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Gisela Bergmann ou la passion des causes perdues
Reportage à Ghardimaou
Publié dans La Presse de Tunisie le 22 - 11 - 2013

Seule, à 80 ans, la plus tunisienne des Allemandes élève des sloughis et des chevaux d'une lignée locale rare, dans une ferme à Ghardimaou
C'est au milieu d'un champ d'oliviers que vit Gisela Bergmann. Vêtue d'une blouse verte et d'imposantes chaussures de montagne, à 80 ans, elle marche d'un pas vigoureux sur le terrain qui mène à sa maison. Allemande de naissance, cela fait 40 ans qu'elle réside au nord-ouest de la Tunisie, à Ghardimaou.
«On me demande toujours si je n'ai pas peur d'habiter si près des frontières algériennes. En réalité, la frontière n'existe pas». Pour se justifier, Gisela aime raconter cette histoire qu'elle a vécue avec son mari, décédé en 2004 : «On se promenait en montagne et à un certain moment on ne savait plus si on était sur le territoire tunisien ou algérien. On a rencontré un petit garçon et on lui a posé la question. Il a répondu : moi aussi je ne sais pas mais je suis algérien et je vais à l'école à Ghardimaou! C'est du vrai Maghreb uni!», dit-elle en riant dans le dialecte tunisien.
L'histoire s'est passée au début des années 1970, quand Gisela venait de s'installer en Tunisie avec son mari. «Boulehia», tel qu'on le surnommait dans la région, était ingénieur agronome et avait alors un contrat avec l'Institut national de recherche agronomique de Tunis pour mener un projet sur l'irrigation de la haute vallée de la Medjerda.
«La localité où j'habite s'appelle El Baraket. C'est un endroit où les choses ont tendance à proliférer», s'amuse-t-elle à dire. Perchée sur une colline, la ferme de Gisela abrite des chiens à l'allure fine, des bâtards, selon elle, mais qui ont du sang sloughi dans les veines. Il y a quelques années, des amis de Meknassi ont offert un sloughi au couple allemand. «Phénomène Baraket» oblige, la première chienne a donné de nombreux descendants de pure race, et d'autres, de sang mêlé. «Le Club faune et flore de Méditerranée a fait un recensement à travers tout le pays, il n'y a pas un seul sloughi en Tunisie qui ne soit pas issu de notre élevage». Selon elle, les populations locales ont pratiquement toutes disparu, entraînant un problème de consanguinité. Actuellement, Gisela n'a plus que deux sloughis femelles. «J'ai perdu presque tout mon effectif à cause de la leishmaniose. Une autre maladie, la parvovirose, a tué toute la dernière portée».
Les pur-sang du Sud
Tandis que les chiens se prélassent à l'ombre d'un palmier, des chevaux, protégés par un enclos, se regroupent en cercle comme pour tenir une réunion. «Ce sont des pur-sang arabes, d'une lignée du Sud, qui tend à disparaître, en Tunisie». A l'origine, ces chevaux voyageaient avec les nomades et accompagnaient les troupeaux lors de la transhumance. Ils servaient entre autres pour le labour des champs. Les jambes fines, les sabots solides, non ferrés, ils ont, selon Gisela, la particularité d'avoir un caractère «extraordinaire» et une longévité importante. Le plus souvent, les chevaux vivent entre 28 et 33 ans.
Les juments de Gisela se laissent caresser. Une des deux pouliches ne quitte pas la maîtresse des lieux, la suit et lui tend la tête. «Ils ne sont pas dans leur meilleure forme», confie Gisela avec amertume. Par manque de moyens, les chevaux sont nourris à la paille. En dépit des difficultés, Gisela se bat pour essayer de sauver les pur-sang menacés de disparition.
L'élevage des chevaux à Baraket a, lui aussi, commencé avec un cadeau, un poulain noir offert par si Béchir, un ami de Béja. «Ce cheval m'a beaucoup apporté. En 15 ans j'ai parcouru avec lui plus de 2.000 km par an».
A l'automne 1972, Gisela a eu un grave accident de la route avec son mari. «J'ai été blessée au pied, ça a fait une gangrène. Je suis allée voir le docteur Azzedine Annabi. Pour soigner mon pied, il m'a demandé de me mettre au soleil, de regarder les chevaux et les sloughis et d'étaler du miel sur la plaie infectée. Le miel m'a guérie et les animaux m'ont remonté le moral». Un jour, Gisela, qui souffrait encore de son pied, s'est évanouie au milieu du champ. Le petit cheval noir qui la suivait partout s'est comporté comme un fou jusqu'à ce que le mari de Gisela le suive et trouve sa femme gisant par terre. «J'ai vécu plusieurs histoires incroyables comme celle-là avec les animaux».
Equithérapie
Les chevaux de la ferme ont un caractère doux. Gisela a toujours eu l'idée de les mettre à la disposition des personnes à besoin spécifique.
Une volontaire américaine du Peace corps, spécialisée dans le travail avec les autistes, l'a encouragée à franchir le pas. «Selon elle, mes chevaux étaient tous aptes pour l'équithérapie. (...) Un jour, des éducateurs sont venus avec un groupe de handicapés. J'étais encore en train de discuter avec eux pour savoir comment procéder quand j'ai vu disparaître mon troupeau de chevaux. Les enfants handicapés étaient dessus! Mes apprentis les avaient mis sur le dos des chevaux et étaient partis avec eux. Je craignais le pire mais, au final, ils sont tous revenus en chantant. Tout le monde était content et on a gardé cette activité pendant plusieurs années, jusqu'à la chute de Ben Ali. Le directeur de l'Association des parents et amis des handicapés tunisiens a changé entre-temps, et les éducatrices ne sont plus aussi motivées pour reprendre l'activité».
Pour Gisela, l'un des souvenirs les plus marquants vécus avec les chevaux concerne une maman venue accompagnée de son enfant autiste. «Le garçon ne parlait pas. Il avait 4 ou 5 ans. Sa mère l'a porté contre elle sur le cheval. Ils ont fait des exercices de gymnastique pendant que le cheval marchait, c'est ce qu'on appelle le traitement en route. Quand le tour était fini, le petit a commencé à balbutier et à saluer tout le monde. Sa mère avait les larmes aux yeux, c'était la première fois que son fils réagissait de cette manière».
En 11 mois, Gisela a perdu 14 chevaux, mais ignore encore quel mal les a frappés. Elle soupçonne la babésiose, une maladie causée par les tiques des vaches. «Je suis descendue à Tunis pour prendre contact avec l'école vétérinaire, qui a peur de venir parce que selon elle, à Ghardimaou, c'est la guerre civile! Il y a un service vétérinaire dans la région mais les vétérinaires passent leur temps dans la montagne pour traiter la rage».
Dans la ferme à El Baraket, il reste encore 14 chevaux. Gizela ne reçoit aucun soutien du ministère de l'Agriculture. Ceux qui veulent l'aider, lui proposent de quitter Ghardimaou. «Tout le monde veut que je descende à Tunis mais je refuse. J'ai des racines ici. 40 ans c'est plus de la moitié de ma vie».
M.D.


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