BICHKEK (Reuters) — Une semaine après les affrontements ethniques qui ont fait jusqu'à 2.000 morts dans le sud du Kirghizistan, les regards se tournent vers l'ancien président Kourmanbek Bakiev, perçu comme l'instigateur de ces violences. Sur le site internet du département d'Etat, Hillary Clinton a estimé que l'ex-Chef de l'Etat renversé par un soulèvement populaire en avril pourrait avoir une part de responsabilité dans ces troubles. "La destitution du président Bakiev, il y a quelques mois, a laissé sur place certains de ses partisans qui sont totalement opposés au gouvernement provisoire", explique la secrétaire d'Etat. "Certaines allégations sur les instigateurs (de ces troubles) doivent être prises au sérieux", ajoute-t-elle. Ces soupçons ont été relayés par le président ouzbek, Islam Karimov, qui a accusé hier des éléments "extérieurs" d'être à l'origine de la vague de violences ethniques qui a embrasé notamment les villes d'Och et de Djalalabad, anciens fiefs de Bakiev. "Ni les Ouzbeks, ni les Kirghizes ne sont responsables de cela", a déclaré Karimov, cité par l'agence de presse officielle Uza. "Ces actions perturbatrices ont été organisées et dirigées depuis l'extérieur. Les forces qui ont organisé ce mouvement subversif ont essayé d'entraîner l'Ouzbékistan dans ce conflit", a-t-il ajouté. Cette déclaration fait écho à la position du gouvernement intérimaire kirghize, qui estime que les troubles meurtriers ont été orchestrés par Bakiev, exilé en Biélorussie. Ce dernier nie toute implication. La présidente Roza Otounbaïeva s'est voulue optimiste hier, affirmant que les autorités étaient désormais en mesure de prévenir tous nouveaux troubles avant le référendum constitutionnel prévu le 27 juin. Karimov s'est entretenu au téléphone avec Hillary Clinton vendredi pour discuter de la situation, a indiqué l'agence Uza. "Ils ont procédé à un échange de vues sur les moyens de sortir de cette situation difficile et, en premier lieu, sur la manière de rétablir la stabilité du Kirghizistan aussi rapidement que possible", a ajouté Uza. C'est dans ce contexte que le secrétaire d'Etat adjoint américain Robert Blake est arrivé hier au Kirghizistan pour discuter avec le gouvernement intérimaire. Le diplomate américain, qui a visité des camps de réfugiés vendredi en Ouzbékistan et qui doit se rendre dans la journée dans le sud kirghize, a demandé une enquête internationale afin de déterminer l'origine de ces violences. "Il est important que le gouvernement provisoire créé un climat de confiance et de sécurité pour que les réfugiés en Ouzbékistan et tous ceux qui ont fui à l'intérieur du Kirghizistan puissent se sentir en confiance afin de regagner leurs domiciles et de vivre en paix, en harmonie avec leurs voisins", a-t-il dit, peu après s'être entretenu avec les responsables du pouvoir intérimaire. "Je pense clairement qu'il y a eu une dimension ethnique dans l'éclatement des violences. Mais les Etats-Unis ne disposent pas d'informations indépendantes sur ce qui s'est véritablement passé", a expliqué Blake. Selon les estimations de l'ONU, environ un million de personnes ont été affectées par les violences et environ 400.000 déplacés s'entassent dans des camps de fortune de part et d'autre de la frontière entre les deux ex-Républiques soviétiques. Des habitants d'Och ont raconté que les troupes gouvernementales se sont liguées avec des bandes de pillards pendant les troubles. "Amnesty International appelle le gouvernement intérimaire à réagir immédiatement à ces allégations de collusion des forces de sécurité et de faire clairement savoir que toutes les violations des droits de l'homme seront réprimées", a déclaré l'ONG dans un communiqué.