La sécurité alimentaire de la Tunisie est difficilement assurée. On importe presque Tout. Quelle stratégie pour repartir du bon pied. Interview Notre agriculture va mal, quelles sont les actions engagées pour la relève dans ce contexte vasouillard? Notre agriculture n'est ni performante ni moribonde. Je reconnais, toutefois, qu'elle est encore mal servie, sachant que le budget qui lui est alloué ne dépasse pas les 5% du budget de l'Etat, soit 2.150 millions de dinars (sur un montant global de 45.500 millions de dinars). Malgré ce financement limité, on a pu augmenter la production en matière de légumes, de fruits et de viandes blanches où on a réalisé l'autosuffisance longtemps espérée. Sinon, nous sommes aujourd'hui plus que jamais conscients du rôle que peut jouer notre agriculture dans le redressement de l'économie nationale dès lors qu'elle est bien servie. Nous avons élaboré toute une stratégie pour la promotion de ce secteur qui nourrit 600 mille familles qui, plus est, représente 9% du PNB (produit national brut) et totalise 19% de la main-d'œuvre et près de 10% des exportations du pays. Quelles sont les grandes lignes de cette stratégie ? Dans la nouvelle stratégie, l'on optera pour les réformes structurelles. Et l'assurance agricole se veut au cœur de ces réformes. Bon nombre de nos agriculteurs, pour ne pas dire la plupart d'entre eux, ne réalisent toujours pas l'importance d'assurer leurs récoltes contre les catastrophes naturelles. Un grand travail est donc à réaliser dans cette perspective. L'autre principale orientation consiste à les organiser dans des sociétés mutuelles de services agricoles. Cela permettra aux agriculteurs de mieux coordonner leur action et leur facilitera la commercialisation de leurs produits. Le terme « sociétés mutuelles des services agricoles » a été minutieusement choisi afin d'éviter toute confusion avec le collectivisme socialiste des années soixante. C'est également une solution pour rattraper le manque à gagner généré par l'atomisation de l'exploitation agricole tunisienne. Grâce à ces nouvelles structures, les agriculteurs vont pouvoir bénéficier de conseils, d'encadrement et d'un bon usage des acquis de la recherche au service des pratiques agricoles. Qu'avez-vous prévu comme fondements préalables afin de garantir l'adhésion des agriculteurs à ces nouvelles méthodes ? Là, vous évoquez un point important. D'ailleurs, il faut dire que l'on est aujourd'hui confronté à la difficulté du vieillissement de la population des agriculteurs, sachant que 60% d'entre eux ont dépassé soixante ans. Ce sont ces mêmes hommes qui négligent l'importance de l'assurance agricole et qui, plus est, n'ont pas la culture de l'aventure et du risque. D'où la nécessité de miser sur les nouvelles générations, dont les enfants de ces agriculteurs et les diplômés de l'enseignement supérieur. Mais ces jeunes peinent à démarrer, en l'absence du soutien financier qu'il faut. Qu'avez-vous préparé pour pallier ce genre de difficultés ? Nous en sommes très conscients. Tout au plus, il est une évidence qu'un jeune promoteur débutant ne peut pas fournir l'autofinancement qu'il faut pour l'acquisition d'une exploitation agricole d'une valeur de 200 mille dinars, soit 20 mille dinars. C'est pourquoi nous prévoyons la création d'un fonds d'investissement privé pour aider ces jeunes. Après tout, ce sont les banques qui financent. Toutefois, l'Etat doit quand même intervenir pour aider les jeunes désireux de monter leurs propres projets, mais qui se trouvent en phase initiale face à des difficultés financières. La commission créée le 12 janvier 2012 est chargée d'étudier l'endettement des agriculteurs et de planifier un plan d'action pour aider les jeunes à avoir leur autofinancement. On vient d'importer 16 millions de quintaux de céréales, alors que nos terres domaniales, abandonnées, sont toujours en friche. A quand leur exploitation ? Le nouveau cahier des charges y afférent est prêt. Et les nouveaux critères établis rompent totalement avec les anciennes pratiques qui n'ont fait qu'enfoncer le clou. A travers des communiqués, on a annoncé la location de 45 Smrda et le travail se poursuit. Les éleveurs renoncent de plus en plus à leur activité séculaire. A l'origine, une crise sécuritaire dont ils ont payé le lourd tribut en perdant une grande partie de leur bétail dérobé par les rôdeurs de minuit. Comment remettre les pendules à l'heure, selon vous ? C'est l'une de nos préoccupations majeures ces derniers temps. Nous sommes en train de collecter les informations pour la constitution d'un dossier qui sera, par la suite, transmis aux services compétents du ministère de l'Intérieur. Nous agirons désormais en coordination avec eux afin de taper fort sur la main des malfrats et de rétablir la confiance de nos éleveurs.