Un effort créatif certain et un exercice de l'art tout en sensibilité et en passion La galerie Kalysté inaugure la rentrée culturelle en beauté avec l'exposition de 66 œuvres (petits formats) de 6 artistes confirmés qui nous livrent leur fougue artistique et leur imaginaire affectif. Il s'agit de Victor Sarfati, Adel Megdiche, Bassma Haddaoui, Rachida Amara, Mohamed Ali Belkadhi et Beker Fredj, qui, techniques confondues, nous entraînent, chacun à sa manière, dans un univers à part. Les travaux qui égayent les cimaises de la galerie sont comme des petites fenêtres entrouvertes sur le monde réel et imaginaire. Profondeur, messages, univers oniriques, de quoi inviter le spectateur à plonger dans la richesse et la pureté de ces peintures. L'œuvre tout en sensibilité de Victor Sarfati, ce pionnier de la peinture tunisienne, est une célébration généreuse de la couleur et de la matière. Dans son univers pictural coloré, on retrouve des compositions où se mêlent textures et transparence, luminosité et scintillement, sensations abstraites et représentations figuratives. Cette peinture élégante est l'investissement de soi de tous les instants, de toute une vie. Elle convie le spectateur à partager un voyage créatif, un cheminement de l'artiste dans l'élaboration de ses œuvres. Sarfati construit avec beaucoup d'exigence et de patience un univers sensuel et «féminin», rigoureux et décoratif, où l'harmonie et la finesse font de ses tableaux une ouverture sur le monde. Quant à Mohamed Ali Belkadhi, il travaille ses œuvres en explorant de nouveaux chemins. Il peint des randonnées, des suggestions, des éventualités, installant une réelle émotion entre la peinture et le spectateur. Plutôt abstraite, sa peinture est comme une note de musique suggérée, mais jamais jouée. Il invente dans ce vide ce qui lui plaît et nous laisse la place pour le voyage. On peut entrer dans le tableau, y circuler et y vivre plein d'aventures en mélangeant ce que l'on est et ce que l'on voit. On recherche un paysage dont les couleurs et la matière se laissent à peine entrevoir. Rien n'est défini ni définitif. Tout est évolution et mouvement dans l'instant fragile et éphémère. Pour ce qui est de Rachida Amara, sa recherche plastique (technique mixte) tourne autour du même objet, du même sujet : le corps. Sur ses toiles, ce ne sont que des humains avec leurs visages et expressions, leurs membres et tensions. Des corps d'hommes et de femmes, surtout, peints dans des espaces pensés, parfois impensables. Dans ces peintres, elle nous montre l'humain dans toute sa chair à travers un travail imprégné de philosophie et de réflexions poétiques. Les corps, les figures et les anatomies, s'électrisent aux contacts des objets et des signes ; ils s'affrontent, ils s'accordent dans une sorte de synthèse kaléidoscopique. Quant aux toiles de Bassma Haddaoui, elles inspirent une gaieté contradictoire, une simplicité chatoyante, une force brute mais douce, une luminosité permanente. En contemplant ses œuvres, on sent toujours cette grande envie de s'exprimer, d'échanger, de partager... On a l'impression que ses tableaux naissent d'une manifestation intérieure, militante (à sa manière) avec l'univers pour : la liberté, l'espoir, la joie, la paix, la vie... Les œuvres de Adel Megdiche sont de véritables rapsodies colorées, nées sous les feux des acryliques, qui permettent au peintre de s'inventer de nouvelles architectures de l'espace. Le fond de ses toiles est à chaque fois le point de départ d'une nouvelle recherche technique, intellectuelle et émotionnelle où les touches colorées s'accumulent et révèlent au fur et à mesure le sujet. Un mélange entre chimère et réalité permettant à chacun de développer sa grande imagination. La peinture de Beker Ben Fradj laisse voir des plages colorées, des formes géométriques ou des portraits évoquant tour à tour la vie, l'amour, le silence, la réflexion, le mouvement ou l'immobilité, et une forme de rêve éveillé. De ses espaces abstraits émergent des visages, des fragments d'humanité présentant une «interaction entre le monde lyrique de rêves et le monde rationnel... Une petite fenêtre qui joint ces deux mondes». Des peintres, toutes obédiences picturales confondues, nous offrent, à travers leurs œuvres, une balade évanescente, une aventure humaine puissante et subtile haut en couleur... Une exposition qui vaut assurément le détour !