique encore : «Notre peuple a besoin de se réconcilier avec son passé dans son intégralité, loin de toute forme d'exclusion, d'oubli délibéré ou de déni d'une période ou d'une autre». Le chef du gouvernement passe en revue les acquis déjà réalisés comme la Haica, l'Instance provisoire de l'ordre judiciaire (Ipoj) et l'Isie «qui sera fonctionnelle dans les prochains jours et fixera la date des élections». Quant à la Constitution dont le projet vient d'être l'objet d'une discussion générale de la part des constituants, elle est pour Laârayedh «une constitution bénéficiant d'un consensus général sur sa plus grande partie, dans l'attente de ce qu'y ajouteront la commission des compromis et les participants au troisième round du dialogue de l'Ugtt. Notre ambition est que les Tunisiens y trouvent leurs convictions, leurs attentes et leurs espérances». Volet élections, le gouvernement est toujours attaché à ce qu'elles se déroulent, fin décembre prochain «à condition que l'ANC s'y mette sérieusement et adopte la Constitution le plus tôt possible». Pour conclure, Laârayedh rappelle les quatre priorités de son gouvernement «pour que les choses soient claires auprès des citoyens». «D'abord, l'accélération des élections, ensuite, la restauration de la sécurité et la lutte contre la violence et le terrorisme, enfin, la relance de l'économie et de l'investissement et la promotion des régions prioritaires. Une quatrième priorité : l'éradication de la corruption et de la malversation et le démarrage de la justice transitionnelle», souligne-t-il.