Sécurité du Net, respect des données privées, contribution au développement, droits et obligations des utilisateurs étaient au menu de la première édition de l'IGF tunisien La bonne gouvernance de l'Internet. Voilà un sujet d'actualité aux quatre coins du globe. Entre « les interrogations légitimes sur la pérennité des ressources Internet (connectivité, bande passante, adresses IP, etc.), la codification des droits et obligations, la bonne gestion et l'optimisation des impacts », le Net accapare toutes les attentions et attise toutes les convoitises. Jamais une invention humaine n'a connu un développement aussi rapide. Entre 1996 et 2000, le nombre des ordinateurs connectés est passé de 36 millions à plus de 368 millions. Aujourd'hui, avec la démocratisation du web et les politiques de Broadband (Internet à haut débit), ainsi que le développement des smartphones et des tablettes tactiles, le nombre d'internautes a atteint la barre de 2,2 milliards. Et la communauté internationale n'est pas restée les bras croisés. Avec l'émergence de la cybercriminalité et les problèmes liés au respect des données privées, sans oublier le problème de la liberté d'expression sur le web, en 2006, sous l'égide du secrétaire général des Nations unies, conformément aux résultats du Sommet mondial sur la société de l'information, le Forum global de la gouvernance de l'Internet (Internet Governance Forum – IGF) a vu le jour. Un think-tank pour les acteurs d'Internet Ce forum avait comme finalité « d'engager les acteurs concernés par Internet dans un dialogue sur les questions de la gouvernance. » De ce fait, « l'IGF est donc une instance de concertation, neutre et multi-acteurs, qui ne remplace pas les mécanismes, institutions ou organisations déjà existants, en charge du fonctionnement de l'Internet. » En Tunisie, pour des problèmes logistiques et d'ordre politique liés à la dictature exercée sous nos cieux, il a fallu attendre la révolution de la dignité pour que l'IGF tunisien soit créé, le 4 septembre 2012, et tenir sa première assemblée générale élective du MAG National (Multistakeholder Advisory Group), le 30 mars 2013. Dans la foulée, l'IGF tunisien a tenu hier, à Tunis, son premier forum national à travers quatre workshops, en présence de plusieurs spécialistes qui ont traité divers sujets tels que «La nature d'Internet en tant que service», «La protection de la vie privée et des données personnelles en Tunisie», ainsi que «Le rôle d'Internet en tant que levier de développement économique», «Le caractère public du service Internet», «La migration IPV4-IPV6» et «La nécessité d'un plan national de cybersécurité». Un espace d'échanges Ridha Guellouz, président de l'Attic (Association tunisienne des TIC) et membre du MAG, a tenu à préciser que l'IGF n'est pas un groupe d'influence. Mais il s'agit bel et bien «d'un espace d'échanges où les diverses parties concernées, à savoir l'administration, le secteur privé, la société civile et le milieu académique, sont présents pour discuter d'un ensemble de questions relevant de la gouvernance de l'Internet». Il ne s'agit pas d'un espace décisionnel, mais plutôt d'un espace entièrement ouvert à l'ensemble des contributions. Chaque acteur va apporter son lot. Pour cette première édition de l'IGF, il y a un consensus autour des thèmes comme la question de la liberté d'expression sur Internet, l'Internet comme levier de croissance et de développement économique ou la question de la gouvernance». Selon M. Guellouz, en réponse à la question «Y a-t-il en Tunisie une bonne gouvernance de l'Internet ?», sa réponse est la suivante : « A l'heure actuelle, nulle part dans le monde il n'est possible de dire d'une manière catégorique et cassante que nous avons une bonne pratique de la gouvernance de l'Internet... La bonne gouvernance de l'Internet est comme la bonne gouvernance tout court. C'est un processus long et itératif : un va-et-vient continu. On essaie, et ça réussit ou ça ne réussit pas. (...) On donne et on prend jusqu'à arriver à une situation d'équilibre qui correspond aux attentes de tous». La transparence égale bonne gouvernance Concernant les rapports entre la bonne gouvernance de l'Internet et le concept de « l'Open Data », Farouk Kamoun, président de Sesame (Ecole supérieure privée des sciences appliquées et de management) et du MAG, pense que l'Open Data représente «une tendance». Selon lui, la gouvernance d'Internet repose sur la transparence. Qui dit transparence dit Open Data. Pour être transparent, il faut que la Data (donnée) soit disponible. Pour critiquer tel aspect, il faut avoir des données. Et, en plus, l'Open Data va permettre d'autres usages. Par exemple, si on peut disposer de certaines informations économiques ou relatives à d'autres secteurs, cela permettra de développer des études qui peuvent servir les investisseurs...». De son côté, Mohamed Ben Amor, conseiller auprès du ministre des TIC, a précisé que le ministère des Technologies de l'information et de la Communication, ainsi que le gouvernement, soutiennent vivement le rôle que joue l'IGF pour arriver à une bonne gouvernance de l'Internet en Tunisie. A propos des dernières déclarations de Slaheddine Kchok, président du Parti des pirates, qui a averti les autorités contre les effets d'un éventuel retour de la censure sur Internet, le conseiller du ministère des TIC répond comme suit : «Ce sujet a été débattu moult fois. L'IGF aurait pu être un excellent cadre pour débattre de ce sujet. Je suis étonné par l'attitude du Parti des pirates, qui a remué ciel et terre autour d'un éventuel retour de la censure sur Internet et la question de la liberté d'expression, ainsi que sur le respect des données privées. J'aurais préféré que le Parti des pirates soit présent dans l'IGF en tant qu'acteur de la société civile. En plus, l'IGF a prévu un workshop pour débattre de ces sujets. Et le gouvernement est très coopératif sur ces questions».